Une ouverture qui pourrait devenir une brèche
Nous entendons souvent parler du défi d’amener nos jeunes à parler en français à l’extérieur des classes dans les écoles fransaskoises. Malheureusement, les exemples qu’on leur offre ne font rien pour les convaincre que le français est une langue pour la vraie vie.
Les rencontres de travail et réunions du CSF et du CÉF se font toujours dans la langue de Molière, mais lorsque qu’on sort du cadre institutionnel, il arrive que l’anglais s’impose et domine. Ce fut le cas lors de la rencontre d’information sur la fermeture possible de l’école de Lloydminster, qui s’est principalement déroulée en anglais parce que, parmi les parents présents, nombreux étaient ceux qui ne parlent que l’anglais.
Pourtant, le directeur de l’éducation par intérim du CÉF, Donald Michaud, l’a rappelé dans sa présentation lors de la rencontre : « le but premier de l’école fransaskoise est de desservir la population dont le français est la langue première ». Bien que la présentation ait été faite en français, on est passé à l’anglais à partir de la période des questions.
Je vois la dominance de l’anglais à une rencontre aussi importante que celle de Lloydminster comme un signal d’alarme. Qu’on se rappelle l’exemple de la Coopérative d’habitation Villa Bonheur à Saskatoon. Par souci de rentabilité, elle avait accepté d’accueillir des anglophones. Aujourd’hui, les rencontres de son conseil d’administration se déroulent en anglais uniquement.
Si je mets mes lunettes pessimistes, on pourrait se retrouver un jour avec un conseil d’école ou même le CSF qui tienne ses réunions en anglais. Techniquement, la Loi scolaire de 1995 sur l’Éducation le permet.
Selon cette loi, quiconque peut voter aux élections scolaires fransaskoises peut se porter candidat. Et pour voter, il suffit d’avoir un enfant qui a reçu ou qui reçoit un enseignement primaire au secondaire au Canada en français. Donc, techniquement, en ouvrant la porte aux enfants dont les parents ne parlent pas français, on ouvre la porte à la présence d’anglophones sur le conseil scolaire ou les conseils d’école.
Les extraits suivants de la loi démontrent qu’il faut demeurer vigilants car l’ouverture aux anglophones pourrait se transformer en brèche.
88.1 Sous réserve de l’article 87, le conseil scolaire peut :
(g) lorsque les circonstances l’exigent, utiliser une autre langue que le français dans l’exercice de ses activités;
132.5 Le conseil d’école :
j) utilise le français comme langue d’usage, mais peut employer une autre langue lorsque les circonstances le commandent;
L’enjeu est complexe car l’école fransaskoise se donne également le mandat de ramener dans le giron fransaskois les familles d’origine francophone qui ont perdu leur langue. Mais on peut se questionner sur les moyens d’y parvenir.
L’école fransaskoise devrait-elle accueillir un élève si aucun des parents n’est en mesure de transiger en français? Quel genre de soutien obtiendra-t-il ou elle à la maison pour les travaux scolaires? Comment pourra-t-on assurer le caractère francophone des activités culturelles de l’école auxquelles les parents participent?
Les écoles d’immersion sont très bien outillées pour enseigner le français langue seconde. Et elles le font admirablement bien. Le français, s’il ne peut pas être parlé à la maison, demeure une langue seconde.
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