Skip Navigation
Festival fransaskois 2024

Rencontre avec Stéphane Dion

Le député libéral, Stéphane Dion, aux bureaux de l’Eau vive.

Le député libéral, Stéphane Dion, aux bureaux de l’Eau vive.

Photo : Alexandre Daubisse

Stéphane Dion a été ministre responsable de l’Unité canadienne sous Jean Chrétien après le référendum de 1995, ministre de l’Environnement de Paul Martin puis chef du Parti libéral du Canada du 2 décembre 2006 au 8 décembre 2008.

 

Aujourd’hui, député fédéral de la circonscription de Saint-Laurent-Cartierville, au Québec, Monsieur Dion était de passage dans nos bureaux, jeudi 21 août, lors de sa consultation auprès des organismes fransaskois.

 

Eau vive : La communauté fransaskoise est inquiète des coupures subies de plus en plus importantes de la part de Patrimoine canadien. Que pensez-vous de ce phénomène?

Stéphane Dion : C’est épouvantable. Le gouvernement fédéral ne devrait pas être perçu ainsi. Il devrait être un partenaire essentiel. Les besoins ont changé. Il faut considérer les économies d’échelle et l’inflation. Nous croyons en cette cause. Il faut établir les priorités du jour. L’immigration amène de nouveaux défis et le programme fédéral n’est pas adapté. Patrimoine canadien et les leviers fédéraux devraient s’adapter aux nouveaux défis.

 

EV : Les coupures budgétaires à Radio-Canada sont également source d’inquiétude pour notre communauté. On craint une perte de moyens. Quelle serait la stratégie du Parti libéral sur la question?

SD : Nous croyons au rôle de diffuseur public. Nous voulons qu’il ait une responsabilité d’ordre public. Lorsque nous en avons eu l’opportunité nous avons réinvesti les surplus dans la grande maison de Radio-Canada et sa capacité de répondre aux besoins des communautés notamment les communautés de langues officielles minoritaires. Je ne sens pas cette conviction de la part du gouvernement actuel. En Saskatchewan, s’il y a des coupures à CBC, il y a d’autres sources d’information en anglais mais souvent en français c’est seulement Radio-Canada. Il faut en être conscient quand on prend les décisions à Ottawa. C’est trop important pour les communautés. L’objectif larvé du gouvernement est de privatiser notre diffuseur public or le Canada a besoin de ce service pour les enjeux de la langue française, de la culture anglophone canadienne face aux États-Unis et des langues et cultures autochtones. Le secteur privé ne ferait pas face à tous ces besoins.

Le seul engagement qu’on peut faire c’est que nous croyons au diffuseur public, au fait français en Saskatchewan et on fera tout pour être un bon partenaire. C’est aussi à la communauté d’identifier clairement ce qu’elle attend de nous.

 

EV : La cause Caron est maintenant en cour Suprême. Quelle est votre position sur la question?

SD : C’est beaucoup de détermination d’aller de cour en cour. Nous respecterons le jugement. S’il est positif, nous espérons que tout le monde le respectera. Il faut respecter le jugement de la cour lorsqu’il sortira.

 

EV : Jim Watson, le maire d’Ottawa, la capitale fédérale, refuse catégoriquement son statut bilingue. Selon lui, il n’y en a pas besoin car les services bilingues sont très performants. Quelle est votre position?

SD : Nous pensons qu’un pays bilingue devrait avoir une capitale bilingue. Il y a des avantages à être la capitale d’un pays mais aussi des responsabilités. On invite le maire à voir ça sous cet angle. Il me semble que la province [l’Ontario] est plus ouverte. Le maire peut savoir que si on devient le gouvernement on sera très intéressés à un statut bilingue si cela devait être sa politique. Entre-temps, il faut encourager le maire à maintenir sa politique en place et à l’améliorer si possible. Car tout ne dépend pas du statut bilingue. 

 

EV : Ce serait un symbole fort.

SD : Oui, un symbole fort et une pérennité. Car avec un statut bilingue on a des recours qui font en sorte que si on a un maire moins motivé que le maire actuel on n’en pâtira pas, on en pâtira moins. C’est une protection.

