Emmanuel Nahimana
Gestionnaire de projet au RIF de la Nouvelle-Écosse.
Photo : courtoisie
Si la construction identitaire est parfois fort complexe comme le souligne certains chercheurs parce qu’elle renvoie à la fois à ses propres valeurs et à celles de la société d’accueil, en revanche, elle crée souvent d’heureux mélanges.
Sandrine Hallion, professeure agrégée de linguistique française au Département d’études françaises de langues et littératures du Collège universitaire de Saint-Boniface à Winnipeg, qui s’est intéressée aux variations du français dans l’Ouest canadien, parle même de « variétés prestigieuses » par rapport aux différentes sources où s’abreuve le français au Manitoba.
Le président de la Fédération des communautés francophones et acadienne (FCFA) du Canada, Jean Johnson, dirait, lui, que le français apporté par les nouveaux Franco-Canadiens est « un véritable carburant » pour les communautés francophones en milieu minoritaire.
D’importantes influences
Depuis 30 ans, la baisse du français est constante selon Statistique Canada. L’organisme prévoit qu’en 2036, les francophones devraient passer de 23 à 21 % pour l’ensemble du Canada. Pour la même période, près de 14 millions de personnes devraient avoir ni le français ni l’anglais comme langue maternelle. Mais au-delà des chiffres, il y a aussi des gens qui ont choisi les communautés francophones pour s’épanouir.
Qu’est-ce qui fera qu’un immigrant francophone aura le goût de s’identifier à une minorité linguistique plutôt qu’à celle qui domine ? « L’accueil », répond sans ambages Emmanuel Nahimana, gestionnaire de projet au sein du Réseau immigration francophone (RIF) à Halifax, en Nouvelle-Écosse.
La grande séduction
Installé depuis une dizaine d’années au sein de la communauté acadienne néo-écossaise, il voulait un endroit pour sa famille où la conciliation travail-famille serait plus facile qu’au Québec. C’est ce qui l’a incité à déménager. En prime, son diplôme d’enseignant de français du Burundi ayant été rapidement reconnu, il a pu travailler dès le départ dans son domaine, ce qui n’avait pas été le cas au Québec. La communauté acadienne a fait le reste.
Emmanuel Nahimana est convaincu que l’immigration francophone est un atout. Elle participe au développement social et économique de sa communauté d’accueil. Selon lui, plus l’accompagnement sera excellent, « plus l’immigrant participera à cette vitalité du français. » De plus, il est convaincu que si les parents venus d’ailleurs envoient leurs enfants dans des écoles francophones, cela permettra que ceux-ci deviennent bilingues, ce qui leur sera un atout. « Au contraire, si les parents choisissent l’école anglaise, il y a un risque d’assimilation. »
Une francophonie changeante
Interrogé à la veille de la 12e Journée de réflexion sur l’immigration francophone tenue à Calgary le 21 mars dernier, Jean Johnson faisait part de l’importance accordée par son organisme à la présence des nouveaux arrivants au sein des différentes communautés francophones au Canada. « Vingt-six pour cent des francophones de la Colombie-Britannique sont issus de l’immigration. C’est 24 %, en Alberta. C’est clair que ça prend une ouverture de notre part. »
Cette présence des nouveaux francophones issus notamment de divers pays africains se reflète d’ailleurs dans la composition du personnel des différents organismes liés à la FCFA. Pour Jean Johnson, il est normal que ceux-ci soient à l’image de leur communauté. De plus, ces organismes ont « un rôle d’accompagnateurs pour diriger au bon endroit » les nouveaux venus notamment en matière de logement, d’école et de travail.