Skip Navigation
Jean-Philippe Deneault

Le Remai Modern, oser rêver un avenir meilleur

Le nouveau Remai Modern Art Gallery à Saskatoon

Le nouveau Remai Modern Art Gallery à Saskatoon

Photo: Adrien Williams (2017)

Une citation d’Édouard Glissant, penseur martiniquais du métissage, du multilinguisme, et de la créolisation débute le premier de quatre essais théoriques du catalogue de l’exposition inaugurale du Remai Modern, Field Guide. Le dernier essai du catalogue se termine sur une citation du même auteur. Ce choix citationnel est tout sauf anodin. Une figure majeure parmi les écrivains francophones anticoloniaux et antiesclavagistes, citer Glissant, poète et théoricien de l’émancipation et de la liberté des peuples noirs, c’est prendre position. Mais en ce qui concerne le Remai Modern, laquelle au juste?

Dans sa documentation, le Remai Modern se fait porteur d’espoir. Il s’engage à « interroger l’idée de la "modernité" à partir de multiples positions culturelles, historiques et contemporaines, à être un centre de premier plan pour l’art et les discours autochtones contemporains, et un chef de file dans l’élaboration de nouveaux modèles de partage des connaissances et de participation de diverses communautés ». Comme l’art a beaucoup à nous apprendre au sujet de ce qui nous distingue et nous divise, de ce qui nous est commun et nous rassemble, les visiteurs du nouveau musée seront mis en contact avec une grande variété d’œuvres issues du patrimoine artistique de la modernité, saskatchewannaise, canadienne et internationale.  Cela leur permettrait d’éventuellement mettre en perspective et questionner leurs rôles dans la société, accentués par leurs différences et souvent profondes divisions culturelles.

L’arrivée à Saskatoon de ce grand vaisseau spatial, pour reprendre l’habile métaphore d’une ancienne commissaire du défunt Mendel Art Gallery, permettra-t-elle à Saskatoon de devenir véritablement l’épicentre d’un haut lieu de rassemblement inclusif permettant de réfléchir collectivement le sens d’une cohabitation entre diverses communautés culturelles au passé historique trouble? Tous les espoirs sont permis.

La figure du flâneur de Baudelaire est examinée par la conservatrice en chef du musée, Sandra Guimarães, dans l’essai introductif de Field Guide comme une métaphore du visiteur qui « parcourt l’exposition, un montage d’œuvres, et se confronte à des idées à travers lesquelles il se forme sa propre compréhension de la condition contemporaine au sens large ». Mais que se passe-t-il lorsque le simple fait de marcher et de se promener librement dans les espaces publics comme dans la rue, à la bibliothèque, dans les transports en commun ou au musée est une question de privilège ?

Lors de la première table ronde du Remai Modern, suivant la présentation du documentaire 7 Minutes (2016) de Tasha Hubbard, la philosophe Nēhiyaw Erica Violet Lee, l’une des organisatrices d’Idle No More ayant grandi dans le quartier voisin du musée, décrit comment les femmes autochtones sont continuellement restreintes dans leurs mouvements et que le simple acte de marcher librement est impossible sans avoir à subir dans la rue le harcèlement et la violence sexiste de manière constante et omniprésente. Lee réussit, grâce à ses propos, à mettre la figure du flâneur en perspective. Dans la mesure où les musées d’art ont historiquement contribué à creuser la fracture sociale pour paraphraser Bourdieu, nous devons nous demander si tous les membres de la société se sentiront les bienvenus à déambuler dans ses galeries. 