 

EV : Concernant l’environnement, sujet qui vous tient à cœur, et les sables bitumineux, quelle serait l’alternative politique du Parti libéral?

SD : Premièrement, il faut s’assurer qu’on a des évaluations environnementales indépendantes, compétentes et faites dans les temps requis. Cela a été démantelé par le gouvernement actuel. Je parle de la qualité de l’air, de l’eau, de la contamination des sols. Les évaluations sont faites mais ne sont pas suffisamment rigoureuses et transparentes. Donc, il y a un renforcement à faire de ce côté-là. Il nous faut des réglementations très strictes et s’assurer qu’elles soient mises en place.

Deuxièmement, si on fait le nécessaire concernant les émissions de gaz à effet de serre, on va aider à l’exportation de notre ressource. C’est cela le paradoxe. Ce n’est pas le pétrole qu’il faut réduire mais les gaz à effet de serre. Pour cela il faut une réglementation qui oblige les producteurs pétroliers à réduire leurs émissions. Une fois ces réglementations mises en place, il n’y aura plus de raisons de boycotter notre pétrole1. La politique du gouvernement actuel de considérer l’environnement comme un frein à notre économie, nuit à l’emploi, au développement économique, à notre réputation.

 

EV : Vos détracteurs se sont servis de votre double nationalité pour remettre en question votre loyauté nationale, vous leur avez répondu que de nombreux hommes politiques canadiens de haut rang, dont le Premier ministre, John Turner, avaient, eux aussi, la double nationalité. N’y a-t-il pas toujours cette épée de Damoclès au-dessus de votre tête?

SD : Je ne le vois pas comme ça. Je l’assume. Personne n’a le droit de remettre en cause ma loyauté envers le Canada. Elle est pleine et entière mais je suis fier du bagage culturel qui me vient de ma maman. Je ne vois pas pourquoi je le renierai. Et je dois aussi m’identifier à tous ces Canadiens qui ont la double nationalité qu’on ne peut continuellement soupçonner de manquer de loyauté envers le Canada pour autant. Ce serait tout à fait injuste envers elles et eux.

 

EV : On se rend compte que les droits des francophones hors-Québec ne sont jamais autant respectés que lorsque le Québec connaît une vague indépendantiste. Pourrait-on trouver une voie qui permettrait de respecter les droits des francophones hors-Québec sans attendre que l’intégrité du pays soit menacée?

SD : D’abord, il est très difficile de renoncer au Canada. C’est le problème des indépendantistes depuis le début, de convaincre les Québécois de cesser d’être des Canadiens. L’une des nombreuses raisons pour lesquelles il est difficile de renoncer au Canada est qu’il s’est fait en français avant de se faire en anglais. Dire aux Québécois de laisser tomber tout ça, les francophones des autres provinces et tout ce qu’on a bâti c’est très difficile et cela va rester comme un obstacle majeur au démantèlement du Canada.

L’autre chose c’est qu’un Canada bilingue est une force pour tous les Canadiens. Avoir deux langues officielles, qui sont des langues internationales, est une chance inouïe et on aurait bien tort dans ce monde global, où il faut échanger avec tous les continents, d’y renoncer. Le fait d’avoir compris ça fait que nous sommes un pays plus ouvert et plus tolérant. Il faut voir dans la diversité une force et non pas une menace. C’est pour ça qu’on doit toujours soigner de près la relation de l’ensemble du pays avec ses communautés de langues officielles minoritaires. Elles sont un garant de notre effort de rester un pays ouvert, un pays où chaque être humain a sa chance quelles que soient ses origines.

 

EV : Pensez-vous que les Canadiens se rendent compte de cette force?

