Skip Navigation

Les enjeux de la protection du lait

Le Manitobain Louis Balcaen, en 1991

Le Manitobain Louis Balcaen, en 1991

Photo : Société historique de Saint-Boniface
Président de la Fédération des producteurs laitiers du Canada de 1994 à 1996 et de la Commission canadienne du lait de 1996 à 2006, le Manitobain Louis Balcaen offre sa perspective sur les négociations qui a eu lieu entre le Canada et les États-Unis.

Notez que l’entretien avec M. Balcaen s’est déroulé quelques jours avant que le gouvernement Trudeau ait permis une brèche dans le système de gestion de l’offre. Ce système instauré en 1972 par le gouvernement canadien, rappelons-le, gère la production de lait, de volaille et d’œufs au Canada, et par un processus de quotas et de limitation d’importation, ce système stabilise les prix et contrôle la concurrence internationale. À l’issue des récentes négociations, Ottawa a donc accepté d’ouvrir jusqu’à 3,59 % de ce marché aux produits américains. Trudeau a promis de dédommager les producteurs canadiens pour les pertes qu’ils subiront par cette ouverture.

Les négociations sur l’ALÉNA achoppent notamment sur la question de la gestion de l’offre du lait au Canada…
Louis Balcaen : En effet. Le président Trump a tourné le monde des ententes canado-américaines à l’envers. L’agressivité américaine de 2018 n’existait pas lorsque je participais, en 1986 et 1987, aux négociations qui ont conduit au premier accord de libre-échange. Ou encore au début des années 1990, quand le Mexique négociait son entrée dans ce qui allait devenir l’ALÉNA.

Qu’est-ce qui a changé ?
L. B. : À la fin des années 1980, les Américains avaient essentiellement accepté que le Canada allait maintenir la gestion de l’offre sur ses produits laitiers. Je siégeais déjà à l’exécutif de la Fédération des producteurs laitiers. Notre président, Jim Waadenberg, et Simon Reisman, le négociateur principal du Canada, avaient pu négocier l’entente dans un climat serein. En 2018, la résistance américaine à la gestion de l’offre est beaucoup plus forte. Entre autres parce que la technologie de l’industrie laitière a évolué. De nos jours, on peut extraire des protéines du lait. Ces protéines sont utilisées par les transformateurs de lait dans la préparation du yogourt et d’autres aliments. Le problème c’est que ces nouveaux produits ne sont pas soumis aux tarifs douaniers.

Effectivement, cette nouvelle possibilité change la donne…
L. B. : Oui, parce que les Américains se sont mis à vendre leurs protéines de lait au Canada. Pour leur faire compétition, les producteurs laitiers canadiens se sont mis à vendre leurs protéines aux transformateurs canadiens au même prix que les Américains, et donc bien au-dessous de leur coût de production. Pour les Américains, il s’agit d’une subvention croisée, c’est-à-dire que les Canadiens peuvent vendre leurs protéines à bon marché chez nous uniquement parce le reste de leur production est protégée par des tarifs. C’est la base du grief américain.

Revenons sur la gestion de l’offre…
L. B. : Essentiellement, c’est un système qui crée des quotas pour les producteurs laitiers. Sa force est qu’elle stabilise le marché canadien. Les producteurs canadiens produisent la quantité de lait qui répond au marché canadien. La production est ainsi contrôlée. L’importation de produits laitiers étrangers aussi. La production et l’importation du lait sont contrôlées par des lois fédérales et provinciales. Par contre, s’il y a un surplus de lait, les Canadiens sont obligés de le vendre au marché international. C’est leur responsabilité.

Ce système est très populaire chez les producteurs…
L. B. : Le lobby des producteurs laitiers est très bien organisé. Au point où le Globe and Mail l’a récemment désigné comme le plus important groupe de lobby du pays. Il comprend non seulement les producteurs laitiers, mais les producteurs d’œufs, de poulet à frire, de dinde et les éleveurs de poules qui produisent les œufs. Il s’avère donc politiquement difficile de démanteler le système de la gestion de l’offre. Voire même impossible.

À votre avis, quel pourrait être le résultat des négociations en cours ?
L. B. : J’ai confiance que la gestion de l’offre au Canada sera maintenue. Après tout, l’industrie laitière, qui comprend non seulement la production du lait, mais aussi sa transformation et le transport des produits, génère 20 milliards $ annuellement. Et en parlant politique, il faut surtout être très conscient que 40 % du lait canadien est produit au Québec. Et 35 % est produit en Ontario. Faites le calcul. Pour le Canada central, c’est un secteur d’activité clé.

Mais le Canada pourrait tout de même envisager quelques concessions aux Américains…
L. B. : Je crois que oui. 10 % du lait produit au Canada est vendu sur le marché international. Une possibilité est que le Canada réduise son exportation de 3 % ou 4 %. Lorsque le Canada négociait l’Accord [de partenariat] transpacifique signé en 2016, il a concédé une part de 3 %. Les Américains vont peut-être vouloir exiger la même concession.

