Skip Navigation
Nouveau système d'abonnement Fonds l'Eau vive banniere
Francopresse
/ Catégories: Éducation, Postsecondaire

La francophonie, parent pauvre du postsecondaire

Image
Crédit : Capture d’écran – Francopresse

Les participants du cinquième atelier des États généraux sur le postsecondaire en contexte francophone minoritaire (g. à d.) : Allister Surette, recteur de l’Université Sainte-Anne ; Martin Normand (animateur) ; et Geneviève Tellier, professeure titulaire à l’École d’études politiques de l’Université d’Ottawa (en haut) ; Lise Bourgeois, présidente-directrice générale du collège La Cité ; Sophie Bouffard, rectrice de l’Université de Saint-Boniface ; et Mariève Forest, présidente et chercheuse principale de la firme de recherche sociale appliquée Sociopol

L’égalité est loin d’être atteinte entre les établissements postsecondaires francophones et ceux de la majorité anglophone. Pour y parvenir, deux axes sont à poursuivre : l’accroissement des ressources et la transparence. 

Collèges et universités en milieu minoritaire revendiquent un financement de base accru des gouvernements et une meilleure documentation des fonds ciblant l’éducation postsecondaire dans la francophonie canadienne. 

L’Association des collèges et universités de la francophonie canadienne (ACUFC), en partenariat avec la Fédération des communautés francophones et acadienne (FCFA) du Canada, a tenu le 12 janvier son cinquième atelier dans le cadre des États généraux sur le postsecondaire en contexte francophone minoritaire. La discussion portait sur le thème « Vers une égalité réelle du secteur postsecondaire en contexte francophone minoritaire ».

Un financement trop maigre 

Image
Au fil des ans, le pourcentage de financement provenant du gouvernement a diminué tandis que celui des étudiants internationaux a augmenté.
Crédit : Source : Mariève Forest – Capture d'écran Francopresse

D’entrée de jeu, la présidente et chercheuse principale de la firme de recherche sociale appliquée Sociopol, Mariève Forest, a présenté quelques résultats d’une étude qu’elle a coréalisée en 2021 avec le chercheur Guillaume Deschênes-Thériault.

Il en ressort que « le financement est le plus grand enjeu pour la pérennité de la formation postsecondaire en français minoritaire ». Cette réalité a plusieurs impacts néfastes sur le réseau, dont « une compétition accrue entre les établissements et une volatilité accrue des revenus […] Les établissements qui ont de grands effectifs et ceux qui recrutent massivement à l’étranger s’en tirent mieux », note la chercheuse. 

Mariève Forest ajoute qu’en comparant la proportion de francophones dans une province et les dépenses totales pour la formation universitaire en français, il apparaît que l’équilibre est loin d’être atteint.

En Nouvelle-Écosse, les fonds correspondent à 48 % « des montants qui pourraient être accordés si la proportion des francophones dans la province était prise en considération » ; le Manitoba et le Nouveau-Brunswick font meilleure figure avec un comparatif de 84 %, tandis que les unités académiques universitaires de l’Ouest (Saskatchewan, Alberta et Colombie-Britannique) offrent de la formation en français qui n’équivaut que de 5 à 17 % de la population francophone.

« En 2018-2019, il est raisonnable d’estimer que près de 30 000 francophones ont réalisé des études postsecondaires en anglais, notamment par manque d’accès aux études en français et par manque d’intérêt à l’égard des études en français », souligne encore Mariève Forest. 

La part des gouvernements stagne depuis 2008

Le rapport The State of Postsecondary Education in Canada, 2021 de la firme Higher Education Strategy Associates (HESA) révèle que, dans l’ensemble du Canada, en incluant les universités anglophones, le financement gouvernemental stagne depuis 2008 « tandis que les recettes provenant des étudiants ont augmenté de manière constante, principalement en raison de l'augmentation du nombre d'étudiants internationaux ».

« Par exemple, dans les établissements universitaires, en 2018-2019, les revenus provenaient principalement de sources gouvernementales (45,8 %) et des droits de scolarité (29,4 %). En outre, la part du financement des gouvernements provinciaux a diminué dans les dernières années, passant de 38,6 % en 2013-2014 à 35,4 % en 2018-2019 », indique l’ACUFC dans le document préparatoire de son cinquième atelier.

