Skip Navigation
Festival Cinergie 2024

Une veste métisse restituée à la Saskatchewan

Veste métisse
La veste est représentative de la technique des fleurs perlées du peuple métis.
Crédits : George Gingras – Institut Gabriel Dumont

Après plus d’un siècle d’absence, une veste perlée métisse d’une valeur inestimable a fait son retour en Saskatchewan. L’habit traditionnel, longtemps la propriété d’une famille québécoise, a été rapatrié à l’Institut Gabriel Dumont, à Saskatoon. Retour sur l’histoire de cette veste qui s’entremêle à celle des pionniers et du peuple métis.

Pour comprendre comment une veste métisse de plus de 125 ans s’est retrouvée pendant 50 ans dans les mains d’André Ruest, un homme de Rimouski, au nord de Québec, il faut se pencher sur l’histoire des pionniers de l’Ouest. 

En 1895, Paul et Émile Ruest quittent la demeure familiale à Lewiston, dans le Maine, pour aller s’établir en Saskatchewan. Ils avaient tous les deux obtenu une terre à environ 50 km de Harris, un village alors important pour les colons de la région.

Les deux frères construisent leur homestead et pratiquent l’élevage. Les deux francophones changent leur nom de famille pour King, puisque « Ruest » se prononce un peu comme « Roy » en anglais.

Tous les deux ou trois mois, Paul et Émile se rendent dans le village de Harris pour faire des commissions. Au cours de l’un de ces arrêts, Émile achète une veste perlée des mains d’un marchand autochtone pour 50 dollars, ce qui équivaudrait aujourd’hui à plus de 1 000 dollars. 

Paul et Émile King connaissent une mort tragique, une maladie grave les atteignant fatalement alors qu’ils sont encore jeunes. Puisqu’ils sont restés célibataires et sans descendance, la veste revient à leur frère, Désiré Ruest, qui s’était établi dans la vallée de la Matapédia, au Québec. Après une longue vie, Désiré laisse la veste à son tour à son fils André Ruest.

Confier l’œuvre

Veste métisse 2
André Ruest a hérité de la veste métisse de son père, qui lui-même l’avait obtenue après la mort de ses frères il y a plus d’un siècle.
Crédits : George Gingras – Institut Gabriel Dumont

André Ruest habite à Rimouski depuis l’âge de 20 ans. Il a travaillé comme vendeur-voyageur de pièces pour un garage, ce qui lui a permis d’explorer toute l’Amérique du Nord. Il est notamment passé plusieurs fois par la Saskatchewan où il a pu apprécier la terre d’accueil de ses oncles. 

Aujourd’hui, à 82 ans et sans enfant, André Ruest se soucie de la pérennité de la veste dont il a hérité. Lors d’une visite dans une exposition, une femme lui a dit que la vente de la veste sur internet pourrait lui rapporter environ 3 000 ou 4 000 dollars. Mais André Ruest n’est pas intéressé par de possibles gains et a préféré confier l’objet à une institution qui saurait la mettre en valeur. 

« Pour moi, il fallait trouver une place où la veste serait entre de bonnes mains », souligne André Ruest. L’homme de Rimouski a contacté des musées à Québec ainsi que la Première Nation des Hurons-Wendats de Wendake. Malheureusement, ces derniers manquaient de connaissance sur la culture autochtone de l’Ouest pour pouvoir la mettre en valeur convenablement. 

André Ruest s’est alors tourné vers des connaisseurs dans les Prairies. C’est l’Assemblée communautaire fransaskoise (ACF) qui l’a mis en relation avec l’Institut Gabriel Dumont, le centre de formation et de recherche de la Nation métisse de la Saskatchewan. Dès la réception des photographies de la veste, les experts du centre de recherche ont pu confirmer l’origine métisse de l’artefact. 

L’histoire d’un art traditionnel

Pour Darren Préfontaine, recherchiste et éditeur à l’Institut Gabriel Dumont, les motifs de fleurs dessinées avec des perles de verre ne laissaient aucun doute sur l’origine de la veste, les Métis étant connus comme le « peuple des fleurs de perle ». 

Le lieu d’achat de la veste correspond aussi. « Beaucoup de Métis étaient présents dans la région du nord-est des Prairies saskatchewanaises dans les années suivant la rébellion du Nord-Ouest », explique le recherchiste.

Darren Préfontaine précise que ce genre de vestes perlées était fait par les femmes métisses avec les perles importées d’Europe. L’Institut Gabriel Dumont souhaite entreprendre des recherches plus poussées pour retracer toute l’histoire de la veste, espérant notamment trouver le lieu d’origine exact des perles. En outre, après le confinement, un expert en artefacts métis fera un tour dans la région de Harris pour tenter de découvrir qui a cousu l’œuvre d’art. 

