Skip Navigation
Bon 36366
Bruno Cournoyer Paquin (Francopresse) 
/ Categories: Société, Francophonie

Insécurité linguistique dans la fonction publique fédérale

Quarante-quatre pour cent des francophones seraient mal à l’aise d’utiliser le français au travail, révèle un sondage du Commissariat aux langues officielles auquel ont répondu plus de 10000 fonctionnaires fédéraux. Des données qui ne surprennent pas certains experts qui rappellent que le phénomène est documenté depuis de nombreuses années.

Parmi les autres constats du sondage, on apprend que 43 % des fonctionnaires francophones et 39 % des anglophones aimeraient avoir plus d’occasions d’utiliser le français au travail.

Le sondage révèle aussi que les personnes qui se sentent mal à l’aise de s’exprimer dans leur langue première sont surtout préoccupées par les inconvénients qu’ils causent à leurs collègues, alors que ceux qui éprouvent la même réticence lorsqu’ils s’expriment dans leur langue seconde sont rebutés par l’effort supplémentaire qui est requis ou par la crainte d’être jugés. 

Le professeur Matthieu LeBlanc, du Département de traduction et de langues de l’Université de Moncton, observe que c’est la première fois que l’insécurité linguistique fait l’objet d’un rapport distinct du Commissariat aux langues officielles (CLO), même si la notion a souvent été soulevée dans les rapports annuels du CLO. 

Matthieu LeBlanc

Pour Matthieu LeBlanc, professeur au Département de traduction et des langues de l’Université de Moncton, ce sondage passe un peu sous silence l’unilinguisme, une des causes importantes de l’insécurité linguistique.

Crédit : courtoisie

«Ça vient confirmer ce que plusieurs d’entre nous avons observé, vécu. Il n’y a pas de grande surprise dans ce sondage et dans ses résultats», évalue François Larocque, professeur à la Faculté de droit de l’Université d’Ottawa et titulaire de la Chaire de recherche sur le monde francophone, droits et enjeux linguistiques.

Si le phénomène de l’insécurité linguistique dans la fonction publique fédérale est bien connu, ajoute Matthieu LeBlanc, le sondage permet cependant de mieux comprendre les raisons de cette insécurité puisque les fonctionnaires fédéraux y recensent les raisons derrière leur malaise à s’exprimer dans l’une des deux langues officielles.

Des pistes de solutions déjà explorées

Les répondants au sondage ont aussi avancé quelques pistes de solution à l’insécurité linguistique. Les anglophones proposaient surtout de multiplier les occasions d’apprentissage linguistique, alors que les francophones prônaient un plus grand leadeurship de la direction pour «promouvoir un milieu de travail où les deux langues peuvent être lues et entendues».

Encore une fois, selon François Larocque, ces pistes de solution ont «déjà été exprimées ailleurs».

Matthieu LeBlanc rappelle que «[l’importance du] leadeurship de la haute direction, ça fait longtemps qu’on le mentionne dans les études du CLO, et ça fait aussi pas mal d’années qu’on le signale dans les rapports». 

«J’ai moi-même participé en 2003 à la rédaction d’un rapportLe français à suivre, et déjà à ce moment-là on faisait référence au leadeurship de la haute direction», souligne le professeur de l’Université de Moncton. 

Pour François Larocque, si cette étude reprend des constats familiers, ce qui diffère ici est son «timing» : «[C’est] le fait qu’elle sorte en janvier 2021, alors que le gouvernement se prépare à nous présenter un livre blanc sur les langues officielles qui promet de proposer des changements innovants et de nouvelles pistes en matière de politiques des langues officielles au Canada.»

François Larocque
François Larocque, professeur à la Faculté de droit de l’Université d’Ottawa et titulaire de la Chaire de recherche sur le monde francophone, droits et enjeux linguistiques.
Crédit : Valérie Charbonneau
 Des obstacles passés sous silence

Le rapport omet d’aborder un obstacle majeur au bilinguisme en milieu de travail, soit l’unilinguisme, souligne Matthieu LeBlanc. Il précise que dans le contexte de la fonction publique fédérale, on parle d’unilinguisme anglophone. 

«Ça ne peut pas être passé sous silence : dès que dans une équipe il y a des unilingues anglophones qui s’expriment dans la langue de la majorité, la langue dominante, c’est certain que la dynamique de la réunion est modifiée. Les francophones, qui ont un réflexe naturel de passer à l’anglais dans cette situation, vont le faire», explique l’expert en sociolinguistique.

La persistance de l’insécurité linguistique, selon Matthieu LeBlanc, s’explique en partie par une situation de diglossie : pour toutes sortes de raisons historiques et politiques, les deux langues officielles «n’ont pas le même poids, le même prestige».

«Les pratiques établies font que c’est l’anglais qui demeure la langue de travail, que dans les perceptions, les gens estiment que l’anglais est une langue plus légitime – la langue des affaires, la langue du commerce», de sorte que si le français et l’anglais ont une égalité de statut, celle-ci ne se traduit pas dans les pratiques, identifie Matthieu LeBlanc.  