Gabriel Dumont’s Wild West Show

Les auteurs et concepteurs de l’ambitieux Gabriel Dumont’s Wild West Show qui sera présenté en février et mars 2018 à Persephone, le théâtre avoisinant du Remai Modern (d’ailleurs accessible depuis l’intérieur du musée) entendent bien démontrer que les francophones, Autochtones et Métis de l’Ouest n’ont pas accepté de se fondre « sans faire de bruit dans le creuset canadien, symbole de "modernité" et de "progrès". » Cette pièce examine de manière critique, grâce à la magie du théâtre, ce qui nous reste comme souvenirs des résistances métisses de 1870 et 1885. Sur ce point, la visée des dramaturges et celles des commissaires du musée convergent : l’art magnifie notre regard sur le passé, force une remise en question parfois radicale et parvient à nous projeter dans l’avenir. Le Remai Modern serait d’ailleurs un excellent lieu pour une rencontre entre le public et les artistes de ce spectacle hautement anticipé. Saskatoon, pour mémoire, est la ville qui a déclenché le mouvement « Idle No More ».  La toute première œuvre du tout premier catalogue du Remai Modern, Imagio Pietatis – A New Wave for Ozone du peintre cris-métis Robert Boyer (1948-2004) est un excellent choix de la part des artistes Tanya Lukin Linklater et Duane Linklater.

Les sceptiques diront que ce projet muséal est un pari à haut risque voué, au départ à l’échec, étant donné son emplacement géographique. Les inconditionnels optimistes verront dans Saskatoon l’espoir d’une proposition artistique forte de son contexte permettant d’aspirer collectivement à une réconciliation des publics diversifiés grâce à sa rencontre avec des œuvres audacieuses et émouvantes. Si la question actuellement sur toutes les lèvres est davantage d’ordre comptable —combien seront-ils et seront-elles à vouloir franchir les portes du vaisseau— son dessein nelliganesque apporte pour l’instant aux habitants de la ville des ponts, son lot de rêve.


À voir : Belle comme le jour, film présenté en français avec sous-titres en anglais dans la salle de cinéma du Remai Modern, jusqu’au 25 février 2018 dans le cadre de l’expo Field Guide.

Coup de cœur : L’exposition Occupation, 32 photos de l’artiste palestinienne Ahlam Shibli, présentée au 3e étage (Marquee Gallery) dans le cadre de l’expo Field Guide jusqu’au 25 février 2018.

À ne pas manquer : Gabriel Dumont’s Wild West Show, du 27 février au 4 mars 2018.
http://persephonetheatre.org/events/gabriel-dumonts-wild-west-show

À lire :

1) “The Remai Effect”, texte percutant d’une ancienne commissaire du défunt musée d’art Mendel, Canadian Art, 27 octobre 2017:
http://canadianart.ca/features/the-remai-effect/

2) Benito Perez, « Le Canada est toujours une colonie », Le Courrier, 21 avril 2017 :  https://www.lecourrier.ch/148742/le_canada_est_toujours_une_colonie


* Au sujet de l’auteur

 

Originaire d’Ottawa, il réside actuellement à Saskatoon. Il a signé à titre d’auteur des recensions critiques d’expositions, entretiens et portraits d’artistes et de musiciens, notamment pour le compte de Muse (magazine de l’Association des musées canadiens), Ottawa XPress, Le Panoptique, les centres d’artistes AKA et Sans-atelier, BlackFlash Magazine et L’Eau vive. Il travaille depuis une quinzaine d’années dans le milieu des arts et de la culture.

Imprimer
30414

Jean-Philippe DeneaultJean-Philippe Deneault

Autres messages par Jean-Philippe Deneault
Contacter l'auteur

Contacter l'auteur

x

Place de la petite enfance dans notre société

Dossier petite enfance - Mai 2014

Les jeunes parents qui arrivent du Québec sont toujours étonnés de découvrir ce qu’il leur en coûtera pour que leurs enfants puissent fréquenter un Centre de petite enfance (CPE) en Saskatchewan. Ils sont loin du 7 $ par jour rendu possible par le programme universel mis sur pied par le gouvernement du Québec, programme dont l'objectif premier est de permettre l'accès à un CPE, quel que soit le revenu familial. 

