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Alexandre Daubisse (EV)

Juges unilingues à la foire du patrimoine

Les Francophones ont-ils toutes leurs chances?

Les kiosques de la foire provinciale du Patrimoine étaient exposés dans la grande salle de bal de la résidence de la gouverneure-générale de la Saskatchewan

Les kiosques de la foire provinciale du Patrimoine étaient exposés dans la grande salle de bal de la résidence de la gouverneure-générale de la Saskatchewan

Photo : Claude Martel

La phase finale des foires du patrimoine 2014 a eu lieu les mardi et mercredi, 3 et 4 juin derniers, à la Maison du Gouverneur. Plusieurs projets francophones étaient en lice pour la finale provinciale, mais une seule juge bilingue était présente, ce qui a contraint le candidat des écoles du CÉF, dont le projet était en français, d’improviser une présentation en anglais pour défendre ses chances. Pourquoi?

 

La Maison du Gouverneur accueillait la finale provinciale de la foire du patrimoine, dont vous avez pu lire le compte-rendu des étapes locale et régionale dans nos colonnes, les semaines précédentes (Voir articles éditions du 24 avril et du 7 mai 2014).

 

Trois kiosques étaient présentés en français, deux par des élèves des écoles d’immersion Saint Pie X, à Regina, et celle d’Estevan, et un par Nikolas Gélinas du Pavillon secondaire des Quatre vents (PSQV) du Conseil des écoles fransaskoises (CÉF).

 

Sur les quinze juges devant évaluer les projets de trente-huit élèves, on ne comptait qu’une seule juge francophone, Mélanie Lemire, de la Société historique de la Saskatchewan (SHS).

 

Le manque de plusieurs juges bilingues représentait, à cette étape de la compétition, un défi pour les francophones, car pour avoir sa chance de gagner, il fallait être capable de faire sa présentation en anglais.

 

Le français, une réalité indéniable en Saskatchewan

 

Certes, la Saskatchewan n’est pas (plus) officiellement une province bilingue depuis 1918, mais la province connaît une réalité bilingue dans le domaine de l’éducation, entre autres, avec les écoles du CÉF et les écoles d’immersion. 

 

Puisque l’éducation en français est un droit et puisque les élèves des écoles du CÉF et des classes d’immersion sont conviés, comme les autres, à participer aux foires du patrimoine, alors le bilinguisme devient, de fait, une réalité de l’évènement et les responsables de Heritage Saskatchewan devraient systématiquement en tenir compte. Mieux que cela, ils devraient le prévoir. Ce qu’ils ont fait dans une grande mesure, puisque des juges francophones et bilingues faisaient partie du jury lors des étapes locales et régionales de la Foire du patrimoine, contrairement à la finale. Mais ce n’est pas suffisant! 

 

Que se serait-il passé si Nikolas n’avait pas été à l’aise en anglais ou si le finaliste du CÉF était un nouvel arrivant qui ne maîtrise pas l’anglais? Aurait-il échoué parce que l’immense majorité des juges n’auraient pas compris sa langue? Ce genre de situation défavorise les francophones. 

 

« Il est nécessaire que des juges francophones ou bilingues soient présents lors d’un évènement de cette importance,» estime Nathalie Gareau-Gélinas, conseillère pédagogique des écoles du CÉF et maman de Nikolas Gélinas. « L’idéal serait d’avoir des juges bilingues à chaque étape [des foires du patrimoine, locale, régionale et provinciale] ».

 

Nikolas Gélinas a fait sa présentation à Mélanie Lemire en français, puis en anglais auprès des juges anglophones. 

 

Nikolas a été capable, alors qu’il avait fait sa recherche, son kiosque et sa présentation uniquement en français, de faire sa présentation en anglais au pied levé. Et il a gagné.

 

Des signes de bonne volonté de la part des organisateurs

 

Les juges ont été recrutés par le biais des organismes membres de l’évènement. «Peu de juges se sont présentés comme bilingues, » explique Shannon Chernick, coordinatrice de l’Éducation à Heritage Saskatchewan. « Le nombre de juges bilingues dépend du nombre de projets en français. » Il y avait plus de projets en français qu’elle n’avait prévu. Madame Chernick aurait souhaité en compter davantage dans le jury final. Elle reconnaît ce manquement, qu’elle souhaiterait corriger, et trouve intéressante, et voudrait mettre en œuvre, la suggestion d’Isabelle Campeau, conseillère pédagogique pour Regina Public Schools et juge à la foire régionale. Madame Campeau propose d’envoyer une note à toutes les divisions scolaires et aux partenaires, dont la Société historique de la Saskatchewan [ndlr], pour les foires de l’an prochain afin d’identifier et de recruter davantage de juges bilingues bénévoles. 

 

Selon la directrice générale de Heritage Saskatchewan, Ingrid Cazakoff, le programme de Foire du patrimoine a été coupé, sur le plan national, il y a quelques années, en raison de restrictions budgétaires, mais les discussions sont ouvertes sur les possibilités de renouveler l’expérience, ce qui signifierait que le français serait officiellement utilisé lors de la compétition. Avec le 150e anniversaire du Canada qui approche, madame Cazakoff a espoir que des moyens humains et financiers seront investis dans des projets historiques à caractère national, dont les foires du patrimoine.

 

Selon Alexandre Chartier, les directions de Heritage Saskatchewan et de Museums Association of Saskatchewan seraient ouvertes au dialogue sur la question de projets bilingues. La SHS pourrait aider au financement de tels projets.

 

Rester vigilant pour l’avenir

 

On peut parier qu’avec le nombre grandissant d’inscriptions dans les écoles du CÉF et dans les écoles d’immersion, il y aura de plus en plus de projets en français lors des différentes foires du patrimoine. La présence de juges bilingues en nombre s’imposera alors sans doute de manière naturelle, du moins peut-on l’espérer.

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