Ce qui ne plairait pas aux producteurs canadiens…
L. B. : C’est vrai. D’autant plus qu’en 2016, le Canada avait déjà concédé 3 % du marché international en signant l’Accord [économique et commercial global] Canada-Union européenne. Pour les producteurs canadiens, ces concessions pourraient à la longue s’avérer une mort lente. Parce que le prix moyen du lait canadien diminue avec chaque concession.

Les Américains pourraient-ils implanter leur propre système de gestion de l’offre du lait ?
L. B. : Ce ne serait pas évident, surtout pour des raisons idéologiques. C’est contre leur psyché collective. Parfois, quand les prix américains sont bas, les producteurs américains, notamment ceux du Wisconsin, réclament la gestion de l’offre. Mais dès que le prix augmente, ils redeviennent contre. Fondamentalement, les Américains veulent un marché libre, sans aucune contrainte. À Washington, lorsque les producteurs du Wisconsin réclamaient la gestion de l’offre, un sous-ministre de l’agriculteur m’a déclaré : « Tant pis. Ils ne l’auront pas. Et j’ai connu un producteur américain qui m’a lancé : « Je vais mourir pauvre, mais au moins je vais mourir libre. »

Pourtant, certains secteurs de l’économie américaine sont protégés…
L. B. : C’est vrai. Malgré le fait que les Américains se dressent contre les contrôles et les ingérences gouvernementales, leurs systèmes de la gestion de l’offre du sucre et du coton sont tout aussi solidement implantés que le nôtre.

Imprimer
17879

Daniel Bahuaud (La Liberté)Webmestre

Autres messages par Daniel Bahuaud (La Liberté)
Contacter l'auteur

Contacter l'auteur

x
Omnium de volleyball

Omnium de volleyball

Un projet de l'AJF et du CÉF

C’est sous le signe de la fraternité que s’est déroulé l’Omnium fransaskois de volleyball au centre Henk Ruys à Saskatoon les 8 et 9 octobre derniers.  Quelque 483 élèves des écoles du Conseil des écoles fransaskoises (CÉF) des quatre coins de la province se sont amusés en y participant.  

16 octobre 2014/Auteur: Alexandre Daubisse (EV)/Nombre de vues (34561)/Commentaires (0)/
Le Lien: Un centre de ressources francophones provincial

Le Lien: Un centre de ressources francophones provincial

Une mine de ressources à une distance de clic

Créé en 1986, le Lien est un centre de ressources culturelles et pédagogiques en français. Il dessert les francophones et francophiles de la Saskatchewan et de l’Ouest canadien. Seul centre francophone de prestation de services, le Lien met gratuitement à la disposition de ses usagers 42 000 titres soit 70 000 ressources sous forme de livres, de films (DVD, VHS), de CDs et propose l’accès à du matériel audiovisuel.

15 octobre 2014/Auteur: Alexandre Daubisse (EV)/Nombre de vues (26323)/Commentaires (0)/
Nicole Lemire:  De Nipawin à Edmonton, en passant par Prince Albert

Nicole Lemire: De Nipawin à Edmonton, en passant par Prince Albert

Chaque année, des milliers d’étudiants en 12e année sont confrontés à la même question : qu’est-ce qu’ils feront après l’obtention de leur diplôme : amorcer des études collégiales ou universitaires, aller directement sur le marché du travail ou prendre une pause d’études?

 

9 octobre 2014/Auteur: Étienne Alary/Nombre de vues (27394)/Commentaires (0)/

Nicole Dupuis, enseignante en école d’immersion à Estevan

Ceux qui choisissent le métier d’enseignant doivent être prêts à aimer leurs élèves, être capables de collaborer avec leurs collègues et prêts à appuyer les parents.

9 octobre 2014/Auteur: Alexandra Drame (EV)/Nombre de vues (31173)/Commentaires (0)/
Yves St-Maurice réélu à la présidence de l’ACELF

Yves St-Maurice réélu à la présidence de l’ACELF

Lors de l’assemblée annuelle tenue à Halifax, le 27 septembre dernier, les membres de l’Association canadienne d’éducation de langue française (ACELF) ont réélu M. Yves St-Maurice à la présidence de l’association pour un quatrième mandat consécutif. 

9 octobre 2014/Auteur: L'Eau vive/Nombre de vues (30141)/Commentaires (0)/
Français pour l’avenir:  Plus de 200 000 $ de bourses à gagner!

Français pour l’avenir: Plus de 200 000 $ de bourses à gagner!

10e édition du Concours national de rédaction

Le français pour l’avenir lance la 10e édition du Concours national de rédaction pour les élèves de la 10e à la 12e année.

