Skip Navigation
Fonds l'Eau vive banniere
Campus Saint-Jean : vers une intervention fédérale?

Campus Saint-Jean : vers une intervention fédérale?

FRANCOPRESSE – La ministre du Développement économique et des langues officielles, Mélanie Joly, invite le gouvernement de l’Alberta à annuler sa décision de couper le financement du campus Saint-Jean de l’Université de l’Alberta, dans une lettre adressée au premier ministre de la province, Jason Kenney. Le gouvernement fédéral serait même prêt à contribuer financièrement si les dollars provinciaux sont au rendez-vous.

À cause des compressions budgétaires à l’Université de l’Alberta, le Campus Saint-Jean — un des seuls établissements postsecondaires francophones dans l’Ouest canadien — a dû supprimer 77 cours sur les 409 offerts par l’établissement.

En entrevue avec Francopresse, la ministre Joly indique que «notre objectif présentement, c’est que Jason Kenney et son gouvernement reculent sur leur décision de couper les vivres du Campus Saint-Jean […] Parce que ça met à risque la pérennité du fait français en Alberta.»

Le professeur Rémi Léger, du Département de sciences politiques de l’Université Simon Fraser, explique que la lettre de la ministre Joly envoie le message aux Franco-Albertains que le gouvernement fédéral travaille pour assurer leurs intérêts, mais que le gouvernement albertain «n’est pas bon joueur».

De son côté, le porte-parole en matière de langues officielles pour le Parti conservateur, Alain Rayes, observe en entrevue avec Francopresse que «le problème du campus Saint-Jean ne date pas d’hier. Il faut juste écouter les recteurs pour voir que ça fait des années qu’il y a un sous-financement! De gouvernement en gouvernement, je vous le concède, mais quand j’entends de la petite politique comme ça… ça fait cinq ans qu’ils [les libéraux] sont au pouvoir, et bien qu’ils gèrent le problème!»

Le financement fédéral du Campus Saint-Jean est gelé depuis 2003, précise Alain Rayes.

Pas de dollars fédéraux sans dollars provinciaux

«On veut fondamentalement que [le gouvernement Kenney] continue à financer le Campus Saint-Jean comme auparavant, et s’il a besoin d’aide, qu’il fasse une demande au gouvernement fédéral. Nous allons être prêts à travailler avec lui, mais il doit lui-même faire cette demande et mettre de l’argent sur la table», souligne Mélanie Joly.

Rémi Léger s’explique mal le manque de clarté de la ministre Joly : pourquoi ne pas simplement affirmer que le fédéral veut une entente de financement où les couts sont partagés également par Ottawa et Edmonton?

La professeure Stéphanie Chouinard, du Département de sciences politiques du Collège militaire royal du Canada, explique que «Mme Joly est en train de prendre la même approche que ce qui a été fait pour l’Université de l’Ontario français, c’est-à-dire que “le gouvernement à Ottawa est à l’écoute, on veut vous aider, mais on veut que la province mette du sien”. Donc je vois là une répétition du scénario qui a eu lieu entre Ottawa et Queen’s Park l’année dernière.»

Dans le cas de l’Université de l’Ontario français, les gouvernements fédéral et ontarien s’étaient engagés à financer le projet à parts égales, Ottawa assumant les couts des quatre premières années du projet et Queen’s Park prenant le relai par la suite.

La politologue Stéphanie Chouinard pense que le modèle de financement de l’Université de l’Ontario français aurait le potentiel d’entrainer un «jeu de domino» où toutes les établissements postsecondaires francophones regarderaient du côté d’Ottawa pour bonifier leur financement.

Le risque est cependant que cela devienne «une façon pour les provinces de se dédouaner de financer adéquatement l’éducation postsecondaire en français», ajoute Stéphanie Chouinard. Les provinces pourraient effectuer des compressions en espérant qu’Ottawa comble le manque à gagner.