La coutume autochtone du perlage a commencé au 18e siècle à Saint-Boniface, au Manitoba, où des religieuses canadiennes-françaises ont enseigné ces techniques à la jeunesse métisse. Avant l’arrivée des perles, les peuples autochtones faisaient surtout de l’art ornemental avec des piquants de porc-épic. 

Un artefact rarissime

Quoique d’origine métisse, les motifs de fleurs perlées ont fini par être copiés par des artistes des Premières Nations. Cette convergence des styles fait que plusieurs artefacts métis sont interprétés comment étant d’origine crie, ojibwée ou même canadienne-française.

Darren Préfontaine explique qu’un objet de la sorte a une valeur inestimable. « L’Institut Gabriel Dumont est honoré de pouvoir rapatrier la veste au nom de la nation métisse », souligne-t-il. En effet, il existe selon lui très peu de vêtements perlés métis intacts d’époque au Canada, et ces derniers sont généralement exposés dans les grands musées provinciaux ou nationaux. 

« C’est un des plus beaux spécimens que j’ai vus », ajoute le recherchiste et éditeur. Cette veste aura donc une place prédominante dans le musée de l’Institut Gabriel Dumont à sa réouverture après la pandémie.

Un acte de réconciliation

André Ruest, quant à lui, espère un jour retourner en Saskatchewan pour le plaisir. Il compte bien visiter le musée de l’Institut Gabriel Dumont et le village de Harris pour suivre la trace de ses oncles. Sauf un reçu pour les impôts, André Ruest n’a pas accepté de contrepartie financière pour la veste. « Elle est rendue chez vous, c’est ce que je voulais, précise-t-il. Mon désir est complet. » 

Pour l’homme de Rimouski, le rapatriement de la veste métisse en Saskatchewan représente « le rapprochement entre les Canadiens et les Métis ». Darren Préfontaine remercie le donateur pour son cadeau très généreux, indiquant que ce dernier fait partie d’une « belle histoire de restitution du patrimoine métis ». 

Imprimer
9042

Emmanuel MassonEmmanuel Masson

Autres messages par Emmanuel Masson
Contacter l'auteur

Contacter l'auteur

x
Le téléenseignement, une forme de théâtre expérientiel pour Colette George

Le téléenseignement, une forme de théâtre expérientiel pour Colette George

Je me sens un peu plus animée durant mes leçons virtuelles. C'est comme si j'étais une comédienne dans une pièce de théâtre.

14 mai 2020/Auteur: Webmestre/Nombre de vues (20401)/Commentaires (0)/
Le téléenseignement, une expérience formatrice

Le téléenseignement, une expérience formatrice

J'ai eu le bonheur de vivre l'expérience de l'enseignement à distance il y a une douzaine d'années dans un autre contexte et cette expérience continue d'influencer l'utilisation que je fais de la technologie dans l'enseignement des mathématiques en salle de classe depuis ce temps.

1 mai 2020/Auteur: Webmestre/Nombre de vues (21179)/Commentaires (0)/
Les jeunes de l’école Père Mercure au fait de l’actualité sanitaire

Les jeunes de l’école Père Mercure au fait de l’actualité sanitaire

J’ai proposé à mes élèves un défi, non obligatoire : faire une capsule vidéo pour la salle de classe au sujet de la COVID-19. J’ai reçu 10 vidéos sur 13 élèves !

30 avril 2020/Auteur: Conseil des écoles fransaskoises/Nombre de vues (25102)/Commentaires (0)/
Pénurie de juristes bilingues : la solution du côté de l’immersion ?

Pénurie de juristes bilingues : la solution du côté de l’immersion ?

Le manque de juges, avocats, procureurs et greffiers bilingues en milieu minoritaire est une réalité de longue date. Mais l’immersion, de plus en plus populaire au pays, pourrait constituer une piste de solution.

14 avril 2020/Auteur: Lucas Pilleri – Initiative de journalisme local – APF /Nombre de vues (26505)/Commentaires (0)/
Les nouvelles écoles fransaskoises absentes du budget provincial

Les nouvelles écoles fransaskoises absentes du budget provincial

La construction de nouvelles écoles fransaskoises devra attendre

Dans son plan de dépenses de plus de 14 milliards de dollars, rien n’est prévu pour la construction des nouvelles écoles tant attendues par les Fransaskois.

