Skip Navigation
Festival Cinergie 2024 150 ans

Sciences infirmières : un examen national décrié par les francophones

Première cohorte du programme de sciences infirmières bilingue

Première cohorte du programme de sciences infirmières bilingue

Les sept étudiantes de la première cohorte du programme, offert conjointement par la Faculté de sciences infirmières de l’Université de Regina et Saskatchewan Polytechnic, en partenariat avec La Cité universitaire francophone.
Photo : Avec l’autorisation de l’Université de Regina
La période d’inscription à l'option bilingue du programme collaboratif en sciences infirmières de l'université de Regina est ouverte. Alors qu’une 2e cohorte de sept élèves a fait sa rentrée cet automne, plusieurs s’inquiètent de l’examen national que les étudiants devront passer à la fin de leurs études. Dans le contexte actuel, l’existence même de programmes bilingues devient paradoxale.

Les inscriptions pour la 3e cohorte du Baccalauréat collaboratif en sciences infirmières de la Saskatchewan (SCBScN) sont ouvertes depuis le 1er octobre. À l’automne 2020, sept nouveaux élèves rejoindront les rangs du programme. Au bout de leurs quatre ans d’études, ils devront passer le très redouté NCLEX (National Council Licensing Examination).

Le NCLEX fait trembler bien des candidats. Déjà dans sa version anglaise, le test informatisé en fait baver plus d’un. Si plus de 80 % d’entre eux réussissent malgré tout au niveau national, le taux de réussite tombe de façon vertigineuse à 30 % pour les candidats en français, selon le rapport du Conseil canadien des organismes de réglementation de la profession infirmière.

« La traduction de l’anglais est un cauchemar, dénonce Lily Crist, élève infirmière et présidente de l’Alliance des femmes de la francophonie canadienne. C’est une source d’échec et de stress pour les élèves infirmières », estime-t-elle. Traduction approximative, ambiguïté des questions, manque de matériel pédagogique en français… « C’est à s’en arracher les cheveux », témoigne l’étudiante. Le NCLEX accumule les défauts au point de devenir un fardeau pour les candidats.

Un vrai paradoxe

Sans surprise, les élèves francophones s’éloignent de la version française. En Ontario, par exemple, tous les finissants de 2016 du programme en français de l’École des sciences infirmières de l’Université Laurentienne ont privilégié la version anglaise. Une vraie ironie quand on sait à quel point il est difficile d’obtenir des programmes en français.

En Saskatchewan, une étude de faisabilité publiée en 2013 indiquait que la province aurait dû disposer de 150 infirmières francophones ou bilingues, contre 70 dans les faits. D’ici 2025, il en faudra plus de 200 selon cette même étude. « Il y a un besoin criant », rejoint Francine Proulx-Kenzle, agente de liaison du programme bilingue de La Cité universitaire de Regina.

Le programme a vu le jour à l’automne 2018 en accueillant la première cohorte de sept étudiants. Les places sont limitées, mais l’espoir est grand : « On vient combler un besoin dans la communauté francophone. Quand on voit nos étudiants du secondaire en écoles francophones et d’immersion, quand on voit tout ce potentiel, avoir un programme comme celui-là est très viable », croit l’agente.

Toutes les provinces ne disposent pas de tels programmes. Lily Crist, qui vit en Colombie-Britannique, n’a le choix que d’étudier en anglais. Au moins, de son côté, les ressources abondent. Car en français, « à part des profs bienveillants, il n’y a pas grand-chose », déplore-t-elle. Aussi, ceux qui étudient les sciences infirmières en français doivent bien souvent se résoudre à opter pour la langue de la majorité. D’autant plus que le test coûte 500 dollars aux étudiants et qu’il ne peut être tenté que trois fois.

La situation semble bien paradoxale. Les étudiants en programmes bilingues ou francophones peuvent s’estimer chanceux, mais du même temps se retrouvent désavantagés. « Pourquoi poursuivre une formation en français si, en fin de compte, tu dois passer un test très rigide en anglais ? », s’interroge Francis LaBossière, président du réseau Santé en français au Manitoba. D’après lui, ce paradoxe pourrait même dissuader de potentiels étudiants de se former en français.

Un problème qui dure

Les critiques ne datent pas d’hier. Le nouvel examen vient en fait tout droit des États-Unis et remplace depuis 2015 le test national conçu initialement au Canada. L’objectif est d’avoir ici un test standardisé, commun à l’Amérique du Nord. Mais depuis son entrée en vigueur, les protestations pleuvent.

La situation a été portée devant les tribunaux à plusieurs reprises au pays. Au Nouveau-Brunswick, une plainte de plusieurs étudiants a mené la commissaire aux langues officielles Katherine d’Entremont à condamner l’Association des infirmières et infirmiers de la province pour avoir manqué d’outils de préparation en français, estimant que la Loi sur les langues officielles avait ainsi été bafouée. En août 2019, une nouvelle plainte a été déposée.