15 mai 2014/Auteur: Jean-Pierre Picard/Nombre de vues (25269)/Commentaires (0)/

L’animation culturelle dans les écoles

On apprenait récemment que le Conseil des écoles fransaskoises (CÉF) révisait plusieurs de ses programmes, dans le contexte de la crise financière qu’il traverse actuellement. Un de ces programmes est celui qui concerne l’embauche d’animatrices / animateurs culturels dans les écoles.

15 mai 2014/Auteur: Michel Vézina/Nombre de vues (24308)/Commentaires (0)/
Se sucrer le bec pour une bonne cause

Se sucrer le bec pour une bonne cause

Un souper pour moderniser les infrastructures de la Gard’Amis

Le vendredi 9 mai 2014, la communauté francophone de Regina honore le rendez-vous fixé par le Centre éducatif Gard’Amis au Bistro du Carrefour des Plaines. Le souper Cabane à sucre, organisé en collaboration avec l’Association canadienne française de Regina (ACFR), a pour de but de lever des fonds « afin de donner un coup de jeunesse aux infrastructures vieillissantes » de la seule garderie francophone de la ville reine. 

15 mai 2014/Auteur: Luc Bengono/Nombre de vues (29594)/Commentaires (0)/

L’Association des parents fransaskois et la petite enfance

Dossier petite enfance - Mai 2014

Pour l’Association des parents fransaskois (APF), la petite enfance (de la garderie à la prématernelle) est un dossier prioritaire, car il représente l’avenir de la communauté. Investir dans la petite enfance, c’est donc investir dans notre avenir. L’APF traite ce dossier avec le Conseil des écoles fransaskoises (CÉF).

15 mai 2014/Auteur: Alexandre Daubisse (EV)/Nombre de vues (25182)/Commentaires (0)/

Les groupes de jeux :Pour favoriser le développement global de l’enfant

Dossier petite enfance - Mai 2014

L’Association des parents fransaskois (APF) chapeaute plusieurs structures, telles que les Centres d’appui à la famille et à l’enfance (CAFE) et les Centres de ressources à la petite enfance (CREPE). Elle travaille avec les garderies familiales avec ou sans permis et les prématernelles du CÉF. « Plus il y a d’organismes qui s’impliquent, chacun avec ses compétences, meilleur sera l’appui », affirme Hind Ramy. 

15 mai 2014/Auteur: Alexandre Daubisse (EV)/Nombre de vues (24503)/Commentaires (0)/
Le Collège Mathieu et la formation en petite enfance

Le Collège Mathieu et la formation en petite enfance

Dossier petite enfance - Mai 2014

Le Collège Mathieu, institution d’éducation postsecondaire en français en Saskatchewan, offre le programme d’Éducation à la petite enfance depuis une dizaine d’années. Les personnes qui ont complété ce programme, ainsi que la majorité des étudiants actuellement admis, travaillent déjà dans le secteur. La tendance des inscriptions est à la hausse d’une année à l’autre, et ceci est l’un des indicateurs d’un besoin réel sur le marché du travail de la province.

15 mai 2014/Auteur: Josiane Barebereho – Collège Mathieu/Nombre de vues (35035)/Commentaires (0)/

Éducatrice : Un métier à l’avenir prometteur

Dossier petite enfance - Mai 2014

Entretien avec Madame Brigitte Chassé, Agente à la petite enfance auprès du Conseil des écoles fransaskoises (CÉF) qui nous a partagé son opinion sur l’éducation de la petite enfance.

15 mai 2014/Auteur: Josiane Barebereho – Collège Mathieu/Nombre de vues (32942)/Commentaires (0)/
La Garderie : Là où tout commence

La Garderie : Là où tout commence

Dossier petite enfance - Mai 2014

C’est au bout de quatre ans de démarches auprès du gouvernement et grâce à l’appui de l’ensemble de la communauté fransaskoise que le centre éducatif a pu ouvrir ses portes en 1987. À l’été 1996, le Centre a emménagé dans ses nouveaux locaux au Centre scolaire communautaire de Regina.

