Skip Navigation
Mireille Maheu (Le Franco - Alberta)
/ Categories: Politique

La cause Caron déboutée en appel

En route vers la Cour suprême ?

Le 21 février 2014, la Cour d’appel de l’Alberta a rejeté l’appel de Gilles Caron, réitérant le verdict délivré en 2009 par la Cour du Banc de la Reine selon lequel l’Alberta n’est pas tenue d’adopter et de publier sa législation dans les deux langues officielles. La cause, aujourd’hui connue sous le nom de Cause Caron, est donc en route vers la Cour suprême du Canada. 

En conférence de presse, qui a suivi la publication du jugement, Gilles Caron a annoncé ce plus récent verdict d’un ton morose. « Je suis déçu, mais je ne suis pas vraiment surpris. L’Alberta est la seule province uniquement anglophone avec l’attitude pour soutenir ses politiques », indique celui qui se bat depuis près de 10 ans pour reconnaître le statut bilingue de l’Alberta, soit depuis qu’il a reçu, en 2003, une contravention qui était rédigée seulement en anglais.

S’il n’est pas non plus surpris du verdict, le professeur émérite en Sciences politiques du Campus Saint-Jean, Edmund Auger, qui avait agi à titre de témoin expert en première instance, avance une hypothèse un peu plus tempérée. « Ce n’est pas une bonne décision, mais je m’y attendais. Il me semble normal que, dans un cas comme la Cause Caron, un tribunal provincial préfère le statu quo », commence-t-il, ajoutant qu’il aurait plutôt été surpris d’un verdict positif. 

« D’abord, il s’agit d’une cause sans précédent, c’est-à-dire que le décret constitutionnel à la base de cette cause n’a jamais été étudié par les tribunaux, explique le professeur. Or, ceux-ci basent très souvent leurs décisions sur les précédents. Ce serait prendre un très gros risque pour un tribunal provincial que de prendre une décision d’une telle importance sans se baser sur un précédent. »

De plus, il rappelle que depuis le jugement rendu par le juge Leo Wenden de la Cour provinciale de l’Alberta en juillet 2007 et qui avait donné raison à Gilles Caron, d’autres preuves de l’enchâssement des droits linguistiques dans la constitution canadienne ont été mises en lumière. « Cependant, la Cour d’appel de l’Alberta n’est pas en mesure de considérer de nouvelles preuves, car son rôle est de réévaluer ce qui a été soumis lors du jugement porté en appel », souligne-t-il. 

Et finalement, il rappelle qu’en plus d’avoir la confiance, le courage et l’autorité nécessaires pour prendre ce genre de décision, les juristes de la Cour suprême du Canada ont plus d’expérience et de compétence que les tribunaux inférieurs. « La Cour suprême est donc, sans aucun doute, la cour la mieux équipée pour trancher sur une question d’une telle ampleur, qui aura un tel impact dans tout l’Ouest et le Nord canadien. »

D’ailleurs, l’avocat de Calgary, Me Gérard Lévesque, qui est très impliqué dans le domaine des droits linguistiques, insiste que « les décisions prises en Cour provinciale ont très souvent été renversées par la Cour suprême ». 

La stratégie

Pour l’avocat de Gilles Caron, Me Roger Lepage, continuer cette bataille juridique, même après une décennie, revêt toujours une importance capitale. « C’est prouvé que lorsque les institutions étatiques ne respectent pas la dualité linguistique, l’assimilation des enfants se fait beaucoup plus facilement et plus rapidement », tient-il à souligner. 

Il pense donc déjà à une stratégie qui lui permettrait de convaincre la plus haute Cour du pays d’entendre la Cause Caron. « On aura à être plus étroits. Nous insisterons sur les trois points qui méritent l’attention, soit les trois domaines du fondement constitutionnel du droit linguistique », annonce-t-il (Voir encadré).

L’équipe Cause Caron, qui est également composée de l’Association canadienne-française de l’Alberta (ACFA) et l’Assemblée communautaire fransaskoise (ACF), tentera aussi de mettre en évidence les erreurs commises par la Cour d’appel. « Une erreur flagrante commise en Cour d’appel, souligne au passage Me Lévesque, est que sur trois juges, deux ne pouvaient pas comprendre directement la plaidoirie, et avaient recours à des interprètes. Par contre, et je l’ai déjà dénoncé, Justice Alberta se préoccupe peu de la compétence des interprètes judiciaires. » 

Me Lepage a jusqu’en avril 2014 pour déposer une demande d’audience à la Cour suprême, et si cette demande est acceptée, le procès aura lieu dans la prochaine année.

