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La contribution oubliée des Noirs à l’édification du Canada
Mireille E. LeBlanc (Francopresse)

La contribution oubliée des Noirs à l’édification du Canada

FRANCOPRESSE – En ce mois de l’histoire des Noirs, l’auteur de l’ouvrage L’Histoire oubliée de la contribution des esclaves et soldats noirs à l’édification du Canada (1604-1945) aux Éditions Afrikana, a répondu aux questions de Francopresse. Le Dr Amadou Ba éclaircit en ces pages des chapitres négligés de l’histoire du pays. Chargé de cours à la Nipissing University de North Bay et à l’Université Laurentienne de Sudbury, ce passionné d’histoire africaine souhaite ainsi contribuer à réconcilier les Canadiens et Canadiennes avec leur passé.

Pouvez-vous commencer par nous brosser un portrait rapide des premiers arrivants noirs au Canada? Qui étaient-ils?

Le premier arrivé remonterait au tout début de la colonie. Mathieu da Costa serait venu lors du premier voyage avec Samuel de Champlain en Acadie à titre d’interprète. Il parlait plusieurs langues et il a permis à Champlain d’entrer en communication avec les autochtones micmacs. On sait qu’il avait été recruté et qu’il avait un contrat pour accompagner Champlain et, après, il est retourné en France.

Après lui, de premiers esclaves sont arrivés en 1628. Le premier qui a été répertorié est Olivier Lejeune qui est amené par des marchands anglais, les frères Kirke, qui l’ont ensuite vendu à Québec. Après, nous allons voir l’arrivée d’esclaves ici et là, mais le groupe le plus important est arrivé lorsque le roi de France a autorisé, en 1689, les habitants de la Nouvelle-France à avoir des esclaves.

Avez-vous noté d’autres importants mouvements de population?

Après la guerre d’indépendance américaine, beaucoup de loyalistes étaient venus et beaucoup avaient fait des promesses aux esclaves américains qui s’étaient engagés comme soldats. Beaucoup sont venus au Canada, dans les Maritimes et dans la province de Québec. On parle de 5 000 Noirs, composés d’esclaves et de soldats engagés avec les Anglais. La majorité est allée dans les Maritimes, soit en Nouvelle-Écosse et au Nouveau-Brunswick. D’autres sont partis vers le Haut-Canada.

Une autre vague est celle des Marrons de la Jamaïque arrivés en Nouvelle-Écosse en 1796. Ils s’étaient révoltés contre les Anglais en Jamaïque qui les ont exilés. Ils ne sont pas restés très longtemps et ils ont été ramenés en Afrique.

Qu’est-il arrivé avec l’abolition de l’esclavage au pays?

Quand l’esclavage a été aboli au Canada en 1833, ce ne l’était pas encore aux États-Unis. Beaucoup d’esclaves quittent le Sud et beaucoup d’entre eux se retrouvent au Canada avec le «Underground Railroad» ou le chemin de fer clandestin. On parle de plus de 60 000 Noirs qui vont vers le nord et une bonne partie se retrouve au Canada jusqu’à la guerre de Sécession.

Tous ces Noirs qui arrivent aux Maritimes et ailleurs au pays, on leur fait croire que le Canada est un paradis, mais ils ont vécu beaucoup de racisme avec des écoles et des églises séparées. Après la guerre civile américaine, 60 % des Noirs en Ontario et 50 % de ceux au Québec vont retourner aux États-Unis.

Bien des Canadiens et des Canadiennes seront surpris d’associer le mot «esclavage» à l’histoire du pays. Que pouvez-vous nous dire à ce sujet?

On est dans un pays qui a voulu se montrer différent, l’exception par rapport aux autres pays. On essaye de faire croire que la question de l’esclavage est plus la question des États-Unis et que le Canada a aidé les esclaves à se libérer. Mais le fait est qu’il y a eu de l’esclavage, du racisme et de la souffrance des Noirs au Canada. Ce n’est pas enseigné et les gens ne sont pas habitués à l’entendre. J’aimerais bien que les enseignants en parlent dans les écoles et que les journalistes en parlent aussi. L’esclavage était là. C’était une «business» de l’époque.

Votre livre s’attarde également à la contribution de soldats canadiens noirs à l’édification du Canada. Comment décrieriez-vous leur contribution?

On voit des Noirs dans toutes les guerres du Canada, du moins depuis 1812 avec le «coloured corps» qui avait plus de 400 recrues avec Richard Pierpoint. On voit des Noirs s’engager durant les rébellions de 1837-1838. Même dans les guerres où le Canada s’engage ailleurs, on voit des soldats noirs comme, par exemple, à la guerre de Crimée ou encore pour la révolte des Cipayes en Inde en 1857. Je mentionne William Hall, un soldat noir qui a reçu la Croix de Victoria qui est remise aux soldats qui se sont le plus illustrés. Il était seulement le 3e Canadien et le premier Noir à la recevoir […] Les Noirs ont souvent vu l’armée comme une voie vers la liberté et l’émancipation.

Dès les débuts de la Première Guerre mondiale, il y avait des engagements de soldats noirs qui sont allés à Vimy, à Passchendaele et à toutes les batailles en Europe. Dans mes recherches, j’ai trouvé beaucoup de Noirs qui sont allés au front et qui sont décédés.

En 1945, les Noirs s’engagent dans l’armée et ils sont moins ségrégés. J’ai retrouvé une famille de cinq frères de la Nouvelle-Écosse, les frères Carty, qui se sont tous engagés dans l’armée canadienne durant la Deuxième Guerre mondiale. Leur père avait fait la Première Guerre mondiale et cette famille est un exemple d’engagement et de patriotisme.

Vous avez choisi les termes «histoire oubliée» dans le titre de votre ouvrage. Pourquoi pensez-vous que la contribution historique des Afro-Canadiens a été négligée des livres d’histoire canadienne?

Plus de 99 % des gens diront qu’ils ne connaissent pas cette histoire. Il existe quelques livres sur le sujet, mais on n’a pas voulu le populariser. La participation des Noirs au monde moderne est systématiquement niée et le Canada n’y fait pas exception. Depuis la colonisation de l’Afrique, on refuse de voir les belles choses, l’apport et la contribution des Noirs pour se concentrer sur le côté négatif.

Que pourrions-nous faire comme Canadiens pour mieux reconnaitre la contribution de ce segment de notre population?

La première des choses est d’ajouter cela dans le curriculum des programmes scolaires […]. Nous avons besoin de visibilité politique, de voir plus de gens noirs élus pour que nous nous sentions plus acceptés. Nous avons besoin de plus de visibilité dans les médias et plus d’accès aux postes de responsabilité. Toutes ces sources donnent de la valeur à une communauté […]. Il faut préparer les Canadiens et Canadiennes à mieux connaitre les Noirs, et les nouveaux arrivants aussi, pour qu’ils soient acceptés dans une société plus ouverte. Aussi, le gouvernement fédéral doit demander pardon pour le racisme et la souffrance des Noirs au Canada pour qu’ils soient acceptés à part entière dans ce pays.

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