SD : La majorité, oui, mais pas assez. Ceux qui ne s’en rendent pas compte, ce n’est pas leur faute c’est qu’on ne le leur dit plus. Le bilinguisme est un indicateur de notre capacité à rester le Canada dans un monde en changement. Le monde entier nous regarde comme un monde tolérant, un pays d’ouverture. C’est un combat de tous les jours. Il ne faut jamais le prendre pour acquis. L’intolérance vous la sortez par la porte, elle rentre par la fenêtre. Un des indicateurs, c’est, par exemple, est-ce que la société fransaskoise va faire face au défi de l’immigration? Allez-vous faire que dans cette communauté francophone, de plus en plus diversifiée, tout le monde va se sentir comme faisant partie d’une même communauté et heureux d’apprendre de la diversité même de ses membres? C’est un enjeu essentiel dont on pourrait dire c’est votre problème mais en fait c’est le problème du Canada. Et le Canada doit être à la hauteur de l’espoir qu’il représente dans le monde. 

 

EV : Êtes-vous inquiet du fait qu’on se retrouve avec un gouvernement conservateur élu avec une minorité d’électeurs?

SD : Ça c’est le mode de scrutin que nous avons. Je crois qu’il faut en changer. Je n’aime pas me demander au soir d’une élection : « Quelle région de mon pays va être exclue de la branche exécutive, exclue du gouvernement? » Avec le mode de scrutin que nous avons, il y a une concentration artificielle des sièges ravis par les partis. J’ai des idées sur la façon dont on pourrait le faire. Si on est le gouvernement, nous nous sommes engagés à avoir un vrai débat là-dessus avec les Canadiens, voir si on peut modifier le mode de scrutin d’une façon utile pour le Canada.


1Allusion aux mouvements contre l’oléoduc entre l’Alberta et le Golfe du Mexique aux États-Unis et l’achat de pétrole canadien.

Imprimer
24089
 

Alexandre Daubisse (EV)Alexandre Daubisse (EV)

Autres messages par Alexandre Daubisse (EV)
Contacter l'auteur

Contacter l'auteur

x

La bataille de l’éducation

Un des sujets quasiment tabous de la présente campagne électorale est l’enjeu des langues officielles. Probablement qu’il s’agit d’un terrain au moins aussi miné que celui du niqab.
14 octobre 2015/Auteur: Michel Vézina/Nombre de vues (30676)/Commentaires (0)/
Moins d'élèves dans les écoles fransaskoises

Moins d'élèves dans les écoles fransaskoises

Entrevue avec André Denis, président du Conseil scolaire fransaskois

REGINA - Depuis la rentrée, les écoles fransaskoises ont enregistré plusieurs dizaines d’inscrits en moins par rapport à l’an dernier. Le président du Conseil scolaire fransaskois (CSF), André Denis, se dit inquiet mais veut attendre d’en savoir plus.

14 octobre 2015/Auteur: Propos recueillis par Sébastien Németh/Nombre de vues (34104)/Commentaires (0)/
Le Collège Mathieu commence l’année en bonne santé

Le Collège Mathieu commence l’année en bonne santé

Des nouveautés dévoilées à l'Assemblée générale annuelle

GRAVELBOURG - Le Collège Mathieu a tenu, le 2 octobre dernier, son Assemblée générale à Gravelbourg. Les sujets d’ordre financier, la création de nouveaux partenariats et aussi de nouvelles techniques étaient à l’ordre du jour.

8 octobre 2015/Auteur: Gary Ouellette (EV)/Nombre de vues (26017)/Commentaires (0)/
Des parents chargent à nouveau le Conseil scolaire

Des parents chargent à nouveau le Conseil scolaire

REGINA - Moins de six semaines après une Assemblée générale extraordinaire plutôt houleuse, le Conseil scolaire fransaskois (CSF) est de nouveau attaqué.

8 octobre 2015/Auteur: Sébastien Németh (EV)/Nombre de vues (27672)/Commentaires (0)/
Formation pour les animatrices de groupes de jeux

Formation pour les animatrices de groupes de jeux

SASKATOON - L’Association des parents fransaskois (APF) et le Collège Mathieu ont offert aux animatrices de groupes de jeux de toute la province une formation gratuite le samedi 26 septembre dans

1 octobre 2015/Auteur: Sandra Hassan Farah (EV)/Nombre de vues (23476)/Commentaires (0)/
Nouvelle classe portative livrée à l’école Boréale

Nouvelle classe portative livrée à l’école Boréale

Mardi 15 septembre, une classe portative a été livrée à l’école Boréale de Ponteix. Un équipement qui devrait apporter davantage de confort pour les élèves et les enseignants. 

