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Actualité économique

Mychèle Fortin

Et pourquoi pas un salaire maximum!

Inflation
Savez-vous ce qui s'est passé le mardi 3 janvier 2017?  À 11h47 très exactement, les 100 présidents-directeurs généraux les mieux rémunérés du pays (dont 2 femmes) empochaient le salaire moyen annuel d’un Canadien travaillant à temps plein. En 2016, il avait fallu une demi-heure de plus pour franchir ce seuil.

Alors que le commun des mortels s'évertue à faire plus avec moins (parlez-en à nos organismes communautaires), des fortunes colossales se concentrent dans de moins en moins de mains. La vitesse à laquelle croît l'inégalité entre quelques-uns et les autres est fulgurante.

Le dernier rapport du Centre canadien de politiques alternatives (CCPA) estime qu'en 2015 la rémunération moyenne des 100 p.-d.g. les mieux payés était de 9,5 millions, soit 193 fois le salaire industriel annuel moyen (49 510 $). En 2014, elle représentait 184 fois le salaire moyen. En 1998, il s'agissait "seulement" de 103 fois. Autrement dit, l’écart entre la rémunération moyenne des 100 dirigeants les mieux payés et celle d’un contribuable moyen a augmenté de 179 % entre 1998 et 2015.

Bien sûr, il y a toujours eu et il y aura toujours des riches et des pauvres.  Mais là on ne parle plus de riches et de pauvres. On parle des très très très riches et du reste d'entre nous. 

Une économie au service des 99%

Dans un rapport publié à la veille du Forum économique mondial qui s'ouvre à Davos ce mardi 17 janvier, OXFAM qualifie "d'indécente" la concentration de richesse que l'on observe et dont on subit les contrecoups. On y apprend que les huits hommes les plus riches de la planète – Bill Gates en tête avec un patrimoine estimé à 75 milliards - détiennent autant de richesse que la moitié la plus pauvre de la population mondiale. Au Canada, la richesse des deux hommes les plus riches équivaut à celle de 11 millions de Canadiens. OXFAM est polie quand elle parle d'indécence. Personnellement, je trouve qu'obscénité convient mieux.

Intitulé Une économie au service des 99%, le rapport dévoile également « comment les grandes entreprises et les individus les plus riches exacerbent les inégalités, en exploitant un système économique défaillant, en éludant l'impôt, en réduisant les salaires et en maximisant les revenus des actionnaires ». Oxfam dénonce « la pression qui s'exerce sur les salaires partout dans le monde », ainsi que les allègements fiscaux dont bénéficient les entreprises ou encore le recours aux paradis fiscaux.

Un système défaillant

La pression sur les salaires débouche naturellement sur la question des luttes salariales et pour la hausse du salaire minimum. Au Québec, où le salaire minimum est de de 10,75$ (10,72$ en Saskatchewan), la députée de Québec solidaire Manon Massé mène une lutte pour une hausse immédiate à 15,00$. Selon le patronat et certains économistes, une telle hausse ne mènerait à rien puisqu'elle s'accompagnerait d'une hausse du coût des produits et services. Elle aurait un impact négatif sur les exportations et les bénéfices des entreprises, nuirait à la compétitivité et s'accompagnerait de pertes d’emplois significatives dans plusieurs secteurs.

On connaît la chanson. C'est la même que l'on chante aux travailleurs de la classe moyenne dont le revenu réel stagne depuis les années 80, en dépit du fait que depuis la même période, la productivité a augmenté de 35%. Le pire, c'est qu'on n'a pas tort de nous la chanter. L'équilibre de notre système économique "défaillant" repose largement sur le maintien d'une partie de la population dans la précarité.  Des milliers, voire des millions d'individus en souffrent. Beaucoup de petites et moyennes entreprises aussi.

Pourquoi pas un salaire maximum?

Pour l'économiste britannique Simon Wren-Lewis, si on veut sérieusement lutter contre les inégalités, il faudrait «plafonner le plus haut revenu à un multiple du revenu le plus bas de l'entreprise».  Selon lui, ce qui serait génial ce serait de lier le salaire maximum au salaire minimum. Ainsi, les pdg auraient une incitation à défendre des salaires plus élevés.

Ce qui serait également pertinent, ce serait des politiques publiques faisant en sorte que le top 100 et autres richissimes ne puissent plus s'enrichir au détriment des contribuables ordinaires. Or c’est tout le contraire qui se passe. Les pertes sont publiques et les profits sont privés.   

Faudra-t-il descendre dans la rue pour que ça change? Pendant la Révolution française, on a coupé des têtes pour moins que ça!

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