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Fermeture de la Caisse populaire de Zenon Park : la fin d’une époque
Emmanuel Masson

Fermeture de la Caisse populaire de Zenon Park : la fin d’une époque

Le 30 juin 2021 marque la fin d’une époque pour la communauté de Zenon Park. La Caisse populaire locale, après 79 ans d’activité, ferme ses portes. Un choc pour cette petite ville du nord-est de la province qui s’était mobilisée pour éviter ce scénario.

Le lundi 2 novembre 2020, après une semaine de températures hivernales précoces, la communauté de Zenon Park profite enfin d’un temps plus clément. Cependant, une nouvelle fâcheuse vient gâcher cette belle journée : la Diamond North Credit Unionannonce à son personnel la fermeture de la succursale locale de leur Caisse populaire à Zenon Park. 

Image
Le certificat d'incorporation de la Caisse populaire de Zenon Park
Crédit : Assemblée communautaire fransaskoise

La Caisse populaire Notre-Dame de Zenon Park a été fondée dans une maison du village en 1942. Le modèle d’économie coopérative était alors à son paroxysme dans l’Ouest canadien et la plupart des autres villages de la région se dotaient de caisses populaires. Rapidement, celle de Zenon Park est devenue l’une des institutions majeures du village qui abrite moins de 200 âmes.

En 2006, une dizaine de ces caisses locales du nord de la province se sont consolidées pour former la Diamond North Credit Union. Zenon Park était l’une des caisses fondatrices du groupe. Un membre du conseil d’administration de la caisse Notre-Dame qui a approuvé ce changement affirme qu’à l’époque il avait eu l’assurance que l’institution de Zenon Park ne serait jamais obligée de fermer.

Des changements chez Diamond North

Aujourd’hui, la Diamond North Credit Union compte plus de 15 000 membres. Pourtant, après 15 ans d’existence, l’organisation commence à réduire ses activités dans les communautés qui l’ont vue naître. À l’instar de celle de Zenon Park, la succursale d’Albertville fermera aussi ses portes le 30 juin, après 71 ans d’activité. Quant à elles, les succursales d’Arborfield, de White Fox et de Choiceland ont vu leurs heures d’opérations réduites. 

Colleen Harmatiuk, directrice générale de Diamond North Credit Union, note que ces changements avaient été décidés en juin 2020, mais que la pandémie « a entraîné un retard dans nos plans de transition qui n'ont été élaborés qu'à la fin de 2020, déplaçant notre capacité à communiquer la décision à nos membres au début du mois de février 2021 ».

L’annonce de la fermeture de la caisse de Zenon Park a été très mal reçue par la communauté locale. Denis Marchildon, un entrepreneur agricole du village, relate que bien des résidents s’étaient résignés à cette éventualité. « C’est un signe du temps », entendait-on. Toutefois, certains habitants se sont mobilisés pour combattre la décision en formant le groupe Action Zenon Park le 4 mars dernier, choisissant Denis Marchildon comme porte-parole.

Si la succursale de Zenon Park est celle qui compte le moins de membres, elle restait encore très rentable, enregistrant le plus grand nombre de prêts par membre de la coopérative, avec deux fois plus de prêts que la succursale d’Arborfield à une dizaine de kilomètres de là.

Pour l’un des membres du groupe Action Zenon Park qui souhaite rester anonyme, la situation financière enviable de la succursale démontre la loyauté des locaux envers la coopérative. « On a investi beaucoup dans Diamond North, alors pourquoi est-on punis de la sorte ? », s’interroge cette personne.

Un dialogue avec la communauté ?

Selon Denis Marchildon, depuis les débuts la relation entre Action Zenon Park et Diamond North « n’a pas été bien chaude ». La première action du groupe a été d’écrire une lettre à la directrice générale de la caisse, demandant d’expliciter les raisons de la fermeture et une rencontre avec les dirigeants. 

Dans une lettre de réponse, Diamond North a tout simplement expliqué que plusieurs éléments ont été pris en compte dans la décision. « Ils n’ont répondu à aucune de nos questions », dénonce le membre anonyme. Diamond North a également refusé de rencontrer les contestataires, expliquant que les communautés seraient consultées lors de réunions publiques. 

Cette réunion a bien eu lieu le 15 avril et a accueilli 38 participants, bien que la rencontre se soit déroulée en pleine journée de travail à 14 heures. D’après un membre présent à la rencontre, une porte-parole de Diamond North a expliqué que le « comportement des usagers » était l’une des raisons principales de la fermeture de la caisse. La plupart des membres de la caisse utilisant plutôt le téléphone ou le service bancaire en ligne, la succursale était sous-utilisée. 

Denis Marchildon réplique qu’il y a pourtant d’énormes avantages à avoir une caisse populaire physiquement présente dans le village. Les aînés, par exemple, qui sont moins mobiles et moins habiles avec la technologie, sont les grands perdants de cette fermeture. La présence de la succursale était aussi instructive pour les enfants du village qui y avaient jusque-là presque tous ouvert leur premier compte bancaire.

Un autre enjeu est l’accès aux services bancaires en français, qui n’étaient pas garantis par Diamond North même avant les fermetures récentes. Si la filiale d’Albertville n’avait déjà plus d’employé francophone depuis plusieurs années, la gérante Marissa Ferré pouvait offrir des services en français à Zenon Park. Cette dernière a par ailleurs été promue au titre de gérante des succursales d’Arborfield et de Carrot River.

Une décision financière

Avec le recul, Denis Marchildon croit que la démarche du groupe Action Zenon Park était vouée à l’échec. « C’était comme si la décision était déjà prise, et on n’avait rien à y dire », lâche-t-il. 

Jusqu’à récemment, une mise en application aussi rapide aurait été impossible selon les statuts et règlements originaux de la caisse qui prévoyaient une période de deux ans entre l’annonce de la fermeture d’une filiale et l’arrêt définitif de ses activités. Mais, il y a quelques années, ce délai a été réduit à 4 mois.

Ce qui attriste le plus certains résidents, c’est que cette fermeture n’était pas financièrement nécessaire pour la compagnie mère. « Si notre branche perdait de l’argent, ça m’aurait moins dérangé, mais ce n’est pas le cas. Diamond North tire encore des bénéfices de Zenon Park », dénonce un des membres.

En fin de compte, Diamond North estime pouvoir améliorer sa rentabilité en fermant la succursale de Zenon Park. La directrice générale Colleen Harmatiuk souligne que les objectifs de la caisse populaire « sont de développer ses activités en fournissant de multiples canaux d'accès aux produits, services et technologies à des tarifs compétitifs ».

Une façon de penser aux antipodes du modèle coopératif selon le membre anonyme : « Diamond North devrait arrêter de se présenter comme une caisse populaire et afficher clairement qu’ils sont devenus une entreprise à but lucratif. 

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