Peu de mesures pour le moment

Le Consortium national de formation en santé (CNFS) dit être conscient des problèmes. Pour répondre à la crise, l’organisme a mis en place un outil en ligne hébergé sur la plateforme de l’Université Laurentienne. « Une solution partielle qui ne représente qu’une infime partie de ce qui est disponible en anglais », concède Lynn Brouillette, présidente-directrice générale de l’Association des collèges et universités de la francophonie canadienne (ACUFC), à laquelle appartient le CNFS. De nouveaux fonds de Santé Canada sont en attente pour mettre à jour l’outil.

« L’arrivée de l’examen NCLEX a freiné et même renversé les avancées qui ont été réalisées depuis 20 ans en ce qui a trait à la promotion des études postsecondaires en français », soulève Lynn Brouillette. Cette dernière considère même le dossier comme un exemple des barrières et embûches dans l’accès des communautés francophones en situation minoritaire à la santé en français.

Les inscriptions pour l’option bilingue du programme en sciences infirmières de l'université de Regina sont ouvertes jusqu’au 15 février pour la rentrée de septembre 2020. Avant que des mesures concrètes ne soient prises, les étudiants les plus téméraires devront se confronter au redoutable NCLEX version française au bout de leurs quatre ans d’études.

Article précédent Une communauté dévouée pour son école
Prochain article École et descendance française : Les francophones doivent-ils se satisfaire du minimum?
Imprimer
27297

Lucas PilleriLucas Pilleri

Autres messages par Lucas Pilleri
Contacter l'auteur

Contacter l'auteur

x
Près de 16 000 ayants droit : un argument massue pour plus d’écoles fransaskoises

Près de 16 000 ayants droit : un argument massue pour plus d’écoles fransaskoises

En novembre dernier, Statistique Canada a révélé que près de 16 000 jeunes Saskatchewanais étaient admissibles à l’instruction en français en 2021. Pourtant, seulement 2 000 élèves fréquentent les écoles francophones de la province. Des personnalités de la communauté réagissent.

25 janvier 2023/Auteur: Anne-Hélène Mai – IJL-Réseau.Presse/Nombre de vues (4715)/Commentaires (0)/
Francis Kasongo, un pilier de l’éducation en français

Francis Kasongo, un pilier de l’éducation en français

Le 9 novembre, lors du congrès national du Réseau des cégeps et collèges francophones du Canada (RCCFC) à Montréal, le directeur général du Collège Mathieu Francis Kasongo a reçu le prix Pilier collégial francophone. Cette distinction vient ainsi souligner son travail pour le développement de l’éducation postsecondaire collégiale en français en Saskatchewan. Le fier récipiendaire revient sur son engagement.

25 novembre 2022/Auteur: Lucas Pilleri/Nombre de vues (4608)/Commentaires (0)/
Des bibliothèques communautaires à Regina

Des bibliothèques communautaires à Regina

Dans le cadre de la rentrée des classes, l’Association communautaire fransaskoise de Regina (ACFR), en partenariat avec le Conseil des écoles fransaskoises (CÉF), a dévoilé trois bibliothèques communautaires extérieures. L’objectif : favoriser le partage de livres et encourager à la lecture en français.

18 octobre 2022/Auteur: Marie-Lou Bernatchez – IJL-Réseau.Presse/Nombre de vues (4762)/Commentaires (0)/
Le Conseil culturel fransaskois plus près des écoles

Le Conseil culturel fransaskois plus près des écoles

En cette période de rentrée, le Conseil culturel fransaskois (CCF) veut resserrer ses liens avec le secteur scolaire. 

29 septembre 2022/Auteur: Leanne Tremblay – IJL-Réseau.Presse/Nombre de vues (4307)/Commentaires (0)/
Collège Mathieu : une nouvelle Charte pour une nouvelle ère

Collège Mathieu : une nouvelle Charte pour une nouvelle ère

Une nouvelle époque s’ouvre pour le Collège Mathieu qui vient de renouveler sa charte le 17 août. Alors que l’Église catholique ne sera plus représentée dans le conseil d’administration de l’établissement, la nouvelle loi veut faire plus de place à la jeunesse et aux femmes, ainsi qu’à certaines compétences clés. 

1 septembre 2022/Auteur: Mehdi Mehenni – IJL-Réseau.Presse/Nombre de vues (3698)/Commentaires (0)/
Le fédéral assure défendre les droits des Fransaskois

Le fédéral assure défendre les droits des Fransaskois

Mehdi Mehenni – IJL-Réseau.Presse La ministre des Langues officielles et ministre responsable de l’Agence de promotion économique du Canada atlantique, Ginette Petitpas Taylor, était en visite le 29 juillet à Regina dans la cadre des consultations pancanadiennes sur les langues officielles entamées en mai dernier. Une visite durant laquelle une annonce de 7,1 millions de dollars a été faite au profit de la Cité universitaire francophone de l’Université de Regina et du Collège Mathieu.

