C’est le printemps, le temps de l’année où on commence à penser à ce qu’on peut semer pour embellir le paysage et nourrir le village. Il est beaucoup question du paysage médiatique francophone par les temps qui courent.
Le monde des médias écrits traverse une crise sans précédent, pas seulement ici mis partout dans le monde. De grands journaux comme le New York Times ou Le Monde perdent des lecteurs et des profits. Le papier disparaît pour faire place à la tablette et à la lecture en ligne.
Nos médias communautaires n’échappent pas à cette crise planétaire. Ils sont obligés de réduire leurs dépenses en supprimant des pages d’information. Certains sont au bord du naufrage. L’hebdomadaire fransaskois, l’Eau vive, a dû interrompre fin octobre dernier sa publication papier faute de moyens. Il a pu la relancer en mars, grâce à une campagne de sauvetage qui lui a rapporté 48 000 $, à laquelle Zachary Richard a participé en offrant un concert bénéfice, et au prix d'importantes coupures au niveau des ressources humaines.
Leur principal pourvoyeur de fonds les délaisse pour acheter de la publicité sur le Web. Ce grand pourvoyeur est nul autre que le gouvernement fédéral.
Quant à la radio et à la télévision, Radio-Canada a vu ses ressources décliner constamment depuis le milieu des années 80. La production locale en a souffert. Les radios communautaires ne roulent pas sur l’or non plus.
Décidément, l’aridité est dans le paysage. Que se cache-t-il derrière l’horizon? Du soleil, mais pas trop? De la pluie, mais pas un déluge? L’espoir est permis.
Le Comité permanent du patrimoine canadien de la Chambre des communes a consacré quelques semaines à l’étude du financement de la presse communautaire. Il n’a pas pu que constater les dommages que les éditeurs ont exposés.
Quant à Radio-Canada, lumière au bout du tunnel, elle bénéficiera de 675 millions de dollars en nouveaux crédits d’ici cinq ans.
Il faudra quand même attendre pour la fête champêtre. Les intentions sont bonnes mais on sait tous que le chemin de l’enfer en est pavé. Cela dit, quelqu’un semble vouloir s’en occuper.
C'est simple, les journaux ont besoin de vendre de la publicité. Ottawa n’aurait qu’à reprendre ses bonnes vieilles habitudes et faire connaître ses services et programmes comme il le faisait auparavant, auprès des lecteurs des journaux communautaires. Après tout, cette publicité est davantage de l’information citoyenne qu’une incitation à consommer.
Du côté de Radio-Canada, il y aura fort à faire pour que toutes les régions profitent de la nouvelle manne, tant elle est attendue. On salive partout dans le réseau et dans tous les services rongés jusqu’à l’os par des années de privation.
L’enjeu consiste à bâtir une contrée où les francophones pourront se connaître et se reconnaître.
Ils sont plus d’un million. Ensemble, ils pourraient bâtir une société, mais ils sont dispersés sur la largeur d’un continent. Il est impossible d’étirer une toile à ce point sans qu’elle ne perce ni ne se déchire, à moins que le formidable pouvoir des communications soit mis à contribution.
Le village global existerait à l’échelle planétaire. Il s’agit d’une idée lancée dans les années 60 par un philosophe canadien, Marshall McLuhan. Les communications allaient devenir tellement efficaces qu’elles allaient effacer les distances pour faire évoluer le monde à la manière d’un village.
De ragot en conversations honnêtes, les villageois finissent par se connaître pour acquérir la certitude d’appartenir à une société qui leur soit propre. Ce qui était possible à partir du perron d’église le serait à l’échelle planétaire.
McLuhan était un visionnaire. Les moyens de communication existent. Il ne faudrait que la volonté de l’État pour édifier ce qui pourrait être le village global francophone dans notre paysage, à l’échelle canadienne.