Pour la professeure titulaire de l’École d’études politiques de l’Université d’Ottawa Geneviève Tellier, il s’agit là d’un des deux aspects principaux à aborder pour discuter d’égalité réelle du postsecondaire en francophonie minoritaire. Elle estime cependant qu’il serait plus simple de commencer par le second aspect, soit celui de la transparence financière. 

Des fonds absents des budgets

Outre les fonds versés directement aux universités par les provinces et ceux versés directement aux provinces et aux universités par le fédéral, « les provinces et le gouvernement fédéral versent aussi des fonds directement aux particuliers, aux entreprises et aux [organismes sans but lucratif] », souligne Geneviève Tellier.

Cela prend notamment la forme de prêts et bourses pour les étudiants, de crédits d’impôt pour les parents, de crédits d’impôt à la recherche pour les chercheurs et de crédits d’impôt pour dons et pour la recherche pour les entreprises et organismes sans but lucratif.

La politologue note qu’en 2020, ces dépenses fiscales supplémentaires se sont élevées à 4,7 milliards de dollars, « soit plus de 10 % des budgets actuels des universités – 41 milliards en 2020 ».

« Ces fonds supplémentaires n’apparaissent pas dans les budgets et sont dépensés par le gouvernement fédéral. Donc il y a de l’argent ailleurs qui cible d’autres particuliers qui ont d’autres objectifs en tête et qui ne font pas partie du réseau universitaire », souligne encore Geneviève Tellier. La politologue note que ces mesures fiscales « favorisent les contribuables les mieux nantis ».

Le projet de loi S-215 de la sénatrice Lucie Moncion, déposé à la fin novembre 2021, est l’une des initiatives visant à instaurer plus de transparence en ce qui concerne le financement des établissements postsecondaires.

« On commence à se poser des questions sur ce manque de transparence-là dans les documents publics et je pense qu’il faut pousser [là-dessus]. Pour pouvoir savoir quoi faire, il faut avoir de l’information et on n’a pas toute l’information en ce moment », conclut Geneviève Tellier.

« On arrive au squelette »

Le recteur de l’Université Sainte-Anne en Nouvelle-Écosse, Allister Surette, la rectrice de l’Université de Saint-Boniface au Manitoba, Sophie Bouffard, et la présidente-directrice générale du collège La Cité, Lise Bourgeois, ont réagi aux présentations de Mariève Forest et de Geneviève Tellier.

Chacun s’accorde pour dire que le financement de base offert par les gouvernements stagne depuis trop longtemps et qu’il n’est pas suffisant pour permettre aux établissements postsecondaires en milieu minoritaire de se développer et de soutenir l’épanouissement des communautés francophones.

« Avec les coupes successives de la province, essentiellement 1 % par année dans les dernières années […] nous, on n’a pas de gras, on a vite coupé dans le muscle et on arrive au squelette », résume Sophie Bouffard.

« Ce que je souhaite et ce dont on a besoin, c’est d’une reconnaissance importante que nous sommes dans une autre logique que le postsecondaire plus générique au Canada. On est dans une logique de construction communautaire, identitaire et linguistique. […] On a cette couche additionnelle de former des diplômés bilingues et c’est un avantage compétitif pour les provinces », ajoute la rectrice de l’Université de Saint-Boniface.

De son côté, Lise Bourgeois souhaiterait voir des collaborations « qui permettent de répondre aux besoins de nos communautés rapidement. […] Quand on est la minorité, il faut être meilleur et il faut être plus rapide », observe-t-elle.

Or, le financement actuel ne permet pas de développer de telles initiatives à long terme, déplore la PDG de La Cité. « Le financement qu’on devrait recevoir, c’est pour développer des projets soutenus dans le temps pour faire différemment de la majorité […] et le faire en amont pour s’occuper des besoins et des nouvelles réalités», défend Lise Bourgeois.

