Grève Postes Canada accès PDF
Close
Une «tempête parfaite» pour la désinformation électorale
Marianne Dépelteau – Francopresse
/ Categories: Politique

Une «tempête parfaite» pour la désinformation électorale

Le déclenchement d’élections s’accompagne souvent de campagnes de désinformation électorale. Le contexte social, politique et médiatique actuel est particulièrement propice à ce phénomène. Le problème : le Canada est mal outillé pour faire face à la tempête selon des observateurs.

La professeure en communication et politique de l’Université du Québec à Trois-Rivières, Mireille Lalancette, voit venir une «tempête parfaite», qui a le potentiel d’exacerber la désinformation électorale.

«Il y a de moins en moins de gens qui s’identifient à un parti politique, qui ont une carte de parti par exemple. Dans la même veine, il y a une montée du populisme […] Il y a aussi une méfiance envers les gouvernements et les médias. Donc on va se tourner vers une autre source.»

«C’est tout ça mis ensemble qui rend possible que cette désinformation ait plus de prise», résume-t-elle.

Désinformation ou mésinformation?

Selon Mireille Lalancette, la désinformation est liée au partage volontaire de fausses informations. La mésinformation est surtout liée au partage involontaire d’une fausse information.

L’opinion aux dépens des faits

Selon Mireille Lalancette, «dans certains cas, il n’y a plus d’intérêt pour les faits». Aujourd’hui, les opinions prennent de plus en plus de place.

«Le sous-financement des médias amène à avoir beaucoup d’opinions, de commentaires, explique la professeure. Quand on normalise l’importance d’avoir des opinions et des commentaires, ça mène les gens à dire : “Moi j’y crois, moi je pense ça, moi je l’aime cette personne”. On n’est plus dans les faits, dans la véracité. On est dans l’ordre de l’émotion.»

«Les médias doivent recevoir une certaine aide, comme ça a été fait en Finlande, afin que les salles de nouvelles puissent être peuplées de journalistes capables d’offrir des analyses sérieuses plutôt que, comme on le voit beaucoup aujourd’hui, des chroniqueurs d’opinion», défend de son côté le député bloquiste de Trois-Rivières, René Villemure.

«Ce n’est pas que l’opinion n’est pas valable, mais elle n’est pas toujours valide», précise-t-il.

IA et réseaux sociaux

M. Villemure anime, dans sa circonscription le 15 octobre, un colloque sur la désinformation électorale. Cette initiative est non seulement motivée par sa carrière prépolitique d’éthicien, elle est aussi d’actualité.

«L’arrivée de toutes les méthodes de surveillance qu’on peut appeler médias sociaux, téléphones ou intelligence artificielle fait qu’on devrait être à même d’intéresser la personne ordinaire» à ce phénomène, dit-il.

Les complots et les opinions trouvent leur confort dans les réseaux sociaux, où, comme le rappelle Mireille Lalancette, les codes journalistiques ne s’appliquent pas. Pourtant, les gens s’informent de plus en plus au sein de ces plateformes.

«Quand votre source d’information est YouTube ou Facebook, et que vous prenez votre vérité là, qu’est-ce que ça fait? C’est là qu’on est beaucoup plus influençables», met en garde l’expert en résidence à l’École supérieure d’études internationales de l’Université Laval et militaire de carrière, Richard Giguère.

«Quand on parle de désinformation ou de mésinformation, on essaie d’influencer les gens», dit-il. Certains États étrangers l’ont d’ailleurs bien compris.

Ingérence étrangère

«Certains pays étrangers peuvent mener des campagnes sophistiquées qui masquent efficacement les sources de désinformation», note la présidente de la Commission sur l’ingérence étrangère, la juge Marie-Josée Hogue, dans son rapport initial paru en mai 2024.

«La Russie cherche aussi à façonner l’opinion publique, à manipuler les enjeux sociaux existants et à exacerber les clivages sociaux. Elle cherche à miner la confiance du public dans les systèmes politiques et les processus démocratiques en Occident», lit-on. La Chine est aussi identifiée comme autrice de désinformation au Canada.

«La Chine ne vise pas à s’approprier nécessairement le contrôle du pays, mais à créer un certain chaos en politique afin d’empêcher certaines décisions de se prendre», commente René Villemure.

Selon lui, malgré l’approche d’élections fédérales, le Canada «n’est malheureusement pas mieux outillé». La ministre des Affaires étrangères, Mélanie Joly, l’a affirmé elle-même la semaine dernière.

«[Certains] gouvernements étrangers ont probablement fait le calcul que ce serait préférable pour eux d’avoir tel ou tel gouvernement en place dans les pays qui sont en élections», stipule Richard Giguère.

