Écoles résidentielles: Comment aller de vérité à réconciliation ?
Un groupe d’enfants autochtones dans une école résidentielle à Trout Lake (Ontario), vers 1930.
Photo :Archives nationales du Canada : Affaires indiennes et du Nord
Après avoir publié son rapport, la Commission de vérité et réconciliation (CVR) prépare l’avenir avec l’ouverture du Centre national pour la vérité et la réconciliation (CNVR) à l’Université du Manitoba. Quelques 7 000 témoignages vidéo des survivants y seront stockés et publiés sur le Web. Un poste clé a été pourvu.
Le mandat est incontournable, selon le professeur Gérald Fallon de la Faculté d’éducation de l’Université de la Colombie-Britannique (UBC). « On a eu un bon moment en 2008 quand le premier ministre a fait des excuses officielles aux survivants des écoles résidentielles. Mais qu’est-ce qu’on a fait de concret par la suite ?
« La partie symbolique est faite, lance-t-il, mais il va falloir traduire tout ça en pratiques. On n’a pas tellement de choix (comme société), on ne peut pas traîner la question autochtone pour l’éternité.
« Je ne sais pas quelle sorte de ressources aura l’Université du Manitoba pour que ça marche, ajoute Gérald Fallon. Il va falloir qu’il y ait plein d’alliances entre les autochtones et les non-autochtones. »
Outre UBC, les partenaires initiaux sont les universités de Saint-Boniface, Winnipeg et Lakehead (Thunder Bay), le Musée canadien des droits de la personne ainsi qu’un nombre d’organisations autochtones nationales. Le Centre a été créé en 2013 « afin de préserver le souvenir du régime des pensionnats indiens et son héritage, non seulement pour quelques années mais pour toujours ».
Pendant 120 ans, les écoles résidentielles ont permis d’arracher 150 000 enfants de leur famille et de les entasser dans des pensionnats pour effacer leur identité. Après six ans de travaux, un premier rapport de la CVR a été publié le 2 juin sur ce qu’elle a qualifié de « génocide culturel ».
La réaction de la population dans les journaux a été minime, note le professeur Fallon. « Tout le monde est d’accord pour faire quelque chose. Mais quand il sera question de la distribution de ressources socio-économiques, on verra. Les fonds proviendront des communautés non-autochtones. » Il estime à huit ou neuf milliards la note pour le renouvellement national du curriculum et de la gouvernance en éducation autochtone.
Au début juillet, le Centre annonçait la nomination de l’avocate et Métisse franco-manitobaine Aimée Craft au poste de directrice de recherche. « Mon rôle sera d’appuyer et d’encourager la recherche sur les pensionnats indiens, entamée par des chercheurs, des communautés autochtones et des individus », a-t-elle déclaré à La Liberté.
« J’encouragerai aussi la publication des recherches, toujours dans l’esprit de la Commission, qui est d’accueillir la vérité des faits, mais aussi d’encourager la réconciliation. C’est un élément essentiel, puisque la seule vérité ne mène pas nécessairement ou forcément à la réconciliation. » La professeure et auteure a été présidente de la Section du droit des autochtones de l’Association du Barreau canadien.
Dans le Centre et sur le site, explique le directeur Ry Moran, on trouvera « une large collection de documents, de l’histoire orale et d’autres dossiers qui présentent en détail la tentative systématique d’assimiler les peuple autochtones. Cette histoire est difficile, mais c’est l’histoire du Canada que nous devons tous connaître. Mais également imbriqués dans ces documents on trouve des témoignages dotés de puissance et de résilience. »
Gérald Fallon se dit relativement optimiste quant aux changements à venir. « On verra quelle sera la volonté politique aux élections d’octobre. Les chefs Justin Trudeau et Thomas Mulcair se sont engagés, mais ont-ils lu les 94 recommandations ? Stephen Harper n’a pas réagi. On s’attend maintenant à ce que les partis proposent des plans clairs et précis. »
Le CNVR offrira ses services et sa documentation dans les deux langues officielles. L’inauguration officielle est prévue pour l’automne.
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