«Mais l’enjeu dans l’Ouest, du moins en Alberta, c’est que le gouvernement provincial ne veut pas jouer le jeu du fédéral. Et le jeu du fédéral, c’est de partager la facture 50/50», poursuit Rémi Léger.

«Est-ce que le fédéral est prêt à mettre de l’argent sur la table sans que les provinces en mettent aussi?» questionne le politologue.

Une compétence provinciale

La ministre Joly rappelle que l’enseignement est une compétence provinciale, et qu’en conséquence le gouvernement fédéral ne peut faire cavalier seul en la matière.

L’épanouissement des établissements postsecondaires francophones hors Québec «dépend de la bonne volonté des provinces. Et à chaque fois qu’il y a des gouvernements conservateurs qui sont élus, à chaque fois ils coupent. Et à chaque fois, bien la ministre des Langues officielles fédérale doit intervenir. Et ça là, c’est problématique», avance Mélanie Joly.

Des affirmations que remet en question le politologue Rémi Léger : «[La ministre] dit que le fédéral ne peut pas financer les universités parce que l’éducation est une compétence provinciale, mais ce n’est pas vrai. Le fédéral a le pouvoir de dépenser. Et le pouvoir de dépenser, c’est un joker dans son jeu. Si le fédéral veut vraiment soutenir les institutions postsecondaires francophones, il le peut avec le pouvoir de dépenser.»

Le député de Richmond-Arthabaska, Alain Rayes, opine : «Quand le gouvernement de Justin Trudeau veut s’ingérer dans la santé, comme l’enjeu des CHSLD au Québec, il ne se gêne pas.»

«C’est la responsabilité constitutionnelle du gouvernement fédéral de protéger la vitalité des communautés francophones minoritaires», ajoute Alain Rayes, et la ministre Joly se doit d’agir selon lui.

Une autre façon de financer les établissements postsecondaires en milieu minoritaire serait d’ajouter une composante sur l’éducation postsecondaire dans le Plan d’action sur les langues officielles du gouvernement fédéral, explique Rémi Léger.

«Dans le Plan d’action sur les langues officielles, il y a une composante sur la justice, sur la santé, sur l’immigration en santé, sur l’éducation — mais surtout des sommes qui sont dirigées en éducation maternelle à 12e année. Donc on pourrait ajouter une composante, avec des sommes additionnelles […] qui seraient allouées afin de soutenir les collèges et les universités francophones à l’extérieur du Québec», soutient Rémi Léger.

Pour le professeur, lorsque le gouvernement affirme avoir les mains liées lorsqu’il en vient au financement des établissements postsecondaires francophones, «c’est faire de la politique sur le dos des francophones.»

Cependant, la stratégie du gouvernement fédéral est d’exiger que les provinces investissent dans l’éducation postsecondaire en français, poursuit Rémi Léger.

«C’est une façon pour le fédéral de s’assurer que les provinces soutiennent aussi les francophones hors Québec, que la francophonie ce n’est pas juste une question fédérale ; c’est une question qui concerne les deux paliers de gouvernement», conclut le professeur Léger.

Une «nouvelle vision» des langues officielles présentée dans les prochaines semaines?

«Je pense que la question de l’éducation postsecondaire est importante, et dans le contexte du renforcement de la Loi sur les langues officielles, on va vouloir trouver une façon d’aider nos institutions, que ce soit scolaires, de santé, bref, tout ce qui est clé à la vitalité d’une communauté linguistique. Et au cours des prochaines semaines, j’aurai l’occasion de présenter la nouvelle vision en matière de langues officielles pour notre gouvernement», affirme Mélanie Joly.

Pour Alain Rayes, le projet de modernisation de la Loi sur les langues officielles traine en longueur : «Depuis des années, les consultations ont été faites en Commission parlementaire, au Sénat, le Commissaire aux langues officielles a déposé son rapport. Tout le monde est d’accord, tout le monde revendique un projet de loi pour qu’on puisse avancer. Et la ministre n’a même pas fait ce simple exercice là de donner une date d’échéance avant les fêtes.»