« J’espère que le plus haut tribunal du pays acceptera de recevoir la cause, et pourra déterminer s’il existe une base constitutionnelle à mes droits linguistiques en Alberta, et dans tout le nord-ouest du pays », formule Gilles Caron. 

Se qualifiant d’éternel optimiste, le président de l’ACFA, Jean Johnson, est confiant que la Cour suprême acceptera d’entendre la Cause Caron. « En accordant aux procédures de M. Caron le financement public sous prétexte qu’il s’agissait d’une cause d’intérêt public, la Cour suprême s’est montrée ouverte », insiste-t-il, en rappelant que l’ACFA continuera de soutenir la Cause qui touche aux intérêts de la francophonie albertaine.

Par ailleurs, lorsqu’elle a statué sur le financement, la Cour suprême a déclaré qu’il s’agissait d’une cause d’une importance nationale. « Nous allons leur citer leur propre discours », promet Me Lepage. 

La Fédération des communautés francophones et acadienne (FCFA) se réjouit de l’intention des requérants de contester le jugement. En 2011, la FCFA avait adopté à l’unanimité une résolution d’appui à la cause Caron. « C’est une question fondamentale qui devrait être tranchée une fois pour toutes », souligne la présidente, Marie-France Kenny. « On parle ici de principes qui nous interpellent tous : les principes fondateurs de notre pays, la dualité linguistique et le respect des droits. »

Trois domaines du fondement constitutionnel du droit linguistique

 

• Deux adresses faites au gouvernement par la Reine au terme desquelles ont eu lieu l’annexion de la Terre de Rupert et du Territoire du Nord-Ouest; le Manitoba Act, selon lequel le Manitoba gouvernait l’ensemble des Territoires du Nord-Ouest dans le respect des droits linguistiques;

• Et la Proclamation royale, qui en Cour provinciale avait été déclarée document constitutionnel enchâssant des droits linguistiques, mais qui, à la Cour du Banc de la Reine, avait plutôt été qualifiée de « geste politique visant à désamorcer les conflits alimentés par l’annexion » sans qualité constitutionnelle.

Print
19388

Mireille Maheu (Le Franco - Alberta)Mireille Maheu (Le Franco - Alberta)

Other posts by Mireille Maheu (Le Franco - Alberta)
Contact author

Contact author

x
Académie Rivier : la fransaskoisie attend un signal du gouvernement

Académie Rivier : la fransaskoisie attend un signal du gouvernement

Le budget provincial ne fait aucune mention d’aides financières dans le projet de transformation de l’ancienne Académie Rivier de Prince Albert en un centre scolaire communautaire francophone. 

Monday, May 17, 2021/Author: Hélène Lequitte – IJL-Réseau.Presse/Number of views (14157)/Comments (0)/
Révéler nos racines avec un nouveau guide pédagogique

Révéler nos racines avec un nouveau guide pédagogique

Carmen Campagne vient garnir la collection « Atelier » du CCF destinée aux écoliers afin de leur faire découvrir les grands personnages de la culture fransaskoise.

Monday, April 26, 2021/Author: Estelle Bonetto/Number of views (13730)/Comments (0)/
Il y a urgence d’agir en éducation postsecondaire en français

Il y a urgence d’agir en éducation postsecondaire en français

Disparition de programmes à l’Université Laurentienne, compressions au Campus Saint-Jean et à l’Université de Moncton, budget à l’encre rouge à l’Université Sainte-Anne, réduction du financement à l’Université de Saint-Boniface : l’éducation postsecondaire en français en contexte minoritaire est en difficulté.

Wednesday, April 21, 2021/Author: Francopresse/Number of views (13848)/Comments (0)/
L’Afrique au programme de la Cité universitaire francophone de Regina

L’Afrique au programme de la Cité universitaire francophone de Regina

La Cité universitaire francophone de Regina proposera dès la rentrée prochaine une mineure bilingue en études africaines.