Pour le juriste François Larocque, les pistes de solution passent par une plus grande valorisation du bilinguisme : il souligne d’ailleurs que la prime au bilinguisme n’a pas augmenté depuis vingt ans.

«Il faut se mettre dans la position d’un anglophone de la majorité linguistique. Pourquoi est-ce qu’il apprendrait le français? Qu’est-ce qui viendrait le motiver? Savoir que certains postes ne lui seraient pas accessibles s’il ne démontre pas un haut niveau de bilinguisme, ou savoir que son revenu annuel va être majoré s’il démontre les compétences requises. C’est reconnaitre que le bilinguisme est une compétence dans le contexte fédéral canadien», illustre François Larocque.

Revoir les régions désignées bilingues sous la partie V de la Loi?

Fait intéressant, plus de 4000 fonctionnaires qui travaillent en dehors des régions désignées bilingues (soit certaines régions du Québec et de l’Ontario, le Nouveau-Brunswick et la région de la capitale nationale) ont tenté de répondre au sondage, même si celui-ci ne s’adressait qu’aux fonctionnaires travaillant dans les régions désignées bilingues.

Le CLO se questionne donc sur les délimitations des zones désignées bilingues sous la partie V de la Loi sur les langues officielles, qui demeurent inchangées depuis 1977. 

«La désignation actuelle des régions visées par la partie V […] ne semble pas traduire les besoins, les réalités et les valeurs» des fonctionnaires fédéraux, peut-on lire dans le rapport du sondage. 

Qu’est-ce que l’insécurité linguistique?

L’insécurité linguistique se définit comme «le sentiment de malaise, d’inconfort ou d’anxiété ressenti lorsqu’on utilise ou tente d’utiliser sa première langue ou une langue seconde à cause de divers facteurs : environnement, perceptions, relations interpersonnelles, organisation et dimension culturelle et sociale», selon le rapport.

Matthieu LeBlanc explique que l’insécurité linguistique est inséparable des représentations que les gens se font de leur langue. «Par exemple, si un francophone en situation minoritaire voit l’anglais comme la langue dominante, comme la langue légitime, la langue du travail, la langue des affaires, la langue du commerce, ça peut expliquer pourquoi en milieu de travail il opte pour cette langue.»

François Larocque, rappelle pour sa part que l’insécurité linguistique peut aussi être vécue au sein du même groupe linguistique, par exemple lorsqu’un accent régional se voit dévalorisé par rapport à un accent «standard».

Print
8880

Bruno Cournoyer Paquin (Francopresse) Francopresse

Other posts by Bruno Cournoyer Paquin (Francopresse) 
Contact author

Contact author

x
Un CÉFOU amusant, instructif et dynamique

Un CÉFOU amusant, instructif et dynamique

Plus de 200 jeunes des écoles fransaskoises se sont rencontrés à Regina

Le CÉFOU, organisé par le Conseil des écoles fransaskoises (CÉF), a  permis de rassembler plus de 200 élèves de la 9e à la 12e année des écoles fransaskoises des quatre coins de la province. 

Visitez la galerie photo et vidéo du CÉFOU

Thursday, April 2, 2015/Author: Jean-Pierre Picard (EV)/Number of views (27218)/Comments (0)/
Forum local du Français pour l’Avenir à Saskatoon

Forum local du Français pour l’Avenir à Saskatoon

De la réflexion et de l’action!

Plus de 200 jeunes élèves des écoles secondaires d’immersion de Saskatoon se sont réunis le vendredi 27 mars pour discuter du bilinguisme et de l’avenir du français dans notre province.

 

Thursday, April 2, 2015/Author: Alexandra Drame (EV)/Number of views (30029)/Comments (0)/
Premier concours d’affiches scientifiques organisé par l’Institut français et l’ACFAS-SK

Premier concours d’affiches scientifiques organisé par l’Institut français et l’ACFAS-SK

REGINA - Premier concours d’affiches scientifiques organisé par le Centre canadien de recherche sur les francophonies en milieu minoritaire (CRFM) de l’Institut français à l’Université de Regina et l’Association francophone pour le savoir de la Saskatchewan (ACFAS-SK)

Thursday, April 2, 2015/Author: CRFM (Institut français)/Number of views (26774)/Comments (0)/
Les Lions de Laval se démarquent à Regina

Les Lions de Laval se démarquent à Regina

L'équipe de ballon-panier des garçons de la 7e et 8e  des Lions de Laval a remporté le championnat de la ville du conseil des écoles publiques de Regina jeudi soir dernier soit le 27 mars.

Wednesday, April 1, 2015/Author: Claude Martel (EV)/Number of views (28611)/Comments (0)/
Les Patriotes de l’ÉCF remportent l’argent à la finale du tournoi de basketball Hoopla 2015

Les Patriotes de l’ÉCF remportent l’argent à la finale du tournoi de basketball Hoopla 2015

Pour la première fois, une équipe francophone  a atteint la finale du championnat provincial de basketball HOOPLA en catégorie 2A. 

