Réseau Santé : Frédérique Baudemont quitte la barre
Directrice générale du Réseau Santé en français de la Saskatchewan (RSFS) depuis septembre 2017, Frédérique Baudemont quittera ses fonctions le 31 août. Impliquée dans la communauté fransaskoise depuis plus de trente ans, la femme dévouée à l’avancement du fait français compte désormais mettre son expérience à profit d’une autre manière.
Pourquoi quittez-vous le RSFS ?
Ce n’est pas une décision soudaine, j’y pense depuis un an ou deux. J’ai passé la soixantaine et j’ai envie de ralentir un peu le rythme. À un poste de direction générale, on travaille sur tous les dossiers, on est impliqué partout et à un moment donné on n’a plus nécessairement la même énergie.
Que ferez-vous après votre départ ?
J’ai l’intention de continuer mes activités à travers une petite entreprise de consultation. C’est comme ça que je vois les prochaines années. Avec l’intention de ne pas travailler douze mois par année ! Mon but est de travailler à un rythme que je choisis.
Vous continuerez donc de mettre à profit votre expérience ?
J’ai plus de 30 ans d’expérience dans la communauté francophone, j’ai travaillé dans différents secteurs, beaucoup comme coordonnatrice d’activités, j’ai un champ de compétences acquises au cours des années que je peux partager autrement.
Votre départ est-il un coup dur pour le RSFS ?
C’est toujours le défi dans la communauté : les gens ne sont pas toujours faciles à remplacer. Et ça prend quelques mois pour s’approprier les dossiers. J’aiderai au maximum à ce niveau-là. Je ne veux pas partir du jour au lendemain et dire que c’est fini. Appuyer le Réseau pendant la transition avec la nouvelle direction, ça va être ma priorité numéro un.
Resterez-vous impliquée au niveau de la communauté ?
J’ai toujours eu des activités bénévoles en même temps qu’être employée du milieu communautaire. Je n’ai pas l’intention d’arrêter. La communauté fransaskoise, c’est une deuxième famille. Je ne décrocherai pas !
Que retenez-vous de ces cinq années passées à la tête du RSFS ?
Une des choses que j’ai particulièrement aimées, c’est l’approche collaborative. Le Réseau n’est pas un fournisseur de services de santé, mais on travaille avec tous les partenaires pour avoir davantage de services en français : le système de santé majoritaire, les gouvernements, les universités qui forment des futurs professionnels de la santé, les professionnels de la santé et la communauté. J’aime ça ! J’aime l’approche du travail en synergie.
Quelle collaboration existe-t-il entre le RSFS et les autres organismes fransaskois ?
On s’est rapprochés de plusieurs organismes pour offrir des ressources dans certains domaines. Par exemple, pour tout ce qui touche à la petite enfance, on travaille de plus près avec l’APF [Association des parents fransaskois] et le SAIF-SK [Service d’accueil et d’inclusion francophone].
On a signé à l’automne une entente pour former leurs employés à devenir accompagnateurs de santé. L’idée est d’accompagner les patients pour contourner la barrière de la langue : assurer la traduction dans les cabinets et accompagner les patients avant et après les rendez-vous.
Au niveau du dossier de l’immigration, on a créé le Comité santé-immigration l’année dernière, composé des organismes qui interviennent à des niveaux différents de l’immigration, comme la CAFS [Communauté des Africains francophones], le SAIF et le CÉCS [Conseil économique et coopératif]. Ça nous a permis d’identifier des formations qui seraient utiles aux intervenants pour les nouveaux arrivants qui ont des préoccupations au niveau de la santé.
Êtes-vous confiante pour l’avenir des services de santé en français dans la province ?
Ces dernières années, le Réseau travaille de beaucoup plus près avec l’Autorité de santé provinciale et le ministère de la Santé.
On a rencontré très récemment le nouveau PDG de l’Autorité de santé et on a senti qu’il y avait une volonté de continuer de travailler avec nous pour sensibiliser le système de santé à l’offre active de services de santé en français.
En ce moment, l’Autorité de santé travaille à identifier la capacité bilingue de ses employés pour voir où on pourrait offrir des services en français. C’est un beau progrès. Malheureusement, la COVID a ralenti les choses, mais on sent qu’il y a une volonté de travailler dans cette direction. Je suis optimiste pour l’avenir.
Selon vous, quel sera le principal défi à relever pour l’avenir des services de santé en français ?
Le défi principal, c’est qu’on n’a pas de loi sur les langues officielles, donc pas d’obligation en santé. Ça reste un mandat provincial, donc on avance à petits pas. C’est difficile d’avoir une approche globale sur le dossier de la santé sans loi. Et on n’est pas près d’en avoir une !
On espère toujours un changement à la Loi sur les langues officielles : on voudrait qu’il y ait des clauses linguistiques dans les ententes fédéral-provincial au niveau des transferts de fonds, mais je ne pense pas qu’on y arrive.
En quoi le manque de services de santé en français est-il dommageable d’après vous ?
Ce n’est pas évident à vivre. Je pense par exemple à la clientèle des aînés, car on a une population vieillissante, et on se rend compte que pour les gens qui ont vécu en anglais pendant bien des années c’est la langue maternelle qui revient quand ils vieillissent et ont des problèmes de démence.
Je pense aussi à la clientèle des nouveaux arrivants. Les gens arrivent parfois avec des traumatismes pas évidents et en plus le système de santé est complètement différent. Même si on parle anglais, on ne peut pas toujours expliquer de la même façon son problème qu’en français.
Un dernier mot ?
Travailler au Réseau a été une belle expérience. Je suis assez contente de finir ma carrière de salariée avec le Réseau. C’est vraiment un organisme reconnu pour son professionnalisme et son approche collaborative. Et on a une belle équipe.
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Lucas Pilleri
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