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Carol Léonard

Tête Jaune, une énigme, un destin tragique

La route Yellowhead

La route Yellowhead

Avec ses trois mille kilomètres, la route Yellowhead relie quatre provinces de l’Ouest. Elle bourgeonne du tronçon principal de la Transcanadienne à dix kilomètres à l’ouest de Portage la Prairie, s’élance à travers les Prairies, escalade les contreforts des Rocheuses et s’engouffre dans de larges brèches ouvertes au travers des sommets de la cordillère pour aller rejoindre l’océan Pacifique à Prince Rupert.
Le Canada s’est doté d’un réseau routier à la dimension de son étendue. Des voies que l’on a construites parfois au prix de vies humaines s’y déploient à l’infini. Aucun obstacle ne semble avoir pu les arrêter, les contenir, les freiner. Avec ses trois mille kilomètres, la route Yellowhead  reliant quatre provinces de l’Ouest fait bonne figure. Elle bourgeonne du tronçon principal de la Transcanadienne à dix kilomètres à l’ouest de Portage la Prairie, s’élance à travers les Prairies, escalade les contreforts des Rocheuses et s’engouffre dans de larges brèches ouvertes au travers des sommets de la cordillère pour aller rejoindre l’océan Pacifique à Prince Rupert. Tout au long de son parcours, elle est identifiée par des écriteaux ornés d’une effigie, un profil d’homme d’un jaune éclatant.

L’interminable route tire sa désignation de l’un des cols des Rocheuses, Yellowhead Pass, dont le nom rappelle à son tour celui d’un trappeur, guide et explorateur, Tête Jaune. L’origine de ce nom, tout comme celle de celui qui l’a porté, ont longtemps intrigué.

Le sobriquet

Tête Jaune est de toute évidence un sobriquet. Il évoque, semble-t-il, la blondeur des cheveux de la personne ainsi nommée. Au temps des compagnies de traite, les employés et les gens libres ont, à maintes occasions, exercé l’art du quolibet fortement imprégné d’une impertinence railleuse. Plusieurs en ont fait les frais. L’on retiendra pour exemples John McDonald of Garth appelé Bras Croche, Gabriel Dumont dit Ti-Rat [sic], Mathieu Bélanger surnommé Crédit ou encore un certain Merde d’Esturgeon (ravissant!) dont la véritable identité n’est pas révélée.

L’histoire de l’Ouest canadien est formelle. Plusieurs personnes ont été coiffées du surnom Tête Jaune : François Decoigne, Alexander Macdonnell, également surnommé Gouverneur Sauterelle, Pierre Bostonnais (ou Bostonais) et enfin un certain Pierre Hatsinaton (alias, Atawita, Thaawita et Hathawiton).

Le Bostonnais

L’historien David Smyth1 a pu établir que le fameux Tête Jaune à l’origine du nom de l’autoroute est bel et bien Pierre Bostonnais et nul autre. Il se serait joint aux quelque trois-cents Iroquois qui vinrent grossir les rangs de la Compagnie du Nord-Ouest et de la Compagnie XY. La plupart signèrent leurs contrats au cours des années 1800 à 1804.

Familier des Rocheuses

Colin Robertson, figure importante de la Compagnie de la Baie d’Hudson (CBH), recruta Tête Jaune en 1820 afin qu’il guida un groupe d’Iroquois et de traiteurs à travers les Rocheuses. Au cours des années qui suivirent, la CBH fit à nouveau appel aux services de Tête Jaune. Au printemps de 1828, la nouvelle d’un crime affreux se répandit et fut bientôt confirmée. Tête Jaune, son frère Baptiste et leurs familles avaient été massacrés. Une rumeur courut. Courroucé, déterminé et brûlant d’envie de mettre un terme à la chasse pratiquée par les Iroquois sur leur territoire, un groupuscule radicalisé de Dane-zaa aurait voulu faire des exemples. 

Riche toponymie

Aujourd’hui, des toponymes accordés à plusieurs entités des provinces de l’Ouest canadien3 (col, montagne, crique, district municipal, communauté, point ferroviaire et lieu historique national) perpétuent le souvenir de Tête Jaune (alias Yellow Head).

Nouveaux éléments

Certains ont affirmé que Pierre Bostonnais et Pierre Hatsinaton ne furent qu’un seul et même homme. Nous ne connaissons les origines réelles ni de l’un ni de l’autre. Au XVIIIe siècle, le sobriquet bostonnais était fréquemment accolé, par métonymie, aux habitants et aux immigrés de la Nouvelle-Angleterre. Il y a fort à parier qu’enfant, Pierre Bostonnais porta un nom iroquois tant il est rare qu’une famille adopte pour elle-même un sobriquet en langue étrangère. 

Au cours d’une prospection des 13 000 contrats d’engagement de Voyageurs conservés aux Archives judiciaires de Montréal, mon attention fut un jour retenue par l’un d’eux. Le 27 février 1801, un certain Pierre Atthéhiton2 originaire de Catanawago ou Sault St-Louis (aujourd'hui Kahnawake) s’engagea comme chasseur auprès de la Nouvelle société du Nord-Ouest également connue sous le vocable Compagnie XY.

Jusqu’à la généralisation de l’alphabétisation au début du XXe siècle, les patronymes familiaux étaient écrits selon l’entendement de chacun. Sous la plume d’Européens, les noms autochtones furent transcrits dans une variété inappréciable de graphies phonétiques. Alors, les Pierre Bostonnais, Pierre Atthéhiton et Pierre Hatsinaton (alias Hathawiton, Atawita et Thaawita) ne furent-ils qu’un seul et même Pierre dit Tête Jaune? Jusqu’à plus ample information, l’affirmation d’une commune identité est plausible, mais risquée. 

1. David Smyth (Winter 1984) “Tete Jaune”, Alberta History 32/1, 1-8.

2. Voir : http://voyageurs.shsb.mb.ca/fr/search.aspx

3. Voir aussi : http://www4.rncan.gc.ca/recherche-de-noms-de-lieux/search


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