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Les néo-démocrates montrent la sortie à Thomas Mulcair

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Balises

EDMONTON _ Le verdict, impitoyable, est tombé le dimanche 10 avril: les membres du Nouveau Parti démocratique (NPD) ont poussé leur chef Thomas Mulcair vers la sortie.

Un lourd silence s'est abattu sur la salle du centre des congrès d'Edmonton où s'étaient réunis quelque 1800 délégués lorsque les résultats du vote de confiance ont été dévoilés.

Pas moins de 52 pour cent des militants ont demandé une course à la direction. Une majorité simple était requise pour que le NPD soit tenu d'organiser une telle course.

Avec un appui de seulement 48 pour cent, Thomas Mulcair est arrivé bien loin du seuil minimal de 70 pour cent qui avait été si souvent évoqué au cours des dernières semaines.

Il s'agit d'une gifle cuisante pour le chef sortant, qui est devenu le premier chef néo-démocrate à être éjecté par un parti pourtant réputé indulgent avec ses leaders.

M. Mulcair a précisé dimanche qu'il resterait à la tête du NPD en attendant le choix de son successeur. La formation aura jusqu'à deux ans pour sélectionner un nouveau dirigeant.

Le chef défait a lancé un appel à l'unité lorsqu'il est remonté sur la scène, acceptant la décision de ses membres avec dignité.

"Je l'ai dit au début du week-end, et ça demeure vrai maintenant: la seule chose qui est importante, c'est qu'on sorte d'ici unis", a-t-il laissé tomber, entouré des députés de son caucus.

Le directeur national du NPD, Karl Bélanger, a indiqué dans une déclaration écrite que "le désir de changement et de renouveau des membres a été entendu".

Le conseil fédéral du parti devait se réunir dimanche après-midi afin de déterminer les prochaines étapes à suivre en vue d'une course à la chefferie.

"Au nom de toute l'équipe du NPD, et au nom de tous les Canadiens, nous tenons à remercier Tom Mulcair pour son travail acharné", a écrit M. Bélanger dans le même communiqué.

Dans les couloirs du centre des congrès, le leader du parti en chambre, Peter Julian, s'est dit "surpris" et "attristé" par l'ampleur du désaveu.

"Tom a fait un travail extraordinaire à la Chambre des communes. Stephen Harper serait toujours premier ministre si Tom n'avait pas fait ce travail", a-t-il lâché.

Plusieurs membres de la députation québécoise ont été sonnés par le dénouement du vote; certains ont versé des larmes en quittant la grande salle du centre des congrès.

Lui aussi étonné par le faible score récolté par Thomas Mulcair, le député Matthew Dubé a rejeté l'idée que cela témoigne d'une division chez les néo-démocrates.

Philosophe, il a soutenu que la course à la direction permettrait un brassage d'idées qui aidera justement le parti à se renouveler.

"La beauté de la course, c'est que ça va nous permettre de continuer (de débattre) et décider dans quelle direction on veut aller pour l'avenir", a soumis M. Dubé.

Avant l'annonce des résultats, le chef sortant y était allé d'un dernier plaidoyer auprès de ses troupes.

"Mes collègues néo-démocrates, des millions de Canadiens nous regardent. Ils comptent sur nous pour mener la bataille pour eux (...) Nous ne pouvons les laisser tomber", a-t-il fait valoir.

"Si vous continuez à vous tenir debout à mes côtés, alors ensemble, nous ne cesserons jamais de nous battre, a poursuivi M. Mulcair. Alors tenez-vous debout avec moi!"

Visiblement nerveux, il avait mis du temps à prendre ses aises sur scène, semblant éprouver de la difficulté à contenir son émotion au début de son allocution.

Le député d'Outremont a assuré que malgré la dégelée électorale subie par ses troupes aux dernières élections, il y a six mois, le parti demeurait une force politique considérable, notamment au Québec.

"Plus d'un million de Québécois considèrent toujours les valeurs néo-démocrates comme leurs valeurs, et nos 16 députés de partout au Québec sont là pour en témoigner", a exposé M. Mulcair.

"Bien sûr, nos attentes étaient plus élevées, mais nous restons malgré tout une force politique redoutable au Québec", a-t-il enchaîné.

Des membres du caucus néo-démocrate ont dit avoir apprécié le discours du chef sortant, qui reconnaissait lui-même que cet événement représentait un moment charnière de sa carrière politique.

"Il a parlé aussi avec émotion (...) Moi, je suis contente, parce que je sais que Tom est cet homme de coeur aussi", a analysé la députée Brigitte Sansoucy.

Mais pour d'autres, le leader sortant n'avait pas livré la marchandise.

"Il a démontré beaucoup de passion, mais à mon sens, il failli à la tâche de vraiment élaborer une vision positive de l'avenir du pays, l'avenir du parti", a exposé un délégué montréalais, Franklin Gertler.

Le militant a en outre reproché au chef sortant d'avoir voulu "ménager la chèvre et le chou" en éludant, dans son allocution, "l'un des grands enjeux du congrès" : le manifeste "Un bond vers l'avant", qui prône un délaissement des énergies fossiles.

La résolution de débattre des principes du texte, qui divise les néo-démocrates de l'Alberta de ceux du reste du pays, a été adoptée dimanche au congrès, au grand bonheur, notamment, de l'ex-députée Megan Leslie, qui est perçue par certains observateurs comme un successeur potentiel à M. Mulcair.

Ce manifeste a suscité la grogne au sein de la délégation albertaine, qui était composée d'au moins 350 membres sur les quelque 1800 inscrits au congrès d'Edmonton. La première ministre néo-démocrate de l'Alberta, Rachel Notley, ne s'était d'ailleurs pas privée de le critiquer dans un discours livré samedi.

Elle avait prévenu devant les congressistes qu'il valait mieux faire preuve de pragmatisme face aux projets d'infrastructures énergétiques et plaidé que les manifestes ne passent pas toujours le test de la réalité _ dans ce cas-ci, la chute vertigineuse du prix du pétrole, qui a heurté l'Alberta de plein fouet.

Les candidats à la succession de Thomas Mulcair pourraient donc se retrouver avec cet épineux dossier à gérer.

Mais on n'en est pas encore là, a insisté le député ontarien Charlie Angus.

"Ce qui ressort véritablement du congrès, c'est que notre parti veut aller de l'avant et qu'il a le désir d'être très impliqué dans le paysage politique canadien", a-t-il plaidé.