Le commissaire aux langues officielles a fait faire de l’exercice à bien des sourcils en demandant au Québec d’offrir plus de services à sa minorité anglophone. Monsieur Graham Fraser voudrait que le gouvernement de cette province mette sur pied un bureau des affaires anglophones, comme on en retrouve dans les autres provinces pour appuyer les minorités francophones, à l’instar de la Direction des affaires francophones en Saskatchewan.
À prime abord, il y a de quoi s’étonner. Est-ce que les Anglo-québécois ont vraiment besoin d’être protégés? Ils ont huit collèges un peu partout dans la province, trois université, des hôpitaux, sans parler de nombreuses stations de télévision et de radio, des journaux... Bref, la communauté anglo québécoise n’est vraiment pas menacée.
Selon les statistiques, près de 14% des Québécois ont l’anglais comme langue d’usage (ce pourcentage est de 25% dans la région de Montréal). Évidemment, il y a des endroits au Québec où les services en anglais peuvent être plus difficiles à obtenir. Dans certaines régions, comme Lanaudière, la Mauricie, le Saguenay ou la Côte Nord, les anglophones représentent à peine 1% de la population et l’obtention de services en anglais peut représenter certains défis. Mais doit-on, comme le demande monsieur Fraser, aller jusqu’à mettre sur pied une structure dont le but premier est d’aider les minorités de langues officielles à avoir l’oreille attentive du gouvernement provincial afin d’obtenir des services et de faire respecter leurs droits? Les Anglo-québécois éprouvent-ils vraiment des difficultés à ce chapitre?
Les doléances de la communauté anglo-québécoise, que l’on retrouve dans le rapport 2013-14 du commissaire, sont d’un tout autre ordre de grandeur que celles des minorités francophones. On y découvre les préoccupations exprimées par l’industrie anglophone de la télévision et du cinéma qui s’inquiète d’avoir sa juste part de financement. Les autres préoccupations exprimées sont liées aux mesures d’austérité du gouvernement Couillard qui veut regrouper les structures de gestion des hôpitaux, ce qui diminuerait l’autonomie des institutions anglophones.
Ce sont des difficultés que l’on aimerait bien avoir en milieu francophone minoritaire... En attendant, la demande du commissaire risque tout simplement d’aviver les tensions linguistiques au pays. Plusieurs médias, tant anglophones que francophones, ont rapporté que le commissaire demande au gouvernement québécois d’en faire plus pour sa minorité. Sur le site de CBC (le pendant anglais de Radio-Canada) on peut lire : « Quebec government not doing enough for anglophones ». Cela ne vas pas nous aider à obtenir des services en français dans l’Ouest si on se met à véhiculer le message que les anglophones du Québec sont maltraités!
Monsieur Fraser aurait intérêt à ne pas tomber dans le « deux poids, deux mesures » en matière de droits linguistiques. Avant de lancer le message qu’il faut venir en aide aux anglophones minoritaires, il devrait d’abord consacrer ses ressources à s’assurer que les minorités francophones reçoivent un traitement équitable et l’aide dont ils ont besoin.