Celui-ci fait un lien entre la désinformation et la «guerre cognitive» : «Les espaces de confrontation traditionnels, c’était le domaine terrestre, maritime et aérien. Là, on voit l’apparition de nouveaux espaces […] comme le cyberespace, la bulle informationnelle et le domaine cognitif.»

En d’autres mots, l’objectif de ces États est d’influencer en «ciblant le cerveau des gens».

Le problème, c’est qu’il est «extrêmement difficile de trouver le coupable, ajoute le chercheur. Il y a plein de moyens de détourner [la source de la désinformation]».

Un enjeu domestique aussi

«Les gens sont plus sensibles au discours politique en période d’élections», note Richard Giguère. C’est donc un moment propice pour mener une campagne de désinformation.

«On voit que les acteurs politiques eux-mêmes se servent de la désinformation pour arriver à leurs fins, comme raconter des faussetés à propos d’autres candidats, raconter des choses qui pourraient influencer le vote, miner les faits», confirme Mireille Lalancette.

Parmi les techniques utilisées par les politiciens, elle remarque «la répétition, même d’un élément faux, qui à force d’être répété devient comme vrai ou plus vérifiable».

S’inspirant de techniques américaines républicaines, «ils vont être très répétitifs dans leurs contenus, nier, attaquer systématiquement l’adversaire», poursuit la professeure.

«Tout ça participe aussi à créer une forme de cynisme envers la politique, de méfiance, ce qui fait en sorte qu’on va encore plus se détourner des médias pour aller chercher de l’information ailleurs», dit-elle.

René Villemure soutient que son parti ne joue pas le jeu de la désinformation. «Là où on a un contrôle [comme député], c’est quand on voit de la désinformation par un parti politique. Je pense qu’on a un devoir de la dénoncer et d’exiger de rendre compte.»

La campagne américaine sera un test de désinformation, «mais la campagne canadienne n’y échappera pas», prévient-il. «La désinformation vient des États étrangers, mais il y a [aussi] des acteurs malveillants à l’intérieur du pays.»

Print
1330

Marianne Dépelteau – FrancopresseGhita Hanane

Other posts by Marianne Dépelteau – Francopresse
Contact author

Contact author

x
Conseil économique et coopératif de la Saskatchewan

Le CCS sur Facebook

Nouvelles du CÉCS

Poste à combler : Gestionnaire, Employabilité et Immigration

Poste fermé le 21 février 2020. The post Poste à combler : Gestionnaire, Employabilité et Immigration appeared first on CÉCS.
Wednesday, January 22, 2020/Author: Conseil économique et coopératif de la Saskatchewan/

Poste à combler : Chargé de projets

Offre d’emploi au CÉCS Nous sommes toujours à la recherche d’une personne dynamique et motivée pour combler un poste à temps plein au Conseil économique et coopératif de la Saskatchewan (CÉCS). CHARGÉ DE PROJETS The post Poste à combler : Chargé de projets appeared first on CÉCS.

Poste à combler : Chargé de projets

Poste fermé le 24 janvier 2020. The post Poste à combler : Chargé de projets appeared first on CÉCS.
RSS
First678911131415Last

Actualité économique

Un quatrième économusée inauguré en Saskatchewan Un quatrième économusée inauguré en Saskatchewan

Un quatrième économusée inauguré en Saskatchewan

4189

Le 7 juin, l’hydromellerie artisanale Prairie Bee, la première en son genre dans la province, a été désignée économusée.

Le FDÉFP, une bouffée d’air pour la fransaskoisie Le FDÉFP, une bouffée d’air pour la fransaskoisie

Le FDÉFP, une bouffée d’air pour la fransaskoisie

Grâce aux financements du Fonds de développement économique francophone des Prairies (FDÉFP), trois organismes fransaskois peuvent concrétiser...
5075
La Belgique tisse des liens avec la Saskatchewan La Belgique tisse des liens avec la Saskatchewan

La Belgique tisse des liens avec la Saskatchewan

L'ambassadeur de Belgique au Canada, Patrick Van Gheel, a effectué une visite officielle en Saskatchewan du 24 au 27 octobre afin de...
6529
Le CÉCS dresse le portrait des régions Le CÉCS dresse le portrait des régions

Le CÉCS dresse le portrait des régions

Disponibles sur le site du Conseil économique et coopératif de la Saskatchewan (CÉCS) depuis la mi-juin, six rapports statistiques offrent un...
5937
Gaspillage alimentaire : la Saskatchewan veut mieux faire Gaspillage alimentaire : la Saskatchewan veut mieux faire

Gaspillage alimentaire : la Saskatchewan veut mieux faire

Depuis le 3 août, une nouvelle application, Too good to go, permet aux habitants de Regina et de Saskatoon de réduire leur gaspillage alimentaire....
5692
RSS
123456789Last
Terms Of UsePrivacy StatementCopyright 2014 par L'Eau vive
Back To Top