D’aussi loin qu’elle se souvienne, Kymber Zahar a toujours voulu enseigner. Diplômée en 2019, la francophile de Saskatoon est partie en août 2021 au Nigéria pour occuper le poste de directrice adjointe d’une école à Lagos. Et la jeune femme de 26 ans ne compte pas s’arrêter là, motivée par son rêve d’enseigner sur tous les continents.
« J’ai toujours su que je voulais enseigner, témoigne Kymber Zahar. J’adore les enfants et l’environnement académique. » Pas étonnant avec des grands-pères eux-mêmes enseignants : « Petite, je voyais l’éducation comme quelque chose de vraiment important dans ma famille », ajoute la passionnée.
Son amour pour l’éducation lui permet de voyager puisque, après un an d’enseignement au Nigéria en 2021-2022, la Saskatchewanaise a décidé de repartir début septembre pour une nouvelle rentrée scolaire à Lagos.
C’est en 2018 que Kymber Zahar fait l’expérience de l’Afrique pour la première fois, après un programme d’échange au Bénin avec la Cité universitaire francophone de l’Université de Regina. « J’ai adoré ! Les jeunes étaient super intéressés par ce que j’avais à leur dire, ils étaient engagés et les parents ont apprécié », se souvient l’institutrice.
En 2021, elle devient alors directrice adjointe d’une école à Lagos qui suit le curriculum britannique, avec trois cours de français par semaine. « C’est un environnement de travail très différent, rapporte l’enseignante. Cette expérience me permet de mieux comprendre les élèves issus de pays africains au Canada. »
Le français, une langue convoitée
Parler français au Nigéria « est très bien vu », rapporte la directrice d’école, à qui des parents demandent de faire du tutorat privé. « Ici, les attentes sont beaucoup plus élevées, indique la jeune femme. J’ai appris que je pouvais pousser beaucoup plus mes élèves. »
Le manque de ressources est une autre différence notable avec son pays natal : « Au Canada, on peut aller magasiner, les écoles ont des ressources. Ici, les ressources sont le minimum du minimum. Tu ne peux pas acheter de cahiers, de manuels, d’affiches. Il faut tout faire soi-même. »
La Canadienne remarque aussi que les parents sont « hyper engagés » dans l’éducation de leurs enfants. « Ils veulent savoir ce qu’ils font, ce qu’ils apprennent. J’ai des courriels au moins trois fois par mois des parents. Ils veulent pousser leurs enfants, alors qu’au Canada, dès que tu donnes un devoir, les parents se plaignent », note-t-elle.
C’est que la place dans la société semble passer pour beaucoup par l’éducation au Nigéria. « Les parents sont fiers quand leurs enfants savent bien écrire, lire, compter… Ils le disent à tout le monde », observe Kymber. D’autant plus que l’école où elle enseigne se trouve dans le quartier le plus riche de la ville, « l’un des seuls endroits avec de l’électricité 24 h sur 24 ».
La passion du français
Avec une mère qui a été en immersion et une sœur à l’École canadienne-française de Saskatoon, Kymber Zahar ne pouvait échapper au français. « J’adore la culture et la communauté fransaskoises, j’ai toujours voulu enseigner dans les deux langues », dit-elle.
Pour preuve, la jeune femme a été présidente de l’Association communautaire fransaskoise de Regina (ACFR) de 2019 à 2021. « La communauté me tient vraiment à cœur. Parler français me fait tellement de bien. C’est une partie très importante de ma vie. »
Et cette passion, Kymber souhaite la transmettre aux quatre coins de la planète. « Mon rêve est d’enseigner sur chaque continent », précise-t-elle.
Un rêve qu’elle convoite depuis une quinzaine d’années pour se faire une bonne idée de l’éducation partout dans le monde. « Quand je rentrerai au Canada, j’aurai une expérience globale. Comme le Canada est un pays multiculturel, je veux savoir d’où viennent mes élèves », explique-t-elle.
Au cours de son séjour au Nigéria, la francophile souhaite voyager au Ghana, en Gambie et au Kenya. Et l’année prochaine, elle prévoit de partie en Asie, peut-être en Nouvelle-Zélande. « Je suis déjà en train de regarder un programme en ligne de maîtrise en administration pour devenir directrice d’école. J’aimerais un jour avoir ma propre école, peut-être ici au Nigéria », songe-t-elle.
En attendant son retour en Saskatchewan, qu’elle estime « d’ici cinq ans », Kymber Zahar poursuit son aventure de l’enseignement à travers le monde. « Si je peux avoir un impact positif sur un seul enfant chaque année, ça peut faire toute la différence », ponctue la directrice adjointe d’école.
Aperçu de la vie au Nigéria
Avec plus de 20 millions d’habitants, Lagos est la plus grande ville du Nigéria. « C’est énorme, le trafic est horrible », commente Kymber Zahar, habituée à la circulation de villes comme Saskatoon et Regina.La vie sociale et culturelle est une aventure permanente pour la Saskatchewanaise : « Il y a beaucoup de fêtes, de concerts, de choses à faire, c’est très amusant. Tu peux rencontrer des personnes de vraiment partout. Il y a beaucoup de Libanais, de personnes d’autres pays africains et de Français. »Les saveurs locales constituent aussi une expérience nouvelle pour son palais canadien. « La nourriture est très différente, c’est très épicé. Les légumes sont rares, le fromage n’existe pas et le lait est artificiel. Les Nigérians aiment manger beaucoup de viande », rapporte la jeune femme.Si le pays connaît un développement économique important ces dernières années, la pauvreté reste malgré tout le fait de nombreux citoyens. « Les Nigérians sont super chaleureux, ils vont toujours te saluer dans la rue et essayer de causer avec toi, mais très souvent ils vont te demander de l’argent. Parce que je suis blanche, ils me voient comme une personne riche », regrette la Canadienne.Et d’ajouter : « C’est très difficile ici pour les gens d’avoir de la nourriture et de l’argent en général, poursuit la voyageuse. La vie n’est pas chère, mais même les policiers gagnent très peu d’argent, alors ils t’arrêtent pour t’en demander. »Loin du havre de paix canadien, le Nigéria ne garantit pas toujours la sécurité des résidents : « J’ai eu un incident avec la police, confie Kymber. Ils ont essayé de m’enlever de la voiture au milieu de la nuit. La seule raison pour laquelle ils ont arrêté, c’est que j’ai fait un Instagram Live pour montrer leur visage », se souvient-elle.