24 septembre 2015/Auteur: Sébastien Németh (EV)/Nombre de vues (37147)/Commentaires (0)/

Enseignement portatif

À l’école Boréale de Ponteix, on n’aura plus besoin d’étudier ou de travailler dans la cuisine. Une nouvelle classe portative vient d’arriver. 

24 septembre 2015/Auteur: Sébastien Németh/Nombre de vues (29812)/Commentaires (0)/
Les demandes de services sont en hausse, mais pas les budgets

Les demandes de services sont en hausse, mais pas les budgets

Rencontre avec Frédérique Baudemont, directrice de l'Association des parents fransaskois

SASKATOON - Arrivée à la direction de l’Association des parents fransaskois (APF) au début du mois, Frédérique Baudemont nous donne les orientations de l’organisme en cette nouvelle année scolaire qui commence pour les élèves et les parents.

17 septembre 2015/Auteur: Alexandra Drame (EV)/Nombre de vues (26481)/Commentaires (0)/
AGE du CSF: trois heures d'échanges difficiles

AGE du CSF: trois heures d'échanges difficiles

Très attendue, l’Assemblée générale extraordinaire du Conseil scolaire fransaskois (CSF) n’a pas répondu aux attentes. La réunion provoquée par un groupe de parents d’élèves, devait évoquer les questions sensibles des finances et de l’abandon des recours en justice.

3 septembre 2015/Auteur: Jean-Pierre Picard (EV)/Nombre de vues (35721)/Commentaires (0)/
Une Fransaskoise à la tête de l'école Père Mercure

Une Fransaskoise à la tête de l'école Père Mercure

NORTH BATTLEFORD - Julie Lemire, ancienne enseignante, prend les rênes de l’école Père Mercure, à North Battleford.

3 septembre 2015/Auteur: Sébastien Németh (EV)/Nombre de vues (37022)/Commentaires (0)/
Luc Handfield, nouveau directeur adjoint de l’éducation au CÉF

Luc Handfield, nouveau directeur adjoint de l’éducation au CÉF

Un expert de l’éducation minoritaire rejoint le CEF

D’origine québécoise, Luc Handfield est le nouveau directeur adjoint de l’éducation au Conseil des écoles fransaskoises.
3 septembre 2015/Auteur: Sébastien Németh (EV)/Nombre de vues (35385)/Commentaires (0)/
Système anglo, franco ou immersion?

Système anglo, franco ou immersion?

Alors que des centaines de familles sont en pleine rentrée des classes depuis mardi dernier, des parents francophones et anglophones ont choisi d’inscrire leurs enfants dans l’autre système linguistique. Témoignages.

3 septembre 2015/Auteur: Sébastien Németh (EV)/Nombre de vues (34555)/Commentaires (0)/
Thérapie de couple

Thérapie de couple

Réflexion autour de l'AGE du Conseil scolaire fransaskois

 Difficile d’entamer une rentrée scolaire après une Assemblée générale extraordinaire demandée par des parents en colère et inquiets.
3 septembre 2015/Auteur: Sébastien Németh/Nombre de vues (30971)/Commentaires (0)/
Fréquentation toujours en hausse à l’école Valois

Fréquentation toujours en hausse à l’école Valois

PRINCE ALBERT - Comme toutes les écoles de Prince Albert, la cloche de l’école Valois a retenti pour la première fois depuis 2 mois.

3 septembre 2015/Auteur: Sandra Hassan Farah (EV)/Nombre de vues (31289)/Commentaires (0)/
La Cité universitaire francophone officiellement lancée

La Cité universitaire francophone officiellement lancée

REGINA - La Cité universitaire francophone (CUF) a été inaugurée le 1er septembre 2015 devant un parterre de personnalités issues de la communauté, du monde académique et politique. La nouvelle entité a pour mission de promouvoir l’enseignement en français.


2 septembre 2015/Auteur: Émilie Dessureault-Paquette (EV)/Nombre de vues (28700)/Commentaires (0)/
RSS
Première1415161719212223Dernière

 - samedi 22 juin 2024