J'avais peur de vous raconter cette histoire. Mais j'ose, oui j'ose parce que ça me hante.
Voilà quelques années, quand Denis Simard était encore Directeur de l'Assemblée communautaire fransaskoise, j'ai essayé de faire entendre une perspective de jeune lors de leur AGA. J'ai payé de ma poche d'étudiante un billet aller-retour en autobus entre Saskatoon-Regina. Tout ça pour aller parler devant les député.e.s de l'ACF.
J'avais annoncée sur Facebook que je m'y rendais, je ne savais pas à quoi m'attendre. J'espérais qu'on me donne la chance de parler. Sitôt arrivée, Denis Simard informe- je crois que c'était Françoise (la présidente)- que je n'avais pas le droit de parole parce que je ne m'étais pas insérée dans l'agenda de la réunion.
J'étais complètement bouleversée. Dans toutes mes expériences dans le secteur associatif (plus de 10 ans) je n'avais jamais vu quelque chose de pareil. Je me demandais, va-t-on vraiment m'empêcher de parler??? Va-t-on vraiment empêcher la seule jeune à l'AGA de prendre la parole? Même au varia??
J'ai eu l'impression qu'on essayait de m'empêcher de parler, j'ai eu peur, je me suis sentie intimidée par Denis, qui semblait mener cette motion pour m'exclure. C'est à ce moment où Françoise m'a dirigée vers la table des élu.e.s. Elle s'est assise à côté de moi et me tenait l'épaule pour me rassurer que j'avais bel et bien le droit de parler.
J'étais tellement troublée par le comportement de Denis que je me suis mise à pleurer devant l'assemblée en essayant de formuler mes idées. J'ai dit à l'assemblée que la jeunesse voulait s'impliquer, mais qu'on devait lui donner une place (vu la situation dans laquelle je me trouvais, c'était évident qu'il-y-avait encore beaucoup de chemin à faire). On devait aller recruter les jeunes, valoriser leur voix. Je pense à Michel Dubé par exemple ou Wilfrid Denis qui donnent envie aux jeunes de s'impliquer par l'exemple et par leur écoute attentive.
Si vous me connaissez, vous savez que je suis quelqu'un qui n'a pas peur de parler et de partager ses opinions. C'est la seule fois dans ma vie où on m'a tellement intimidée publiquement que j'avais peur de m'exprimer. Je vous raconte mon histoire, mais il-y-a des gens qui ont peur de raconter les leurs. Et puis, étrangement, plusieurs femmes qui ont travaillé avec Denis. J'ose parler d'intimidation et de peur parce que trop souvent dans notre communauté on garde nos histoires pour nous et ça propage des situations nocives pour certains individus et pour le collectif. Vous ne me verrez pas dans des situations sociales où se tiendront des intimidateurs. Je n'ai jamais connu des intimidateurs chroniques qui changent du jour au lendemain.
Zoé Fortier
Saskatoon