Wednesday, March 24, 2021/Author: Leslie Diaz/Number of views (14612)/Comments (0)/
Comment démarrer une garderie francophone en milieu familial ?

Comment démarrer une garderie francophone en milieu familial ?

Le CÉCS a offert le 6 mars un atelier virtuel sur le démarrage d’une garderie en milieu familial.

Monday, March 22, 2021/Author: Sarah Vennes-Ouellet/Number of views (12848)/Comments (0)/
Prince Albert: Le projet de l’école Rivier expliqué à la communauté

Prince Albert: Le projet de l’école Rivier expliqué à la communauté

Les détails du projet d’acquisition de l’Académie Rivier de Prince Albert ont été explicités au cours d’une session d’information.

Saturday, March 6, 2021/Author: Emmanuel Masson/Number of views (16456)/Comments (0)/
Le Mois de l'histoire des Noirs à l’honneur au CÉF

Le Mois de l'histoire des Noirs à l’honneur au CÉF

Nos directrices et directeurs d’écoles témoignent

À l'occasion du Mois de l'histoire des Noirs nous vous offrons trois témoignages de trois directions d'écoles fransaskoises.

Tuesday, February 23, 2021/Author: Conseil des écoles fransaskoises/Number of views (10873)/Comments (0)/
La communauté réaffirme son soutien au projet de Prince Albert

La communauté réaffirme son soutien au projet de Prince Albert

Le ministre de l’Éducation a rencontré les présidences d’organismes fransaskois afin de discuter du projet de nouvelle école francophone à Prince Albert.

Thursday, February 4, 2021/Author: Emmanuel Masson/Number of views (12557)/Comments (0)/
Éducation en français sous respirateur artificiel

Éducation en français sous respirateur artificiel

Ça va mal dans le monde de l’éducation universitaire en français en Ontario

Wednesday, February 3, 2021/Author: Réjean Grenier/Number of views (12273)/Comments (0)/
La notation humanitaire, un « soulagement » pour la population étudiante

La notation humanitaire, un « soulagement » pour la population étudiante

Des universités canadiennes ont adopté un système de notation où les étudiants peuvent désormais choisir la mention « réussite » ou « échec »

Wednesday, February 3, 2021/Author: Francopresse/Number of views (11982)/Comments (0)/
École en pandémie : manque de ressources pour aider les élèves

École en pandémie : manque de ressources pour aider les élèves

Manque de ressources dans les écoles pour aider les élèves à gérer leurs émotions en pandémie

Friday, January 29, 2021/Author: Ericka Muzzo – Francopresse /Number of views (12752)/Comments (0)/
Louis Prince, jeune champion du français et du bilinguisme

Louis Prince, jeune champion du français et du bilinguisme

Portrait d'un jeune leader bilingue

Louis Prince, élève de 11e année à l’École canadienne-française de Saskatoon, est un des huit jeunes leaders du Français pour l’avenir.

Tuesday, January 26, 2021/Author: Emmanuel Masson/Number of views (14026)/Comments (0)/
Le répertoire FRÉSK se met à la page du numérique

Le répertoire FRÉSK se met à la page du numérique

Depuis le 6 janvier, FRÉSK, le répertoire de ressources éducatives en français pour la Saskatchewan, a délaisser la version papier du catalogue au profit d’un site web.

Monday, January 25, 2021/Author: Lucas Pilleri/Number of views (11172)/Comments (0)/
Étudier en pandémie : les étudiants de La Cité se confient

Étudier en pandémie : les étudiants de La Cité se confient

Le début du semestre d’hiver est l’occasion de revenir sur l'expérience étudiante inédite à la Cité universitaire francophone de Regina depuis le début de la pandémie.

Sunday, January 24, 2021/Author: Emmanuel Masson/Number of views (16007)/Comments (0)/
Une fenêtre s’ouvre entre les ainés et l’école Boréale à Ponteix

Une fenêtre s’ouvre entre les ainés et l’école Boréale à Ponteix

L’école Boréale a ainsi pu donner un nouveau souffle à sa collaboration communautaire avec le Foyer Saint-Joseph de Ponteix :

 

Thursday, January 21, 2021/Author: Conseil des écoles fransaskoises/Number of views (15427)/Comments (0)/
RSS
123578910Last

 - Thursday 23 May 2024