Allister Surette de l’Université Sainte-Anne estime qu’une bonne stratégie pour y parvenir serait que le milieu postsecondaire francophone fasse front commun auprès des gouvernements : « Je pense qu’il faut approcher le fédéral pour nous aider à offrir un leadeurship à l’intérieur de nos provinces et nos territoires en termes de langue française. La modernisation de la Loi sur les langues officielles et l’importance accordée aux communautés francophones en situation minoritaire peut nous aider beaucoup. »

Le recteur déplore que lorsque les provinces reçoivent les transferts de fonds fédéraux, « ils ne font plus attention à la langue française. Le fédéral a un rôle à jouer pour nous appuyer ».

Le prochain et dernier atelier des États généraux sur le postsecondaire en contexte francophone minoritaire aura lieu le mercredi 2 février sur le thème « Un dialogue sur les engagements et les obligations mutuels ». L’ACUFC, en partenariat avec la FCFA, tiendra également quatre forums citoyens sur l’éducation postsecondaire en français à compter du 26 janvier. 

Francopresse est le partenaire médiatique officiel des États généraux sur le postsecondaire en milieu francophone minoritaire.

Article précédent Revue de l'année 2021 - Éducation
Prochain article Postsecondaire dans l'Ouest: la demande dépasse l’offre
Imprimer
8024

FrancopresseFrancopresse

Autres messages par Francopresse
Contacter l'auteur

Contacter l'auteur

x
Les écoles fransaskoises réussissent leur rentrée malgré la pandémie

Les écoles fransaskoises réussissent leur rentrée malgré la pandémie

Rentrée scolaire

La rentrée scolaire fransaskoise a eu lieu du 8 au 11 septembre partout dans la province. L’eau vive s’est entretenue avec quelques parents pour faire le bilan d’une semaine riche en émotions.

17 septembre 2020/Auteur: Estelle Bonetto/Nombre de vues (16385)/Commentaires (0)/
Des pistes de réflexion pour financer l’éducation postsecondaire francophone

Des pistes de réflexion pour financer l’éducation postsecondaire francophone

La récente victoire du Conseil scolaire francophone de la Colombie-Britannique (CSFCB) en Cour suprême laisse présager une possible expansion de l’article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés.

28 août 2020/Auteur: Bruno Cournoyer Paquin (Francopresse)/Nombre de vues (16046)/Commentaires (0)/
Quand on l’attaque, la francophonie contre-attaque

Quand on l’attaque, la francophonie contre-attaque

Le Franco (Alberta) – L’Association canadienne-française de l’Alberta (ACFA) promet une phase II de la campagne «Sauvons Saint-Jean» dès la rentrée. L’appel à des manifestations et une action en justice sont sur la table. 

24 août 2020/Auteur: Geoffrey Gaye (Le Franco)/Nombre de vues (19083)/Commentaires (0)/
Rentrée scolaire : des parents se confient

Rentrée scolaire : des parents se confient

Une rentrée sous le signe de la fébrilité et de la solidarité

À quelques semaines du jour J, beaucoup d’interrogations subsistent. Tantôt confiants, tantôt inquiets, plusieurs parents fransaskois se sont confiés à l’Eau vive.

20 août 2020/Auteur: Estelle Bonetto/Nombre de vues (16276)/Commentaires (0)/
Dans ce temps-là !

Dans ce temps-là !

À l’époque où j’étais élève à la fin de l’élémentaire, quand arrivait le mois de juin, nous étions assez intenables dans les classes... La fête de la Saint-Jean-Baptiste marquait le début des vacances estivales. Les classes s’étaient terminées la veille et on avait vidé nos pupitres. Plus de devoirs. Plus de leçons. 

16 juillet 2020/Auteur: Michel Vézina/Nombre de vues (22288)/Commentaires (0)/
Les Fransaskois obtiennent enfin une nouvelle école

Les Fransaskois obtiennent enfin une nouvelle école

Après plusieurs années d’attente et une entente de principe avec le gouvernement de la Saskatchewan qui tardait à se concrétiser, une nouvelle école primaire francophone verra finalement le jour dans la capitale provinciale.

13 juillet 2020/Auteur: Lucas Pilleri/Nombre de vues (29342)/Commentaires (0)/
Immersion : Cinquante ans d’une formule éprouvée

Immersion : Cinquante ans d’une formule éprouvée

Le tout premier programme d’immersion en Saskatchewan est apparu à Saskatoon en 1968. Cinquante ans plus tard, ils sont plus de 16 500 à travers la province à se retrouver sur les bancs du programme qui fait de plus en plus d’adeptes.

