Un prêtre face à un Amour défendu
Fernand Dorais, Le recueil de Dorais, vol. II
Trois contes d’androgynie suivi du Conte d’amour, textes choisis par Gaston Tremblay et présentés par Sheila Lacourcière, Sudbury, Éditions Prise de parole, 2014, 392 pages, 28,95 $.
Animateur social à Sudbury et professeur engagé à l’Université Laurentienne de 1969 à 1993, le jésuite Fernand Dorais est décédé en 2003. Une trentaine de ses essais ont été réunis dans le premier volume du Recueil de Dorais (2011). Ses ouvrages de création constituent Le recueil de Dorais, vol. II, à savoir Trois contes d’androgynie et Conte d’amour. Ces textes, choisis par Gaston Tremblay et présentés par Sheila Lacourcière, ne sont pas destinés à des lecteurs frileux.
Fernand Dorais recourt souvent à une citation de Térence : « Je suis homme et rien de ce qui est humain ne doit me rester étranger. » Selon Gaston Tremblay, « cela signifiait que le prêtre qu’il était devait accepter son homosexualité, dans sa vie et dans son œuvre ». Des actes d’amour sont décrits en détails dans ces contes et la raison derrière cela, selon Tremblay, réside dans la conversion de Dorais à sa réalité : « La nommer et la mettre en scène comme pour mieux l’accepter. »
Tremblay va plus loin. Si Dorais fait errer les lecteurs « dans les abîmes sexuels de sa descente aux enfers », c’est que l’ultime résurrection qui s’ensuit devient « une quête spirituelle ». Le jésuite n’est pas sans savoir que « d’aucuns y verront vulgaires délectations ». Au tout début des Trois contes d’androgynie, il prévient que si on les lit « en biais pornographiques ou scatologiques », on n’y entendra rien.
Sheila Lacourcière relève dans Trois contes d’amour que, pour Dorais, « vivre me fut agonie / depuis l’aube jusqu’au soir ». Selon elle, il est évident que tout le processus de création littéraire de Dorais repose sur ce mal de vivre : « c’est du fond de son enfer que Fernand Dorais prend la parole pour écrire ces contes ».
À travers ces contes, un prêtre-écrivain se demande comment Dieu a pu le créer homosexuel alors que cet état est inacceptable aux yeux de l’Église. Pourquoi Dieu l’a-t-il ainsi voué à une vie où la poursuite de l’Amour lui est défendue? Cela ne l’empêche pas de mener sa quête mystique qui devient tantôt imploration, revendication, dialogue amoureux, harangue, fantasme ou révolte. Ce « parcours est semé de représentations de la sexualité entre hommes, décrites sans ménagement, en des termes parfois très crus », pour reprendre les mots de l’éditeur.
Ce livre mérite trois étoiles sur cinq.
Fernand Dorais, Le recueil de Dorais, vol. II – Trois contes d’androgynie suivi du Conte d’amour, textes choisis par Gaston Tremblay et présentés par Sheila Lacourcière, Sudbury, Éditions Prise de parole, 2014, 392 pages, 28,95 $.
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