2014-12-19 23:00 - 23:30/Auteur: L'Eau vive/Nombre de vues (12976)/Commentaires (0)/
Institut français: Des initiatives pour favoriser la réussite des étudiants

Institut français: Des initiatives pour favoriser la réussite des étudiants

Services de mentorats et tutorats

Depuis le début de l’année universitaire, l’Institut français, sous la supervision de Ariadna Sachdeva, Conseillère et coordonnatrice des programmes crédités et des services aux étudiants, a mis en place un programme de mentorat.

9 octobre 2014/Auteur: Alexandre Daubisse (EV)/Nombre de vues (25817)/Commentaires (0)/
Hausse des inscriptions dans les écoles francophones de l'Ontario et de l'Ouest

Hausse des inscriptions dans les écoles francophones de l'Ontario et de l'Ouest

Les écoles fransaskoises connaissent la deuxième plus forte hausse au pays

La tendance nationale des inscriptions dans les écoles francophones est positive. Mais pas dans toutes les provinces, où se profilent d’importants défis pour l’avenir. Le 24e Congrès de la Fédération nationale des conseils scolaires francophones (FNCSF) fera le point. 

3 octobre 2014/Auteur: Lucien Chaput (Francopresse)/Nombre de vues (23249)/Commentaires (0)/
Programmation du Collège Mathieu 2014-15

Programmation du Collège Mathieu 2014-15

L'institution fransaskoise s’affirme comme l’un des acteurs majeurs du post-secondaire francophone en Saskatchewan.

Petit à petit, à force de travail et au fil du temps, le Collège Mathieu, sous la direction générale de Francis Kasongo, s’affirme de plus en plus comme l’un des acteurs majeurs, avec l’Institut français, du dossier du post-secondaire francophone en Saskatchewan.

2 octobre 2014/Auteur: Alexandre Daubisse (EV)/Nombre de vues (26382)/Commentaires (0)/
Les choses bougent à l’Institut français

Les choses bougent à l’Institut français

 Deux mois et demi après sa prise de fonction à la direction de l’Institut français, Sophie Bouffard peut déjà se prévaloir d’un bilan honorable.

2 octobre 2014/Auteur: Alexandre Daubisse (EV)/Nombre de vues (27402)/Commentaires (0)/
Êtes-vous business?

Êtes-vous business?

Le sujet de cette première formation d'une série de quatre, animée par le conseiller en développement économique Ildephonse Bigirimana, était l’acquisition d’une franchise. 

2 octobre 2014/Auteur: Marie-Pier Boilard/Nombre de vues (38789)/Commentaires (0)/
Le CÉF et l’Eau Vive font équipe pour soutenir les initiatives des conseils écoles

Le CÉF et l’Eau Vive font équipe pour soutenir les initiatives des conseils écoles

Le Conseil des écoles fransaskoises (CÉF) et la Coopérative des publications fransaskoises (CPF) lancent une campagne d’aide au financement de projets scolaires par vente d’abonnements au journal l’Eau Vive

2 octobre 2014/Auteur: Conseil des écoles fransaskoises/Nombre de vues (26023)/Commentaires (0)/
L’université francophone ontarienne pour 2025?

L’université francophone ontarienne pour 2025?

Gouverne ontarienne, mission canadienne

Le Sommet provincial des États généraux sur le postsecondaire en Ontario français, du 3 au 5 octobre à Toronto, promet de franchir une étape clé dans la création d’une université franco-ontarienne. Un projet qui dépasserait les frontières provinciales.

28 septembre 2014/Auteur: Louis-Marie Achille (Francopresse)/Nombre de vues (22796)/Commentaires (0)/

Rencontre avec Miles Muri, directeur des écoles Sans-Frontière et Père Mercure

M. Miles Muri travaille pour le Conseil des écoles fransaskoises (CÉF). Il a été directeur de l’École secondaire Collège Mathieu à Gravelbourg puis directeur du Centre d’éducation virtuelle et d’innovation (CÉVI) pendant un an avant de devenir directeur des écoles Père Mercure et Sans-Frontières.

18 septembre 2014/Auteur: Alexandre Daubisse (EV)/Nombre de vues (24138)/Commentaires (0)/
Pour une solution à long terme

Pour une solution à long terme

Le CSF et le jugement de la Cour du banc de la reine

Le 19 août dernier, le juge Brian A. Barrington-Foote de la Cour du Banc de la Reine a ordonné au gouvernement de la Saskatchewan de payer la somme de 500 000 $ au Conseil scolaire fransaskois (CSF) qui réclamait 5,2 M $.

18 septembre 2014/Auteur: Jean-Pierre Picard/Nombre de vues (25193)/Commentaires (0)/
RSS
Première2223242527293031Dernière

 - mercredi 22 mai 2024