Skip Navigation
Festival Cinergie 2024

Retour dans les années 1970, première décennie de l’Eau vive

Entre une jeunesse qui bouge et un conservatisme religieux

Lors du colloque « Les médias francophones sous toutes leurs coutures » tenu à l’Université Sainte-Anne en Nouvelle-Écosse en octobre dernier, le professeur Michael Poplyansky et l’assistant de recherche Fredrick Etommy, tous deux à l’Université de Regina, ont présenté « Une vitrine sur les longues années 1970 : la première décennie de L’Eau vive ».

Les deux chercheurs ont exposé la genèse du journal francophone de la Saskatchewan L’Eau vive, né en 1971. Ils ont notamment présenté son rôle dans les débats socio-politiques qui marquaient la province au début des années 1970 et ont offert quelques réflexions sur l’importance des médias comme source archivistique.

En travaillant sur ce projet, Fredrick Etommy a surtout été frappé par le pluralisme idéologique de L’Eau vive pendant ses premières années. « Le journal donnait alors la parole aux baby-boomers fransaskois qui étaient en train de forger une nouvelle identité collective », écrit-il. Du même temps, L’Eau vive se faisait porte-parole d’une réaction conservatrice, notamment par rapport au féminisme et à la contreculture.

Un journal d’abord conservateur

Le ton conservateur devient évident dès le 2 novembre 1971, moins d’un mois après le lancement de L’Eau vive. Le journal s’interroge : « Pourquoi certains de nos enfants s’adonnent-ils à la drogue ? Que faire si notre enfant s’y adonnait ? Comment prévenir et empêcher cette funeste passion ? »

Par ailleurs, les chercheurs ont déniché cinq articles consacrés explicitement à l'avortement entre 1971 et 1973. Par exemple, le 19 avril 1973, l’éditorialiste Marcel Moor prétend que « tout individu censé, croyant ou athée, sait très bien que l’avortement légalisé n’est pas la solution ». À cette époque, l'avortement était souvent considéré comme un acte répréhensible. Beaucoup de Fransaskois, inspirés par la tradition catholique, partageaient clairement ce point de vue, notent les universitaires.

Véhicule des idées de son temps 

L’Eau vive insistait aussi sur le rôle traditionnel de la femme en tant que mère. L’article « La libération des francophones dépend des femmes » du 2 novembre 1971, rédigé par Roger Lalonde, président de l’Association culturelle franco-canadienne (ou ACFC, l’ancêtre de l’actuelle Assemblée communautaire fransaskoise, ou ACF), qui administrait le journal pendant ses premières années, en témoigne. Lalonde écrit : « Que la femme se libère, je n’y vois aucune objection sérieuse… Mais pour s’émanciper, la femme canadienne-française se doit de faire prendre conscience à ses enfants et son mari de la valeur de la langue et de la culture françaises. » Le fait qu’une femme puisse ne pas avoir d’enfants ou de mari est inimaginable pour le rédacteur, observent ainsi les deux chercheurs.

L’espoir d’une génération

Mais L’Eau vive comptait aussi sur les jeunes baby-boomers pour porter l’affirmation culturelle francophone. « Au début des années 1970, l’ACFC déployait beaucoup d’efforts dans l’organisation de programmes afin de réunir les jeunes pour qu’ils puissent réaliser leurs désirs », remarque Fredrick Etommy. Ainsi, le directeur général de l’ACFC René Rottiers publie un article dans L’Eau vive en janvier 1972 intitulé « Pour les jeunes », où il écrit que « l’ACFC n’a voulu que répondre au désir exprimé par les jeunes de se rencontrer. Elle ne leur a imposé aucun programme ni aucun discours et elle est heureuse du résultat. »

Dans les années qui suivent, d’autres articles saluant l’engagement de la jeunesse envers la francophonie, notamment dans le cadre de la lutte pour la télévision française en Saskatchewan, sont également publiés dans L’Eau vive. « Le journal voulait donner plus de liberté aux jeunes dans le but d’assurer la survie de la francophonie en Saskatchewan, mais avait peur des tendances contre-culturelles que ces mêmes jeunes véhiculaient, notamment de la drogue et du féminisme », ponctue l’assistant de recherche.