En évoquant le projet de Loi sur les langues officielles, toujours en cours d’adoption au Parlement, Ginette Petitpas Taylor souligne l’engagement du fédéral à s’assurer que, à l’échelle provinciale, les communautés de langues officielles en situation minoritaire « reçoivent les services et droits nécessaires pour continuer à vivre et à travailler dans leur langue maternelle ».  

12 août 2022/Auteur: Mehdi Mehenni – IJL-Réseau.Presse /Nombre de vues (3204)/Commentaires (0)/
7,1 millions de dollars pour le postsecondaire fransaskois

7,1 millions de dollars pour le postsecondaire fransaskois

La Cité universitaire francophone de l’Université de Regina et le Collège Mathieu viennent de bénéficier d’un budget de plus de 7,1 millions de dollars pour la construction, la rénovation et le développement d’espaces éducatifs postsecondaires, mais aussi pour accroître l’offre de programmes qui desservent les communautés de langue officielle en situation minoritaire.

29 juillet 2022/Auteur: Mehdi Mehenni – IJL-Réseau.Presse/Nombre de vues (3796)/Commentaires (0)/
Café le Réseau : les élèves aux manettes derrière le comptoir

Café le Réseau : les élèves aux manettes derrière le comptoir

Depuis le 8 juin, le Café le Réseau a ouvert ses portes au sein même de l’école Monseigneur de Laval. Se voulant un lieu de rencontre, l’établissement est une initiative 100 % étudiante qui fait la fierté des jeunes et de leurs enseignants, et le bonheur des clients.

2 juillet 2022/Auteur: Lucas Pilleri – IJL-Réseau.Presse/Nombre de vues (2631)/Commentaires (0)/
Joe Poirier: Une passion pour la fransaskoisie récompensée

Joe Poirier: Une passion pour la fransaskoisie récompensée

Joseph, dit Joe, Poirier a passé sa vie à défendre la cause fransaskoise. À 78 ans, il est récompensé pour ce dévouement en recevant, en avril dernier à Ottawa, la Médaille du souverain pour les bénévoles des mains de la gouverneure générale du Canada Mary Simon.

13 mai 2022/Auteur: Marie-Lou Bernatchez – IJL-Réseau.Presse/Nombre de vues (4495)/Commentaires (0)/
La francophonie entre privilèges et marginalisations

La francophonie entre privilèges et marginalisations

Les chercheurs et membres des communautés francophones de l’Ouest et du Canada se sont rassemblés de manière virtuelle dans le cadre du colloque du Centre d’études franco-canadiennes de l’Ouest, organisé par La Cité universitaire francophone de l’Université de Régina.

6 avril 2022/Auteur: Marie-Lou Bernatchez/Nombre de vues (4786)/Commentaires (0)/
L’enseignement en français au cœur des débats

L’enseignement en français au cœur des débats

Les collèges et universités francophones en milieu minoritaire font face à d’importants défis partout au Canada.

1 mars 2022/Auteur: Marie-Lou Bernatchez – IJL-Réseau.Presse/Nombre de vues (6446)/Commentaires (0)/
Les faibles taux de rétention, revers de la médaille en immersion

Les faibles taux de rétention, revers de la médaille en immersion

Les programmes d’immersion ont augmenté dans les vingt dernières années, mais moins de la moitié des élèves restent jusqu’à l’obtention de leur diplôme.

10 février 2022/Auteur: Ericka Muzzo – Francopresse /Nombre de vues (5356)/Commentaires (0)/
Postsecondaire dans l'Ouest: la demande dépasse l’offre

Postsecondaire dans l'Ouest: la demande dépasse l’offre

Dans l’Ouest canadien, la demande pour des programmes en français est plus élevée que l’offre des établissements postsecondaires. C'est ce qui ressort des États généraux sur le postsecondaire en contexte francophone minoritaire.

8 février 2022/Auteur: Marianne Dépelteau – Francopresse/Nombre de vues (5944)/Commentaires (0)/
La francophonie, parent pauvre du postsecondaire

La francophonie, parent pauvre du postsecondaire

L’égalité est loin d’être atteinte entre les établissements postsecondaires francophones et ceux de la majorité anglophone. 

25 janvier 2022/Auteur: Francopresse/Nombre de vues (5794)/Commentaires (0)/
Revue de l'année 2021 - Éducation

Revue de l'année 2021 - Éducation

Survol de l'actualité fransaskoise durant l'année 2021 dans le domaine de l'éducation.

14 janvier 2022/Auteur: Lucas Pilleri/Nombre de vues (6240)/Commentaires (0)/
RSS
135678910Dernière

 - mardi 23 avril 2024