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Fulgence Ndagijimana: de réfugié à chef de file des Africains fransaskois

Author: Jean-Philippe Deneault – Initiative de journalisme local – APF /Thursday, March 12, 2020/Categories: Initiavive de journalisme local - APF, 2020, Société, Immigration

Fulgence Ndagijimana

Fulgence Ndagijimana

Fulgence Ndagijimana est originaire du Burundi. Il vit aujourd’hui à Saskatoon où il occupe le poste de directeur de la CAFS.
Photo : Jean-Philippe Deneault
Natif du Burundi, Fulgence Ndagijimana est devenu réfugié au Canada en 2016. Avant son départ précipité d’un pays en crise, il s'est voué à la religion au sein de l’Ordre des Dominicains, a travaillé dans le milieu du développement et cofondé l’Église unitarienne du Burundi. Le nouveau directeur de la Communauté des Africains francophones de la Saskatchewan (CAFS) revient sur les sources de son engagement.

En septembre 2019, Fulgence Ndagijimana décroche le poste à temps plein de directeur général de la CAFS, qu’il occupe depuis. La CAFS dispose pour la première fois d’un budget stable sur trois ans et d’une direction stable, souligne-t-il, permettant de développer des projets à long terme.

Fulgence se dit très honoré d’être au service de la communauté d’ascendance africaine en Saskatchewan qu’il décrit comme plurielle et diversifiée : « L’Afrique est un continent. Elle n’est pas seulement francophone, mais aussi anglophone et lusophone et regorge de valeurs communes telles que la solidarité et le sens de la communauté qui font en sorte que je me sens très proche lorsque je rencontre un autre Africain. Elle cache également une diversité très riche qui gagne à être mieux connue et valorisée », insiste-t-il.

Unis sous la bannière de la francophonie

Pour lui, la francophonie permet à plusieurs nationalités de communier et communiquer entre elles. « C’est sous cette bannière que peuvent s’unir des gens de diverses nations ! Il reste qu’il y a un aspect très ambigu dont on se doit de parler : nous avons le français comme langue commune, mais nous partageons l’héritage de la colonisation française. Nous avons donc, tous les francophones, un rôle commun à jouer dans l’élimination des résidus de la colonisation », estime-t-il.

Et de poursuivre : « Il est bien que la francophonie véhicule des valeurs universelles, de solidarité, des droits de l’Homme, mais elle se doit du même coup d’éviter les écueils de la colonisation. Nous avons le devoir de préserver les valeurs qui nous unissent et laisser être les aspects culturels qui sont différents, mais enrichissants », présente-t-il avec conviction.

Une vie guidée par la foi

« Je viens d’une famille large de 9 enfants. La famille, surtout ma mère, était très fière que j’étudie la théologie. J’avais une très haute idée d’une vie donnée aux autres et la prêtrise semblait la voie tracée, mais je trouvais qu’il y avait une certaine intransigeance doctrinale dans la position de l’Église catholique. Ce n’était plus un espace d’épanouissement pour moi », confie-t-il.

Cette période lui permet tout de même d’élargir ses horizons culturels. « À un moment dans le monastère où je restais, nous comptions des frères provenant de 14 nationalités différentes et cela m’a poussé à creuser ce que signifiait le rôle de la personne dans la communauté. Être dominicain m’a permis de voyager, de découvrir d’autres cultures africaines comme la culture kenyane. »

Un engagement caritatif et bénévole

Très attaché à la religion catholique depuis sa tendre enfance, Fulgence se heurte toutefois à la doctrine ecclésiale. « Quand j’étais chez les Dominicains, j’avais l’impression qu’on me présentait une vision fragmentée du monde. Cela me révoltait. Accepter la complémentarité, c’est selon moi la seule façon de s’approcher d’une manière de vivre ensemble, de regarder l’autre, d’éviter ce qui gangrène le monde, c’est-à-dire de voir l’autre constamment comme compétiteur. On va réussir ensemble ou échouer ensemble ! », réfléchit-il.

En 2004, Fulgence rejoint le mouvement unitariste universaliste, présent dans quelques pays africains francophones dont le Burundi où il fait partie du groupe de pionniers fondateurs de l’Église unitarienne. Il s’y engage de façon bénévole et occupe pendant près d’une décennie un emploi dans une ONG britannique agissant pour le développement. « On m’a même envoyé étudier une année à la Conventry University [en Angleterre] dans un programme de résolution de conflit et de consolidation de la paix », précise-t-il.

Réfugié au Canada

La crise sociale au Burundi atteint des sommets en 2015, période à laquelle il devient président d’une fondation humanitaire rattachée à l’Église unitarienne. « Notre fondation a été ciblée par le gouvernement, parce que nous faisions le monitoring des droits humains. J’ai été emprisonné pendant 9 jours. Et grâce à des pétitions, on m’a libéré. 400 000 personnes avaient déjà quitté le Burundi et il y avait des morts partout le long des rues. Une partie des membres de l’Église ont fui vers le Rwanda, et trois mois plus tard, je suis venu au Canada grâce à un visa de travail de 3 ans. Depuis Montréal, j’ai entrepris la procédure d’immigration via le statut de réfugié que j’ai obtenu en moins de trois mois », se rappelle-t-il.

Montréal s’est d’abord imposé en tant que seule ville disposant d’une église unitarienne francophone. On lui avait expliqué que, considérant les traumatismes liés à son départ précipité et les violences subies lors de son incarcération, le choc culturel serait moins grand en français. En 2013-2014, il visite Saskatoon à deux reprises pour rencontrer certains membres de l’Église unitarienne de la ville, donateurs de sa fondation au Burundi.

« En mai 2016, on m’a offert un poste de pasteur stagiaire rémunéré pendant une année. Ma femme et mon fils se trouvaient alors aux États-Unis, où ils avaient obtenu un visa. Nous avons donc été séparés pendant quatre ans jusqu’à ce qu’ils viennent me rejoindre à Saskatoon », relate-t-il avec émotion.

Un nouveau départ

La communauté francophone d’ascendance africaine grandit vite en Saskatchewan. Pour Fulgence, le défi est de faciliter l’intégration des nouveaux arrivants et de développer « des espaces d’épanouissement permettant à la communauté d’accueil de les recevoir sans ressentiment ».

Selon lui, des bases solides ont déjà été mises en place dans la communauté fransaskoise : « Il ne nous reste maintenant qu’à trouver un moyen de répondre au grand besoin d’encadrement et d’intégration réussie des nouveaux arrivants afin qu’ils deviennent des citoyens productifs au sein d’une communauté harmonieuse », conclut-il.

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