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Tabou no more

Des élèves fransaskois se livrent face à la pandémie

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Déjà un peu plus d’un mois que les jeunes Fransaskois sont passés de la salle de classe à la table du salon et ont échangé leurs stylos pour un clavier. En pleine crise sanitaire, ils sont eux aussi confinés, privés de leurs camarades, de leurs enseignants et de leur routine. Comment vivent-ils cette transition et quel regard portent-ils sur la situation ?

C’est ce qu’a tenté de savoir Simon Desjardins, enseignant de français à l’école Monseigneur de Laval de Regina, Pavillon secondaire des Quatre-Vents, en donnant à ses élèves la tâche de créer des vidéos et produire des textes.

« Peu importe le nombre d’élèves participants au cours, et même si l’idéal serait de tous les avoir présents, l’important est de proposer une offre pédagogique pour faire du travail en français à l’oral, à l’écrit et en lien avec la culture », explique ce dernier.

Une thérapie par l’écriture 

Dans la première phase du projet, les jeunes ont présenté leur regard sur la pandémie en créant une courte vidéo individuelle. Puis, dans la seconde phase, ils ont produit des textes portant sur des transitions plus personnelles. « Le but était de savoir comment ils se sentent et qu’ils se libèrent l’esprit. L’avantage du support vidéo était d’avoir un format facile à conserver, partager et réutiliser », complète l’enseignant.

Ainsi sont apparus des thèmes récurrents dans les travaux des élèves, entre l’entraide familiale ou avec les voisins, le manque de contact, l’ennui ou encore les sorties en plein air avec les beaux jours qui s’installent. C’est le cas chez Jean-François Martel, étudiant en 12e année, qui a décrit ses habitudes de vie au travers d’un enregistrement sonore.

« J’aide aux tâches dans la maison, je tonds le gazon et je me suis même mis à cuisiner, mais la transition du mode de vie sans école reste difficile. On a plus d’école à l’école, je suis plus capable de socialiser et je n’ai plus vraiment d’activités. Avant, je pratiquais du sport comme le badminton, le football ou le soccer, et des activités en extérieur avec mes amis, mais aujourd’hui je peux seulement le faire avec mon père et mon petit frère. Parfois, ça devient plate. J’aurais voulu que ça se passe autrement car c’était notre meilleure année pour le sport comme le hockey ou le soccer. »

Un isolement pesant

Véritable cri du cœur, le manque de contact à l’extérieur et d’activités physiques se fait encore plus sentir chez les sportifs. C’est ce qu’explique la jeune gymnaste en 11e année Natalie Shafer à travers son texte intitulé Les athlètes en quarantaine.

« Les aspects physiques et mentaux continuent à se développer à travers des plans d’entraînement de la part des entraîneurs, de réunions hebdomadaires sur Zoom, de l’entraînement de visualisation et des séances d’établissement d’objectifs pour le futur proche ainsi que l’avenir en général. En plus de ces aspects, il faut, même plus qu’avant, s’assurer de planifier des activités comme équipe pour préserver le lien que nous avions développé au cours de cette saison. Bref, en dépit de la souffrance autant mentale que physique que nous subissons au gré de nos sports, ils nous manquent. Peu importe la quantité d’énergie que nous dépensons à nous entraîner à la maison, rien n’apaisera le besoin de pratiquer nos sports tant adorés. »

L’importance d’une routine 

Bien que le Conseil des écoles fransaskoises (CÉF) ait adapté l’enseignement à la situation, les enseignants doivent faire face à plusieurs défis, comme aider les jeunes à trouver une routine de travail. « La participation en ligne des élèves à mon cours de français est assez bonne et il y a beaucoup d’implication, se réjouit Simon Desjardins. Il est néanmoins important de s’assurer qu’ils arrivent à faire le point sur le contexte d’apprentissage autour d’eux et qu’ils arrivent à travailler chez eux. »

L’enseignant va plus loin en indiquant que l’adoption d’un rythme de travail est essentielle puisqu’elle responsabilise l’élève : « Les parents n’ont pas tous le même degré d’implication dans la routine de leurs enfants à cause de leur emploi par exemple. Certains d’entre eux sont donc un peu seuls et doivent trouver de nouveaux repères temporels. À l’école, la cloche rythme leur journée. Là, les jeunes sont leur propre cloche. »

Outre la routine de travail, c’est également une routine sociale que les jeunes retrouvent avec ce projet. Ce genre de production, vidéo ou écrite, leur permet ainsi de s’écouter les uns les autres et de se poser des questions entre eux. « Le lien social revêt toute son importance avec le contexte actuel. Ces travaux étaient une vraie chance pour les élèves de pouvoir s’exprimer sur ce qu’ils faisaient et ce qu’ils souhaiteraient faire s’ils n’étaient pas confinés », souligne Simon Desjardins.

L’instituteur se félicite que la majorité des élèves se soient prêtés au jeu. « Cela me fait toujours plaisir de les voir ou de les entendre. Ils se responsabilisent et apportent de l’entraide à des personnes qu’ils croyaient acquises, comme leurs parents. Les témoignages indiquent qu’ils se débrouillent bien. »

Des jeunes engagés et conscients

Plus largement, les élèves ont abordé dans leurs écrits la question de la transition écologique et économique. C’est le cas d’Anouma Ebrottié, élève en 10e année, qui a choisi de s’exprimer sur la thématique du commerce local. Elle parle de la création d’emplois locaux, du contrôle sur la qualité des produits, de la réduction de l’impact environnemental, ou encore de la marge des géants comme Amazon.

« Les entreprises locales participent énormément à la création de nouveaux emplois, ce qui enrichit l’accroissement des revenus des travailleurs de la communauté. De plus, elles améliorent l’économie, car tout l’argent produit leur revient et permet aux familles d’avoir de la nourriture sur leur table. Contrairement aux grosses entreprises comme Amazon qui s’enrichissent continuellement sans avoir un impact économique durable sur les communautés d’ici. (…) Une bonne façon de participer à la santé économique d’ici est d’acheter d’un commerçant local qui utilisera ses propres profits pour acheter d’un autre commerçant d’ici. »

Les élèves avaient besoin de s’exprimer, et Simon Desjardins l’a bien compris. Les étudiants pourront continuer de le faire grâce à une nouvelle initiative : la rédaction d’un journal culturel par et pour les élèves. « Les jeunes vont pouvoir présenter une fois par semaine le contenu culturel de leur choix qu’ils ont découvert. Cela pourra être un article, un film, une série, une nouvelle chanson, une œuvre d’art ou encore un livre », annonce l’enseignant, motivé à faire du téléenseignement une expérience bénéfique.

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