9 avril 2020/Auteur: Lucas Pilleri – Initiative de journalisme local – APF /Nombre de vues (22742)/Commentaires (0)/
Le CÉF adopte le télétravail et le télé-enseignement

Le CÉF adopte le télétravail et le télé-enseignement

Depuis le 20 mars, les écoles fransaskoises sont fermées en raison de la pandémie de la COVID-19. Le personnel du CÉF opte désormais pour le télétravail et le télé-enseignement.

3 avril 2020/Auteur: Conseil des écoles fransaskoises/Nombre de vues (23670)/Commentaires (0)/
École à distance : Les élèves du CÉF ont hâte de se brancher

École à distance : Les élèves du CÉF ont hâte de se brancher

Les élèves du Conseil des écoles fransaskoises pourront suivre leurs cours en ligne dès le 6 avril.

3 avril 2020/Auteur: Sébastien Durand – Initiative de journalisme local – APF /Nombre de vues (25449)/Commentaires (0)/
Le CÉF lance une application pour téléphone intelligent

Le CÉF lance une application pour téléphone intelligent

Le CÉF a dévoilé, le 12 mars 2020 une a,pplication pour téléphone intelligent qui permettra aux familles et aux élèves d'avoir accès en tout temps à l'information dont elles ont besoin.

19 mars 2020/Auteur: Conseil des écoles fransaskoises/Nombre de vues (22687)/Commentaires (0)/
« Maman, je garde les enfants ! »

« Maman, je garde les enfants ! »

L’Association des parents fransaskois (APF) a offert un atelier sur la garde d’enfants en proposant aux jeunes âgés de 11 à 15 ans la formation Gardiens avertis à Saskatoon le 15 février, à Regina le 22 et à Prince Albert le 29.

12 mars 2020/Auteur: Leslie Garrido Diaz – Initiative de journalisme local – APF/Nombre de vues (20198)/Commentaires (0)/
Le Collège Mathieu formera la relève journalistique dès l’automne

Le Collège Mathieu formera la relève journalistique dès l’automne

Les inscriptions pour le programme de journalisme en français du Collège Mathieu sont finalement ouvertes. 

29 février 2020/Auteur: Lucas Pilleri – Initiative de journalisme local - APF/Nombre de vues (27495)/Commentaires (0)/
Un nouvel examen de certification pour les infirmières

Un nouvel examen de certification pour les infirmières

Plusieurs intervenants francophones espèrent qu’un nouvel examen devienne une alternative à l’examen d’agrément national pour les infirmières qui est, depuis 2015, le seul examen obligatoire pour être certifié infirmière au Canada, exception faite du Québec et du Yukon, mais dont la traduction fait l’objet de critiques.

28 janvier 2020/Auteur: Marc Poirier (Francopresse)/Nombre de vues (23358)/Commentaires (0)/
La bienveillance à l’honneur à l’école Ducharme

La bienveillance à l’honneur à l’école Ducharme

Les 80 élèves de l’école Ducharme de Moose Jaw ont fait preuve de bienveillance au cours des mois de novembre et décembre 2019.

27 janvier 2020/Auteur: Conseil des écoles fransaskoises/Nombre de vues (20681)/Commentaires (0)/
La réussite des enfants au coeur du congrès des parents fransaskois

La réussite des enfants au coeur du congrès des parents fransaskois

SASKATOON - L’Association des parents fransaskois (APF) a tenu son symposium le 26 octobre autour du thème « Être parent en 2019 ».  L’événement a rassemblé 128 participants.

1 décembre 2019/Auteur: Marie-Lou Bernatchez/Nombre de vues (24715)/Commentaires (0)/
Les élèves fransaskois honorent la mémoire des anciens combattants

Les élèves fransaskois honorent la mémoire des anciens combattants

Survol des activités organisées par les écoles fransaskoises pour souligner le jour du Souvenir.

29 novembre 2019/Auteur: Conseil des écoles fransaskoises/Nombre de vues (25940)/Commentaires (0)/
Le Collège Mathieu surfe sur la vague du numérique

Le Collège Mathieu surfe sur la vague du numérique

Regina a accueilli le congrès du Réseau des cégeps et des collèges francophones du Canada

REGINA - Le Collège Mathieu était l'hôte du congrès annuel du Réseau des cégeps et des collèges francophones du Canada les 6 et 7 novembre 2019. Le thème de cette année : « Le numérique, un dénominateur commun. »

28 novembre 2019/Auteur: Marie-Lou Bernatchez/Nombre de vues (26687)/Commentaires (0)/
RSS
Première34568101112Dernière

 - mercredi 1 mai 2024