La Saskatchewan, une province qui s’oppose au fédéral
Le Parti saskatchewanais du premier ministre sortant, Scott Moe, a remporté les élections provinciales avec 53 % des voix. À l’instar des deux autres provinces conservatrices du pays, l’Alberta et l’Ontario, il lutte contre le gouvernement fédéral en place. Mais jusqu’à quel point ?
« Pour Scott Moe, le gouvernement fédéral est intrusif pour la Saskatchewan », avance Frédéric Boily, professeur de science politique au Campus Saint-Jean de l’Université de l’Alberta.
Frédéric Boily, politologue à l’Université de l’Alberta
Crédit : Courtoisie
Il prend l’exemple du premier ministre de la province, qui a souligné par le passé que la Saskatchewan contrôle ses ressources naturelles. « C’était déjà évident, mais on a tenu à le rappeler. »
« L’idée est que le Parti saskatchewanais est là pour défendre les intérêts de la Saskatchewan contre un gouvernement fédéral qui met en place des politiques environnementales qui sont au détriment des intérêts économiques de Saskatchewan », relève le politologue.
« On s’oppose au gouvernement libéral. Tant que ce dernier reste à Ottawa et qu’ils sont dans une position de faiblesse comme maintenant, on reste donc dans une relation glaciale », soutient l’universitaire.
Pas trop proche d’Ottawa
La raison de ce désamour entre les deux paliers de gouvernements ne résulte pas d’une inimitié personnelle de Scott Moe envers Justin Trudeau.
« C’est surtout que la Saskatchewan est une économie rurale, qui repose sur le gaz naturel », explique le professeur adjoint à la Faculté des études politiques de l’Université de la Saskatchewan, Daniel Westlake.
« Donc la taxe sur le carbone aurait un impact négatif particulièrement fort sur un endroit comme la Saskatchewan. Et ça crée ce genre de lutte entre la province et le gouvernement fédéral. »
Cette opposition au gouvernement fédéral et à Justin Trudeau est aussi « une façon de se doter d’un capital politique à l’interne, contre les néo-démocrates, ce qui joue en faveur du Parti saskatchewanais, notamment du côté des régions rurales », délaissées par Ottawa, estime l’expert.
Selon Frédéric Boily, cet antagonisme met sur la défensive les néo-démocrates qui « doivent eux aussi trouver une façon de composer avec ça ».
Dans tous les cas, au niveau provincial, « on ne peut pas se montrer trop proche du gouvernement à Ottawa », analyse-t-il.
Carla Beck, la cheffe du Nouveau Parti démocratique (NPD) de la Saskatchewan, a également fait attention à ne pas être identifiée à Jagmeet Singh, « parce que par la suite, ça peut leur être reproché », affirme encore le professeur.
Lors du dernier débat télévisé, le premier ministre sortant, Scott Moe, a insinué que Jagmeet Singh, le chef du Nouveau Parti démocratique fédéral, avait soutenu Justin Trudeau.
Le premier ministre sortant, Scott Moe, a été réélu à la tête de la Saskatchewan le 28 octobre.
Crédit : Office of EPA Administrator / Wikimedia Commons
Ce sous-entendu visait à associer son adversaire à Jagmeet Singh, et par raccourci, à Justin Trudeau. Carla Beck s’est défendue en rappelant qu’il s’agissait d’une campagne provinciale, et non fédérale.
Poilievre, le prochain défi de Scott Moe
L’autre défi pour Scott Moe sera de traiter avec un Pierre Poilievre plus populaire que lui, si le chef du Parti conservateur du Canada remporte les prochaines élections fédérales.
La même dynamique s’applique à Danielle Smith, la première ministre de l’Alberta. « Ça crée un défi intéressant pour ces deux premiers ministres, car ces dernières années, leur façon de se vendre à leurs électeurs reposait sur leur bataille contre le gouvernement fédéral », observe Daniel Westlake.
« Une fois Poilievre élu, si tel est le cas, ils ne vont plus pouvoir faire ça. Ils vont devoir trouver d’autres problèmes et d’autres façons de montrer qu’ils se battent pour les intérêts de leur province. »
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