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S'exprimer autrement
Cette chronique, en collaboration avec La Cité universitaire francophone,  offre des textes dont les auteurs ont en commun d’avoir choisi le français comme langue seconde.

Le cout du panier d’épicerie ne cesse d’augmenter dans l’Ouest et le Nord

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Épîcerie
Crédit : : Brittani Burns – Unsplash

FRANCOPRESSE – Depuis le début de la pandémie, faire l’épicerie est devenu un véritable casse-tête pour de nombreux ménages canadiens de l’Ouest et du Nord. En cause, des augmentations successives des prix des produits en raison d’une chaine alimentaire perturbée et d’importations en provenance des États-Unis.

L’un des meilleurs indicateurs à cet effet est l’Indice des prix à la consommation (IPC), que Statistique Canada définit comme représentant «les variations de prix comme expérimenté par les consommateurs canadiens. Il mesure la variation de prix en comparant, au fil du temps, le cout d’un panier fixe de biens et services».

Entre février 2021 et 2022, l’IPC a augmenté de 5,7 %, soit la plus forte hausse depuis aout 1991 (6,0 %). Les prix des aliments achetés en magasin ont quant à eux augmenté de 7,4 %, «la hausse annuelle la plus marquée depuis mai 2009» d’après Statistique Canada.

Ray Orb

Ray Orb

Président de la Saskatchewan Association of Rural Municipalities.
Crédit : Site Web SARM - 2022
Ray Orb, président de la Saskatchewan Association of Rural Municipalities (SARM), note que «nous avons constaté une augmentation des prix dans les épiceries. Si tu ne vas pas à l’épicerie pendant quatre ou cinq jours, les prix auront drastiquement augmenté lors de la prochaine visite. C’est quelque chose dont nous sommes conscients».

Il déplore cette situation, qui mène certaines familles à renoncer à certains produits comme la viande rouge ou les produits frais.

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«Des choix entre loyer et nourriture»

Ray Orb souligne que plusieurs facteurs expliquent cette situation : «Nous avons beaucoup de nos produits, ici et dans les autres provinces, qui sont importés de la Californie et de la Floride. Cela occasionne des couts additionnels qui augmentent ceux des produits, malgré le fait que nos fermiers ne gagnent pas leur part. Et le prix de vente continue d’augmenter!»

Même son de cloche en Alberta, qui connait une flambée des prix des denrées alimentaires. Bradley Lafortune, directeur de l’organisme Public Interest Alberta (PIA), raconte avoir entendu les histoires de «plusieurs personnes dernièrement, et notamment durant les deux derniers mois, qui ont de plus en plus de difficulté à vivre. Nous voyons une crise en Alberta comme nous n’en avons pas vu depuis longtemps».

Fondée en 2004, PIA se définit comme «une organisation sans but lucratif, non partisane et présente dans toute la province, qui se consacre à l’éducation et à la défense de l’intérêt public».

Bradley Lafortune souligne que les conséquences sont réelles puisque «les gens commencent à [devoir] faire des choix entre le loyer, la nourriture, les fournitures scolaires, etc. Il s’agit d’une période difficile pour beaucoup».

Il demande au gouvernement de réinvestir dans les infrastructures albertaines afin de relancer l’économie. Le président de PIA ajoute également que «les prix dans les communautés du nord [de la province] ont toujours été plus élevés et inaccessibles pour la plupart des Albertains, en particulier pour les produits frais».

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Les régions éloignées particulièrement vulnérables

George Hickes, député d’Iqaluit-Tasiluk au Nunavut, explique que «chaque fois qu’il y a une augmentation, il y a un fort impact sur les populations du Nunavut puisque beaucoup vivent sous le seuil de pauvreté. Toutes les augmentations au niveau de l’épicerie, même minimes, ont un impact».

Selon lui, le gouvernement canadien doit aider davantage les ménages en difficulté, surtout dans les régions les plus éloignées qui souffrent déjà des couts élevés.