8 juillet 2020/Auteur: Lucas Pilleri, avec les informations de Diane Lacasse/Nombre de vues (26728)/Commentaires (0)/
Un jardin communautaire à l’école Mgr de Laval à Regina

Un jardin communautaire à l’école Mgr de Laval à Regina

Produire local, le nouveau défi des francophones de Regina

REGINA - LAssociation canadienne-française de Regina a inauguré son tout premier jardin communautaire le 15 juin dernier sur le terrain de l'École Mgr de Laval.

1 juillet 2020/Auteur: Leslie Diaz – Initiative de journalisme local – APF /Nombre de vues (30927)/Commentaires (0)/
Les Fransaskois applaudissent la victoire des parents franco-colombiens en Cour suprême

Les Fransaskois applaudissent la victoire des parents franco-colombiens en Cour suprême

Après 10 ans de lutte judiciaire, la Cour suprême du Canada a tranché en faveur des parents franco-colombiens. Cette décision historique a été chaudement saluée par la communauté fransaskoise.

29 juin 2020/Auteur: Lucas Pilleri – Initiative de journalisme local – APF/Nombre de vues (28021)/Commentaires (0)/
L’histoire de la fransaskoisie narrée aux jeunes

L’histoire de la fransaskoisie narrée aux jeunes

Ateliers scolaires Gardiens de lys'toire par la Société historique de la Saskatchewan

À travers sa série d’ateliers pédagogiques, la Société historique de la Saskatchewan (SHS) donne vie à l’histoire dans la salle de classe des écoles de la province. 

28 juin 2020/Auteur: Lucas Pilleri – Initiative de journalisme local – APF/Nombre de vues (27254)/Commentaires (0)/
La pandémie risque de nuire à la francophonie des universités

La pandémie risque de nuire à la francophonie des universités

Les universités francophones du pays misent sur l’inscription d’étudiants internationaux. Les mesures sanitaires en place affecteront directement les inscriptions.

14 juin 2020/Auteur: André Magny (Francopresse)/Nombre de vues (22057)/Commentaires (0)/
Toujours pas de déblocage pour le Campus Saint-Jean

Toujours pas de déblocage pour le Campus Saint-Jean

Trois semaines après que l’Association canadienne-française de l’Alberta a lancé une campagne de mobilisation pour sauver le Campus Saint-Jean de l’Université de l’Alberta, l’incertitude règne toujours quant à l’avenir de l’établissement.

13 juin 2020/Auteur: Guillaume Deschênes-Thériault – Francopresse /Nombre de vues (23930)/Commentaires (0)/
Conseil des écoles fransaskoises: À vos pupitres, citoyens!

Conseil des écoles fransaskoises: À vos pupitres, citoyens!

Si tout va bien à la rentrée de septembre, le Conseil des écoles fransaskoises (CEF) ira de l’avant avec un concept nouveau en Saskatchewan, mais qui a fait ses preuves dans d’autres provinces: l’école communautaire citoyenne.

13 juin 2020/Auteur: André Magny (Initiative de journalisme local – APF – Ouest)/Nombre de vues (25701)/Commentaires (0)/
La Cour suprême donne gain de cause aux parents franco-colombiens

La Cour suprême donne gain de cause aux parents franco-colombiens

La Cour suprême du Canada a donné raison aux francophone de la Colombie-Britannique, qui réclame depuis dix ans devant les tribunaux que le système scolaire de langue française soit mis à égalité avec le système anglophone.

12 juin 2020/Auteur: Marc Poirier – Francopresse /Nombre de vues (29718)/Commentaires (0)/
André Moquin, récit vivant de la fransaskoisie

André Moquin, récit vivant de la fransaskoisie

Fils et petit-fils de colons de l’Ouest, André Moquin a œuvré toute sa vie pour l’avancement de l’éducation en français dans sa province.

2 juin 2020/Auteur: Lucas Pilleri – Initiative de journalisme local – APF /Nombre de vues (31036)/Commentaires (0)/
RSS
Première34568101112Dernière

 - dimanche 22 décembre 2024