15 mai 2014/Auteur: Mychèle Fortin/Nombre de vues (35003)/Commentaires (0)/

La petite enfance et l'avenir : Quand les chiffres parlent d'eux-mêmes

Dossier petite enfance - Mai 2014

« Donner un degré de priorité élevé au développement de la petite enfance. Il s’agit là de l’investissement le plus rentable que nous puissions faire pour assurer notre prospérité à long terme. » (rapport L’Ontario à l’ère de la créativité)

15 mai 2014/Auteur: Mychèle Fortin/Nombre de vues (24908)/Commentaires (0)/

Mais qu’est-ce qu’elles font toute la journée?

Dossier petite enfance - Mai 2014

La garderie, comme on dit... Que sait-on de ce lieu, de ce milieu dans lequel évoluent les tout-petits, de cette micro-société où ils passent souvent plus de temps que dans leur famille? Que sait-on du rôle et de la place qu’occupent les éducatrices dans la vie des enfants? 

15 mai 2014/Auteur: Mychèle Fortin/Nombre de vues (31564)/Commentaires (0)/
L’école Beau Soleil se distingue au festival théâtral de l’Association Jeunesse Fransaskoise

L’école Beau Soleil se distingue au festival théâtral de l’Association Jeunesse Fransaskoise

Le 30 avril et 1er mai dernier, des élèves de l’école Beau Soleil de Gravelbourg ont participé au festival théâtral de l’Association Jeunesse Fransaskoise (AJF) à Saskatoon. Cet évènement annuel, organisé en collaboration avec La Troupe du Jour (LTDJ), a plongé les participants dans le monde du théâtre en leur permettant de suivre des ateliers donnés par des spécialistes de tous les horizons, comme l’expression corporelle, l’improvisation et le jeu lors de la première journée du festival.  

15 mai 2014/Auteur: Étienne Gravel/Nombre de vues (27935)/Commentaires (0)/
Destination Provence

Destination Provence

Immersion et dégustation pour dix étudiantes de l’Université de Regina

C’est en Provence, une région du sud-est de la France, que se rendront dix étudiantes et deux accompagnatrices du département de français de l’Université de Regina, du 13 au 29 mai prochains.

15 mai 2014/Auteur: Alexandre Daubisse (EV)/Nombre de vues (21048)/Commentaires (0)/
Science et culture à l’école de Zénon Park

Science et culture à l’école de Zénon Park

Deux journées bien remplies!

Le lundi 14 avril, les élèves de l’école Notre-Dame-des-Vertus ont présenté un magnifique projet collectif. Les élèves de la maternelle à la 3e année racontent et chantent « La soupe aux pierres ». Un joli conte qui parle de débrouillardise et de partage. 

15 mai 2014/Auteur: Amy-Valérie Olivier – CÉF/Nombre de vues (23213)/Commentaires (0)/
Mathieu Racine : du restaurant à la garderie

Mathieu Racine : du restaurant à la garderie

Dossier petite enfance - Mai 2014

Originaire de l’Outaouais, Mathieu est un Chef cuisinier, un vrai! Pendant dix ans, il a touché à plusieurs cuisines, en commençant par la cuisine française pour laquelle il a une prédilection. À la Gard’Amis depuis mars 2013, il veille au bien-être des estomacs des petits et des grands.

15 mai 2014/Auteur: Mychèle Fortin/Nombre de vues (30636)/Commentaires (0)/
Foire du patrimoine régionale de Regina

Foire du patrimoine régionale de Regina

Des jeunes de 18 écoles étalent leur savoir

La Foire régionale du patrimoine s’est tenue à l’Université des Premières Nations, le jeudi 1er mai. Cet évènement réunissait les 103 projets des 125 élèves (4e à 9e année) de 18 écoles des 6 commissions scolaires suivantes : le Conseil des écoles fransaskoises (CÉF), Prairie Valley, Regina Catholic, Regina public, South East Cornerstone et Holy Family.

8 mai 2014/Auteur: Alexandre Daubisse (EV)/Nombre de vues (47488)/Commentaires (0)/
RSS
Première2627282930313335

 - samedi 8 juin 2024