L’immersion a la cote malgré ses lacunes
Dépassé, élitiste et source de division, le système d’immersion française en place dans les écoles canadiennes? C’est du moins ce qui ressort d’un récent article de la revue MacLean’s, l’une des principales publications du pays.
Intitulé « Just say non : the problem with French immersion », le texte en question avance que le modèle canadien mis en place à la fin des années 1960 a constitué pendant de nombreuses années un exemple à suivre pour les autres pays. Par contre, l’auteur estime que ce même modèle est à des années-lumière de ce qui se fait ailleurs de nos jours, notamment en Europe.
Et comme à chaque fois qu’une publication de langue anglaise traite de bilinguisme et de dualité linguistique, l’article a suscité des commentaires peu élogieux de la part de lecteurs, certains associant l’immersion française à une forme de fascisme, d’autres qualifiant l’apprentissage du français comme étant totalement inutile.
Du côté de l’organisme national Canadian Parents for French (CPF), qui milite en faveur de l’apprentissage du français comme langue seconde, bien que l’on ait été quelque peu surpris par le titre plutôt assassin de l’article, on ne s’en offusque pas outre mesure.
« Le titre de l’article frappe et laisse croire qu’on devrait agir de façon drastique, c’est-à-dire que si certains aspects du programme fonctionnent moins bien, on devrait tout simplement l’éliminer », souligne la directrice générale de CPF, Nicole Thibault.
« Je crois qu’on doit plutôt aborder l’article de la bonne façon. Il fait ressortir des lacunes qui existent dans le programme d’immersion française depuis plusieurs années et qu’on souligne de notre côté dans le cadre de notre travail de lobbying. Il faut profiter de l’occasion pour démontrer une volonté et un leadership d’apporter les changements nécessaires », croit Nicole Thibault.
Parmi ces changements, CPF milite pour une inscription libre, l’accès au transport scolaire et la formation à distance pour les élèves du secondaire.
Une popularité qui ne démord pas
Étrangement, pour un système dysfonctionnel et qui n’est accessible qu’aux familles plus fortunées, selon ce qu’on peut lire dans le MacLean’s, le système canadien d’immersion française se porte plutôt bien.
Dans l’Ouest canadien, les inscriptions sont en hausse à chaque année depuis maintenant 12 ans. En Ontario, l’immersion française demeure une option très prisée dans la grande région du Centre-Sud-Ouest. Ainsi, pour bien des conseils scolaires, le défi n’est pas de recruter des élèves mais plutôt des enseignants, ce qui est particulièrement le cas dans les régions rurales.
Quant à l’argument selon lequel l’immersion française n’est accessible qu’à une tranche de la population plus privilégiée, Nicole Thibault ne partage pas cet avis.
« Dans l’article, on nous compare à tort avec les écoles privées. Le système actuel est ouvert à tout le monde, tant aux allophones qu’aux parents d’élèves ayant des besoins spéciaux. Peut-être que le système était élitiste il y a 20 ans, mais ce n’est plus le cas aujourd’hui alors que nous avons beaucoup de jeunes de deuxième génération dont les parents sont passés par le système d’immersion », indique-t-elle.
Toujours selon la présidente de CPF, l’immersion française est plus que jamais essentielle à la vitalité des communautés francophones vivant en situation minoritaire, d’autant plus que le système peut cibler une nouvelle clientèle immigrante dont la langue maternelle n’est ni l’anglais, ni le français.
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