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Alors que Google France vient de signer un accord historique avec la presse française, ses pairs canadiens aspirent eux aussi à obtenir leur part du gâteau numérique.
Jusqu’ici, Google se servait du contenu des journaux pour générer du trafic sans débourser un centime. Une pratique qui rapporte gros au géant du web grâce aux publicités numériques qui en découlent. Mais, pour la première fois, après d’âpres batailles juridiques, un accord a été trouvé outre-Atlantique.
Le 21 janvier, l’Alliance de la presse d’information générale, organisation porte-parole de 300 journaux français, a obtenu gain de cause : Google France s’engage désormais à rémunérer les journaux au titre du « droit voisin », un dérivé du droit d’auteur créé spécialement pour le secteur par le gouvernement.
La partie n’était pas gagnée d’avance. En avril 2019, une directive européenne avait créé le droit voisin dans le but de partager les revenus du numérique de façon plus équitable. La France avait alors adopté la directive en juillet 2019. En représailles, Google avait décidé de moins bien référencer les journaux. Ont suivi 14 mois de lutte juridique qui ont fini par donner raison à la presse française.
Selon ce contrat, Google négociera des accords individuels de licence avec les membres de l’Alliance. La rémunération sera calculée au cas par cas, selon la contribution à l’information d’intérêt public et général, ou encore le nombre de lecteurs en ligne.
2021, l’année du tournant ?
Les journaux canadiens regardent avec intérêt ce dénouement en Europe. Car cet accord serait la preuve que le gouvernement canadien peut, lui aussi, influencer les géants du web tels que Google et Facebook.
« Le temps est venu, estime Francis Sonier, président de l’Association de la presse francophone (APF). On sent que quelque chose va se passer en 2021, notamment à cause des élections qui pourraient s’en venir. C’est le bon moment pour sensibiliser nos politiciens. »
Médias d’Info Canada, le plus gros représentant des médias imprimés et numériques du pays, avait déjà publié en septembre 2020 un rapport intitulé Niveler les règles du jeu en matière de numérique afin d’interpeler le gouvernement, recommandant entre autres d’imposer des négociations collectives entre les journaux et Google.
L’enjeu est immense. Selon l’Université Carleton à Ottawa, Google et Facebook accaparent près de 80 % des revenus publicitaires numériques chaque année. Ainsi, alors que les journaux luttent pour survivre à la chute de leurs revenus, Google a de son côté enregistré plus de 200 milliards de dollars canadiens de revenus en 2019.
« Les géants du web se servent de notre trafic d’utilisateurs pour récolter des données et ensuite vendre de la publicité », dénonce Francis Sonier. Ce dernier cosigne une lettre ouverte diffusée par Médias d’Infos Canada en décembre dernier, puis traduite en français et diffusée le 27 janvier par l’APF.
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