Article précédent Débats corsés entre les candidats au poste de conseiller scolaire
Prochain article Les professeurs de moins en moins protégés dans leur liberté universitaire
Imprimer
17081

Bruno Cournoyer Paquin (Francopresse)Francopresse

Autres messages par Bruno Cournoyer Paquin (Francopresse)
Contacter l'auteur

Contacter l'auteur

x
Une première cohorte de juristes obtient des certifications en français

Une première cohorte de juristes obtient des certifications en français

SASKATOON - Pour la première fois, cinq étudiantes de l’Université de la Saskatchewan ont reçu ce 5 juin à Saskatoon une certification de common law en français de l’Université d’Ottawa. 

21 juin 2019/Auteur: Lucas Pilleri/Nombre de vues (33141)/Commentaires (0)/
62,6 millions de dollars pour lutter contre la pénurie d’enseignants

62,6 millions de dollars pour lutter contre la pénurie d’enseignants

VANCOUVER - Le lundi 13 mai 2019, la ministre des Langues officielles Mélanie Joly a annoncé une stratégie nationale de recrutement et de rétention des enseignants francophones.

4 juin 2019/Auteur: Lucas Pilleri/Nombre de vues (35880)/Commentaires (0)/
Lettre du président de la SCFPA: Déménagement à l’Académie Rivier

Lettre du président de la SCFPA: Déménagement à l’Académie Rivier

Malgré le fait que l’édifice des Sœurs de la Présentation de Marie ait été construit dans les années 1960, sauf la piscine (années 1980), il s’agit d’une occasion de créer, au-delà du concept de centre scolaire communautaire, un pôle d’attraction et de développement unique en Saskatchewan et dans l’Ouest canadien.

25 avril 2019/Auteur: Michel Dubé/Nombre de vues (30676)/Commentaires (0)/
Le Collège Mathieu en pleine planification

Le Collège Mathieu en pleine planification

Avec un questionnaire en ligne distribué aux membres des organismes francophones, du gouvernement et de la communauté, le Collège Mathieu réalise une étude, première étape d’un vaste plan de développement. L’objectif : mieux répondre aux besoins de la communauté et du marché de l’emploi en Saskatchewan.

25 avril 2019/Auteur: Lucas Pilleri/Nombre de vues (28810)/Commentaires (0)/
Transferts en éducation: Ah, si les provinces voulaient…

Transferts en éducation: Ah, si les provinces voulaient…

Le gouvernement fédéral a prévu de l’argent dans son récent budget pour les écoles françaises. Cela dit, le bât blesse quelque part. Les provinces hésitent à montrer ce qu’elles vont faire de cet argent.

22 avril 2019/Auteur: Réjean Paulin/Nombre de vues (27112)/Commentaires (0)/
L’école Valois prête à quitter le pire quartier de Prince Albert

L’école Valois prête à quitter le pire quartier de Prince Albert

L'école fransaskoise envisage un déménagement à l'Académie Rivier

PRINCE ALBERT - Le ministre de l’Éducation, Gordon Wyant, est venu visiter l’Académie Rivier, un bâtiment qui pourrait permettre un déménagement rapide de l’école Valois et du centre communautaire dans un espace et un quartier plus adéquats.

29 mars 2019/Auteur: Frédéric Dupré/Nombre de vues (30847)/Commentaires (0)/
La Cité universitaire francophone : un nouveau nom pour l'édifice

La Cité universitaire francophone : un nouveau nom pour l'édifice

REGINA - Le Language Institute Building sera renommé La Cité. Le lancement officiel devrait avoir lieu lors de la rentrée 2019.