Wednesday, April 1, 2015/Author: Alexandra Drame (EV)/Number of views (33932)/Comments (0)/

Situation inquiétante au Conseil scolaire fransaskois

Lettre signée par 5 parents et envoyée aux élus du Conseil scolaire fransaskois le 18 mars 2015

Nous voulons aujourd’hui attirer votre attention sur 3 éléments qui nous préoccupent. Premièrement à la veille d'une succession, à la tête du Conseil des écoles (CÉF), nous (parents et sympathisants) souhaiterions attirer votre attention sur une des requêtes qui avait été formulée par un regroupement de parents; laquelle requête  avait été accompagnée d'une pétition à l'appuie, soient 35 signatures. En guise de rappel, ces derniers réclamaient du sang neuf à la tête du CÉF : 

Tuesday, March 31, 2015/Author: Jean-Marie Allard (Courrier du lecteur)/Number of views (21337)/Comments (0)/
Le Grand  Quiz, un jack pot pour la communauté ?

Le Grand Quiz, un jack pot pour la communauté ?

Réflexion d'un lectrice sur la formule du Grand Quiz qui a remplacé la Grande dictée.

Thursday, March 26, 2015/Author: Céline Magnon (Courrier du lecteur)/Number of views (27618)/Comments (0)/
Des personnes honorées lors de l’Assemblée annuelle de l’ALEF

Des personnes honorées lors de l’Assemblée annuelle de l’ALEF

En marge de son congrès annuel, l’Association locale des enseignantes et enseignants fransaskois (ALEF) a honoré diverses personnes lors de son banquet.

Saturday, March 21, 2015/Author: L'Eau vive/Number of views (42297)/Comments (0)/
Forum local du Français pour l’avenir

Forum local du Français pour l’avenir

300 écoliers à la découverte des avantages du bilinguisme

Le 27 mars prochain, 300 élèves francophones et francophiles des écoles d’immersion de Saskatoon se rassembleront à l’Université de la Saskatchewan à l’occasion du Forum local du Français pour l’avenir

 

3/27/2015 9:00 AM/Author: Collège Mathieu/Number of views (12525)/Comments (0)/
La finale du Grand Quiz 2015: un succès!

La finale du Grand Quiz 2015: un succès!

C'est dans la chaleureuse ambiance d'une fin de semaine ensoleillée, le samedi 14 mars dernier, que le Collège Mathieu, en partenariat avec Radio-Canada Saskatchewan, a fêté les Rendez-vous de la Francophonie d'une façon innovatrice. 

Wednesday, March 18, 2015/Author: Collège Mathieu/Number of views (29395)/Comments (0)/

La petite histoire du postsecondaire francophone en Saskatchewan

L’histoire du postsecondaire francophone en Saskatchewan ne date pas d’hier. Déjà en 1918, le Collège Mathieu de Gravelbourg offrait un programme d’études classiques.

Tuesday, March 17, 2015/Author: Michèle Fortin(EV)/Number of views (27528)/Comments (0)/

La Cité universitaire francophone et le postsecondaire fransaskois

Un peu tôt pour sabrer le champagne

Même si l’ACF se montre très enthousiaste, il faudra attendre un peu pour sabrer le champagne dans le dossier de la Cité universitaire francophone.

Tuesday, March 17, 2015/Author: Jean-Pierre Picard/Number of views (25915)/Comments (0)/

Les Amis de l’Institut français se prononcent: l’ACF mise sur des acquis fragiles

Les Amis de l’Institut français expriment leur profonde déception et désaccord avec la façon dont l’Université de Regina s’est acquittée de ses responsabilités à l’endroit de l’éducation universitaire de langue française. 

Tuesday, March 17, 2015/Author: Michel Dubé (Courrier du lecteur)/Number of views (25505)/Comments (0)/
Un atelier d'Edith Jolicoeur: brancher la fransaskoisie

Un atelier d'Edith Jolicoeur: brancher la fransaskoisie

Facebook, Instagram, LinkedIn, Pinterest; il existe tellement de plateformes qu’il est parfois difficile de suivre le rythme. 

Wednesday, March 11, 2015/Author: Maggy Bougie (EV)/Number of views (33415)/Comments (0)/
 Ateliers d'écriture dans des écoles d'immersion

Ateliers d'écriture dans des écoles d'immersion

Un projet novateur à Debden et Prince Albert

PRINCE ALBERT - La commission scolaire Saskatchewan Rivers Public School Division, située à Prince Albert, accueille un tout premier projet GénieArts sur son territoire. Les écoles Vickers Public School et Debden School sont les hôtes de cette initiative rassembleuse.

Wednesday, March 11, 2015/Author: René Beauparlant (EV)/Number of views (31923)/Comments (0)/
RSS
First1819202123252627Last

 - Monday 3 June 2024