Il rappelle que «dans les régions éloignées du Canada, le gouvernement fédéral offre un programme appelé Nutrition Nord Canada (NNC)», qui vise à «rendre plus abordables et accessibles des aliments nutritifs et certains articles essentiels».

Comment fonctionne le programme NNC?

«NNC offre une contribution à l’égard d’une liste d’aliments nutritifs admissibles ainsi qu’à l’égard de certains produits non alimentaires, comme les couches, le savon, le désinfectant pour les mains et les produits d’hygiène personnels, vendus par des détaillants et des fournisseurs inscrits ainsi que par des transformateurs d’aliments traditionnels ou locaux inscrits.

Les clients dans les communautés admissibles peuvent acheter des aliments admissibles à une contribution chez des détaillants du Nord inscrits ou directement auprès de fournisseurs inscrits.

La contribution pour la vente au détail vise le cout total d’un produit admissible (y compris prix d’achat du produit, transport, assurances et frais généraux) expédié par avion, route de glace, transport maritime ou barge vers une communauté admissible. Cela signifie que le prix que vous payez pour ces articles est inférieur à ce qu’il serait autrement.»

Source : Comment fonctionne Nutrition Nord Canada?

Georges Hickes estime que le programme «aide à minimiser l’impact, mais pour le transport de ces produits et non pour le produit en lui-même». Il aimerait donc que le gouvernement aille encore plus loin et offre une aide en ce qui a trait au revenu.

Le gouvernement du Canada doit regarder «le cout du panier d’épicerie, le contenu de ce panier et le filet social. À chaque fois qu’une augmentation du cout du panier d’épicerie se fait sentir, une aide devrait être apportée afin de limiter l’impact. Les gens doivent pouvoir faire des choix en fonction de leur santé», plaide le député d’Iqaluit-Tasiluk.

Il ajoute que l’insécurité alimentaire est une problématique constante au Nunavut et demande des adaptations rapides.

Un peu plus à l’ouest, les Territoires du Nord-Ouest en sont eux aussi affligés. En janvier 2021, une table ronde virtuelle antipauvreté s’y est conclue «par un engagement des membres à accroitre la sécurité alimentaire aux Territoires du Nord-Ouest».

Par communiqué, la ministre de la Santé et des Services sociaux du territoire, Julie Green, soulignait que «l’insécurité alimentaire reste un problème majeur sur notre territoire, encore aggravé par la hausse des couts de transport et des prix des denrées alimentaires. Le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest continue d’agir, mais l’augmentation de la production alimentaire et la réduction de la faim nécessitent des efforts collectifs».

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Des solutions à envisager?

Pour tenter de pallier l’inflation galopante, Ray Orb, président de la SARM, recommande d’exempter les fermiers de la taxe carbone, dont le cout se répercute sur les prix à l’épicerie.

«L’industrie du transport est vraiment importante pour nous, car quand nous regardons la carte de la Saskatchewan […] les produits doivent être importés par camion. Avec l’augmentation du cout du gaz […] l’augmentation de la taxe carbone se reflète sur l’augmentation du prix», soutient Ray Orb.

Il ajoute que des solutions visant à renforcer les capacités d’autoproduction des provinces sont à envisager : «Nous pouvons irriguer notre province. La Saskatchewan et le gouvernement fédéral travaillent ensemble pour étendre l’irrigation, il y a des projets en cours, comme ceux du lac Diefenbaker».

Une meilleure irrigation des champs permettrait à la province de produire des légumes et des fruits, et ainsi de s’affranchir du transport depuis la Californie ou la Floride.

«Nous avons besoin de plus de projets comme ceux-là. Le lac Diefenbaker est un lac créé par les hommes qui a commencé à se développer dans les années 1960», rappelle le président de la SARM.

Même si le processus risque de prendre «un peu de temps», Ray Orb a bon espoir que les projets du lac Diefenbaker permettent de créer des emplois et de faire compétition aux produits des États-Unis, pour qu’éventuellement les produits alimentaires redeviennent plus abordables.

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