En définitive, cette analyse du journal fransaskois par Michael Poplyansky et Fredrick Etommy rappelle que les médias en milieu minoritaire sont aussi des marqueurs de leur époque. Ils touchent toujours à plusieurs enjeux, bien au-delà de la seule question linguistique.

Imprimer
27071

D’après les recherches de Fredrick Etommy et Michael PoplyanskyMichael Poplyansky

Autres messages par D’après les recherches de Fredrick Etommy et Michael Poplyansky
Contacter l'auteur

Contacter l'auteur

x
Près de 16 000 ayants droit : un argument massue pour plus d’écoles fransaskoises

Près de 16 000 ayants droit : un argument massue pour plus d’écoles fransaskoises

En novembre dernier, Statistique Canada a révélé que près de 16 000 jeunes Saskatchewanais étaient admissibles à l’instruction en français en 2021. Pourtant, seulement 2 000 élèves fréquentent les écoles francophones de la province. Des personnalités de la communauté réagissent.

25 janvier 2023/Auteur: Anne-Hélène Mai – IJL-Réseau.Presse/Nombre de vues (4773)/Commentaires (0)/
Francis Kasongo, un pilier de l’éducation en français

Francis Kasongo, un pilier de l’éducation en français

Le 9 novembre, lors du congrès national du Réseau des cégeps et collèges francophones du Canada (RCCFC) à Montréal, le directeur général du Collège Mathieu Francis Kasongo a reçu le prix Pilier collégial francophone. Cette distinction vient ainsi souligner son travail pour le développement de l’éducation postsecondaire collégiale en français en Saskatchewan. Le fier récipiendaire revient sur son engagement.

25 novembre 2022/Auteur: Lucas Pilleri/Nombre de vues (4749)/Commentaires (0)/
Des bibliothèques communautaires à Regina

Des bibliothèques communautaires à Regina

Dans le cadre de la rentrée des classes, l’Association communautaire fransaskoise de Regina (ACFR), en partenariat avec le Conseil des écoles fransaskoises (CÉF), a dévoilé trois bibliothèques communautaires extérieures. L’objectif : favoriser le partage de livres et encourager à la lecture en français.

18 octobre 2022/Auteur: Marie-Lou Bernatchez – IJL-Réseau.Presse/Nombre de vues (4926)/Commentaires (0)/
Le Conseil culturel fransaskois plus près des écoles

Le Conseil culturel fransaskois plus près des écoles

En cette période de rentrée, le Conseil culturel fransaskois (CCF) veut resserrer ses liens avec le secteur scolaire. 

29 septembre 2022/Auteur: Leanne Tremblay – IJL-Réseau.Presse/Nombre de vues (4414)/Commentaires (0)/
Collège Mathieu : une nouvelle Charte pour une nouvelle ère

Collège Mathieu : une nouvelle Charte pour une nouvelle ère

Une nouvelle époque s’ouvre pour le Collège Mathieu qui vient de renouveler sa charte le 17 août. Alors que l’Église catholique ne sera plus représentée dans le conseil d’administration de l’établissement, la nouvelle loi veut faire plus de place à la jeunesse et aux femmes, ainsi qu’à certaines compétences clés. 

1 septembre 2022/Auteur: Mehdi Mehenni – IJL-Réseau.Presse/Nombre de vues (3830)/Commentaires (0)/
Le fédéral assure défendre les droits des Fransaskois

Le fédéral assure défendre les droits des Fransaskois

Mehdi Mehenni – IJL-Réseau.Presse La ministre des Langues officielles et ministre responsable de l’Agence de promotion économique du Canada atlantique, Ginette Petitpas Taylor, était en visite le 29 juillet à Regina dans la cadre des consultations pancanadiennes sur les langues officielles entamées en mai dernier. Une visite durant laquelle une annonce de 7,1 millions de dollars a été faite au profit de la Cité universitaire francophone de l’Université de Regina et du Collège Mathieu.

En évoquant le projet de Loi sur les langues officielles, toujours en cours d’adoption au Parlement, Ginette Petitpas Taylor souligne l’engagement du fédéral à s’assurer que, à l’échelle provinciale, les communautés de langues officielles en situation minoritaire « reçoivent les services et droits nécessaires pour continuer à vivre et à travailler dans leur langue maternelle ».  

