Le député Robert Falcon-Ouellette et Kevin Lewis
Le député Robert Falcon-Ouellette (à gauche) a saisi l’occasion pour faire un premier discours aux Communes en cri, avec interprétation simultanée dans les deux langues officielles. Le député de Winnipeg-Centre est en compagnie de l’interprète du jour, Kevin Lewis, professeur à l’Université de la Saskatchewan.
Photo tirée de la page Facebook de Robert Falcon-Ouellette
OTTAWA - Les règles adoptées et la mécanique en place, le député Robert Falcon-Ouellette n’a pas attendu, pour faire le premier discours en langue autochtone interprété devant les parlementaires. Dès la rentrée du 28 janvier aux Communes, « le premier jour où c’était permis, je ne voulais pas attendre », a déclaré le libéral de Winnipeg-Centre.
« Nous avons mis le système d’interprétation en place dans la nouvelle Chambre et nous avons le droit de l’utiliser selon les règlements adoptés en décembre, souligne Robert Falcon-Ouellette. Alors j’ai décidé de me prévaloir de mon droit. On a changé le cours de l’histoire pour les langues autochtones du Canada. » Au moment de s’exprimer, le député dit avoir pensé à ses ancêtres et à ses enfants. « J’avais le sentiment de répondre aux demandes et attentes des ancêtres. J’ai une responsabilité d’assurer la survie de la culture et une partie de la culture, c’est la langue. On fait ça aussi pour nos jeunes enfants de toutes les communautés autochtones. » Ce fut une belle journée pour l’élu manitobain. « J’ai essayé de ne pas trop penser au moment historique, mais de faire mon travail comme il faut, de bien parler. Quand j’ai commencé, j’étais très nerveux, mais il y avait plus de plaisir à la fin. »
« Deux interprétations, ce n’est pas l’idéal »
Le texte interprété en anglais par le professeur Kevin wâsakâyâsiw Lewis, de l’Université de la Saskatchewan, a simultanément été présenté en français par le personnel de la Chambre. Le processus n’a rien d’improvisé. « Deux interprétations, ce n’est pas idéal, reconnait le jeune député. Mais ce qu’on a fait, c’est d’avoir les textes préparés pour les interprètes. On s’est assuré que tout soit bien fait. » Le geste de Robert Falcon-Ouellette en aurait surpris plusieurs. « C’était un peu ‘wow!’ que j’aie fait ça si vite. Mais tout le monde était fier de ça. J’ai reçu plusieurs tapes dans le dos et des poignées de mains. » Le député manitobain reconnait l’appui de plusieurs élus dans l’avancement du dossier, en particulier des neuf Autochtones au sein du caucus libéral, mais pas exclusivement : il insiste sur le rôle de son collègue David Graham (Laurentides-Labelle). « Il est Juif, marié à une Philippine. Il n’avait rien à gagner électoralement, mais il a travaillé tous les jours pour faire avancer cette cause. […] »
Un nouveau droit linguistique
Le droit de parler dans l’une des 60 langues autochtones parlées au pays étant acquis, il resterait à normaliser les interventions non seulement en Chambre, mais aussi en comités. Le service d’interprétation possèderait une liste pancanadienne d’interprètes compétents dans plusieurs langues autochtones. La plus répandue est le cri. Pour la transcription du 28 janvier, note le député, « je viens de parler avec les responsables des rapports de la Chambre et la traduction sera publiée dans les comptes-rendus officiels dans quelques jours. C’est un travail plus long que normalement. » Robert Falcon-Ouellette a l’intention de continuer à s’adresser à la Chambre en cri, mais le geste ne sera pas spontané. « Il faut établir un moment pour parler, donner deux jours d’avis et soumettre un texte. Ça deviendra de plus en plus facile et possible de le faire tous les jours. »