14 février 2019/Auteur: L'Eau vive/Nombre de vues (31020)/Commentaires (0)/
Ottawa débloque 1,9 million pour l'Université de l'Ontario français

Ottawa débloque 1,9 million pour l'Université de l'Ontario français

Le gouvernement fédéral veut assurer la continuité en 2019

La ministre fédérale Mélanie Joly financera la prochaine étape du développement de l’Université de l’Ontario français afin d’assurer sa continuité pour un an. L’aide ponctuelle de 1,9 M se veut un appui communautaire

14 janvier 2019/Auteur: Anonym/Nombre de vues (24553)/Commentaires (0)/
Journalisme en français : Des journalistes formés en Saskatchewan dès 2019

Journalisme en français : Des journalistes formés en Saskatchewan dès 2019

Le Collège Mathieu, situé à Saskatoon et Regina, importera le programme de journalisme de la Cité collégiale d’Ottawa pour la rentrée d’automne 2019. Le cours viendra étoffer une relève journalistique de plus en plus rare en milieu minoritaire. La Saskatchewan deviendra ainsi la province la plus à l’ouest du pays à offrir des cours de journalisme en français.

18 décembre 2018/Auteur: Lucas Pilleri (Francopresse)/Nombre de vues (26684)/Commentaires (0)/
Le Prix Bravo Bénévole 2018 décerné au Collectif des parents inquiets et préoccupés

Le Prix Bravo Bénévole 2018 décerné au Collectif des parents inquiets et préoccupés

Cette année, le prix Bravo bénévoles reconnait de manière solennelle les efforts du collectif des parents inquiets et préoccupés (CPIP).

10 novembre 2018/Auteur: Simb Simb/Nombre de vues (37291)/Commentaires (0)/
Participation record au Symposium des parents fransaskois 2018

Participation record au Symposium des parents fransaskois 2018

Des parents et des enfants comblés

REGINA - Le samedi 20 octobre dernier avait lieu le Symposium des parents organisé annuellement par l’Association des parents fransaskois (APF) et d’après le sourire affiché par les 175 personnes présentes (un record), cette édition a été une réussite.

28 octobre 2018/Auteur: Nicolas Roussy/Nombre de vues (45762)/Commentaires (0)/
Plan d’action de l’APF et Symposium des parents 2018

Plan d’action de l’APF et Symposium des parents 2018

Diversité, visibilité et renforcement

L’Eau vive s’est entretenue avec M. Carol-Guillaume Gagné, directeur de l’organisme, à quelques jours du Symposium des parents, l’événement phare de l’Association des parents fransaskois (APF),

19 octobre 2018/Auteur: Nicolas Roussy/Nombre de vues (31825)/Commentaires (0)/
Éducation 2.0

Éducation 2.0

On attribue à l’empereur Charlemagne la création de l’école. Depuis ce temps, l’éducation a pris une importance primordiale dans nos sociétés. Évidemment, la définition de ce concept a évolué au fil des siècles.

14 septembre 2018/Auteur: Michel Vézina/Nombre de vues (27251)/Commentaires (0)/
Un immeuble historique pour le Collège Mathieu

Un immeuble historique pour le Collège Mathieu

REGINA - Le  1er août dernier, le Campus de Regina du Collège Mathieu déménageait dans un bâtiment historique situé au 3304, Dewdney Avenue à Regina.

18 août 2018/Auteur: Nicolas Roussy/Nombre de vues (37019)/Commentaires (0)/
L’enseignement peut-il sauver le français en Louisiane ?

L’enseignement peut-il sauver le français en Louisiane ?

Le choix de Théo, documentaire coproduit par le professeur Thomas Cauvin et réalisé par Mi KL Espinasse, met en lumière le renouveau du français en Louisiane grâce au succès de l’immersion.

5 juillet 2018/Auteur: Lucas Pilleri (Francopresse)/Nombre de vues (34686)/Commentaires (0)/
RSS
Première678911131415Dernière

 - vendredi 22 novembre 2024