12 août 2022/Auteur: Mehdi Mehenni – IJL-Réseau.Presse /Nombre de vues (3286)/Commentaires (0)/
7,1 millions de dollars pour le postsecondaire fransaskois

7,1 millions de dollars pour le postsecondaire fransaskois

La Cité universitaire francophone de l’Université de Regina et le Collège Mathieu viennent de bénéficier d’un budget de plus de 7,1 millions de dollars pour la construction, la rénovation et le développement d’espaces éducatifs postsecondaires, mais aussi pour accroître l’offre de programmes qui desservent les communautés de langue officielle en situation minoritaire.

29 juillet 2022/Auteur: Mehdi Mehenni – IJL-Réseau.Presse/Nombre de vues (3865)/Commentaires (0)/
Café le Réseau : les élèves aux manettes derrière le comptoir

Café le Réseau : les élèves aux manettes derrière le comptoir

Depuis le 8 juin, le Café le Réseau a ouvert ses portes au sein même de l’école Monseigneur de Laval. Se voulant un lieu de rencontre, l’établissement est une initiative 100 % étudiante qui fait la fierté des jeunes et de leurs enseignants, et le bonheur des clients.

2 juillet 2022/Auteur: Lucas Pilleri – IJL-Réseau.Presse/Nombre de vues (2675)/Commentaires (0)/
Joe Poirier: Une passion pour la fransaskoisie récompensée

Joe Poirier: Une passion pour la fransaskoisie récompensée

Joseph, dit Joe, Poirier a passé sa vie à défendre la cause fransaskoise. À 78 ans, il est récompensé pour ce dévouement en recevant, en avril dernier à Ottawa, la Médaille du souverain pour les bénévoles des mains de la gouverneure générale du Canada Mary Simon.

13 mai 2022/Auteur: Marie-Lou Bernatchez – IJL-Réseau.Presse/Nombre de vues (4641)/Commentaires (0)/
La francophonie entre privilèges et marginalisations

La francophonie entre privilèges et marginalisations

Les chercheurs et membres des communautés francophones de l’Ouest et du Canada se sont rassemblés de manière virtuelle dans le cadre du colloque du Centre d’études franco-canadiennes de l’Ouest, organisé par La Cité universitaire francophone de l’Université de Régina.

6 avril 2022/Auteur: Marie-Lou Bernatchez/Nombre de vues (4909)/Commentaires (0)/
L’enseignement en français au cœur des débats

L’enseignement en français au cœur des débats

Les collèges et universités francophones en milieu minoritaire font face à d’importants défis partout au Canada.

1 mars 2022/Auteur: Marie-Lou Bernatchez – IJL-Réseau.Presse/Nombre de vues (6549)/Commentaires (0)/
Les faibles taux de rétention, revers de la médaille en immersion

Les faibles taux de rétention, revers de la médaille en immersion

Les programmes d’immersion ont augmenté dans les vingt dernières années, mais moins de la moitié des élèves restent jusqu’à l’obtention de leur diplôme.

10 février 2022/Auteur: Ericka Muzzo – Francopresse /Nombre de vues (5435)/Commentaires (0)/
Postsecondaire dans l'Ouest: la demande dépasse l’offre

Postsecondaire dans l'Ouest: la demande dépasse l’offre

Dans l’Ouest canadien, la demande pour des programmes en français est plus élevée que l’offre des établissements postsecondaires. C'est ce qui ressort des États généraux sur le postsecondaire en contexte francophone minoritaire.

8 février 2022/Auteur: Marianne Dépelteau – Francopresse/Nombre de vues (6070)/Commentaires (0)/
La francophonie, parent pauvre du postsecondaire

La francophonie, parent pauvre du postsecondaire

L’égalité est loin d’être atteinte entre les établissements postsecondaires francophones et ceux de la majorité anglophone. 

25 janvier 2022/Auteur: Francopresse/Nombre de vues (5869)/Commentaires (0)/
Revue de l'année 2021 - Éducation

Revue de l'année 2021 - Éducation

Survol de l'actualité fransaskoise durant l'année 2021 dans le domaine de l'éducation.

14 janvier 2022/Auteur: Lucas Pilleri/Nombre de vues (6327)/Commentaires (0)/
RSS
135678910Dernière

 - mercredi 1 mai 2024