Close

Actualité économique

Réjean Paulin

Le ciel anglais d’Air Canada

Le commissaire Fraser fait le point sur le bilinguisme à Air Canada
Commençons par le plancher des vaches avant le décollage.

Parcourir le territoire canadien nous conduira dans des contrées où le français sera muet. Mais on verra aussi des coins de pays où on parlera notre langue le plus naturellement du monde en mettant le pied dehors. Les enfants l’habilleront de leurs cris dans les parcs, on dira « bonjour » au chauffeur d’autobus, on commandera un « café avec un lait »… Possible et courant dans plusieurs régions du Canada.

Presque tous les francophones qui ont parcouru le pays ont vu ces deux états, en anglais plus souvent qu’en français bien sûr. Normal. L’anglais occupe la plus grande partie du territoire.

N’empêche qu’au niveau du sol, le Canada est parfois résolument francophone entre voisins, à l’école, au supermarché, dans son paysage… En avion… Oups ! Arrêtons-là l’énumération. Air Canada dispose d’une formule capable d’effacer le français de nos ciels les plus bleus. Le commissaire aux langues officielles vient d’en faire la démonstration.

Notre transporteur aérien n’a en effet jamais quitté le peloton de tête des délinquants du bilinguisme. Graham Fraser vient de déposer un rapport spécial au Parlement sur ce triste accomplissement. Mesure exceptionnelle, ce n’est que le deuxième rapport spécial au Parlement en un demi-siècle de bilinguisme au pays.

Le commissaire prend cette initiative parce qu’il a épuisé tous ses recours. De Keith Spicer à Dyane Adam, tous ses prédécesseurs ont eu maille à partir avec Air Canada. Le trait rouge dans chaque rapport annuel, l’incessant traitement des plaintes répétées, poursuite devant les tribunaux, rien n’y a fait.

On peut sortir de chez soi à Caraquet en Acadie ou à Hearst dans le Nord de l’Ontario, en disant bonjour en français à son voisin avant de se rendre à l’aéroport le plus proche en partance pour Montréal. Dans l’esprit du voyageur, la vie est alors française de son patelin jusqu’à sa destination. Je dis bien « dans l’esprit », car dans les faits, notre transporteur national arrivera à nous faire oublier qu’on plane au dessus des Laurentides, des Appalaches, des Cantons de l’Est… Bref, quitter le sol aura suffi à faire taire le français.

J’exagère ? Pas tu tout. Un agent de bord n’a pas offert de service dans la langue de Molière lors d’un vol en partance de Montréal pour… tenez-vous bien, Rouyn-Noranda ! Mesures de sécurité, sorties de secours, vestes de sauvetage etc., tout en anglais seulement.

Le 31 janvier 2015, un passager voulait être servi en français entre Francfort et Montréal. On lui a répondu qu’on volait sur Air Canada et non sur Air Québec. Va pour la courtoisie… Des voyageurs en partance d’Ottawa et de Moncton, toujours pour la plus grande ville française d’Amérique, ont aussi vécu pareils désagréments.

Je me souviens de la Trans Canada Air Lines (TCA), société d’état dans les années 60. Le Viscount, maintenant pièce de musée, était à l’époque un « gros » avion, un quadrimoteur équipé de puissants et révolutionnaires turbo propulseurs. J’appelais ça des hélices à quatre lames. La pale ne faisait pas encore partie de mon vocabulaire.

C’était à l’époque de la Commission Laurendeau-Dunton sur le bilinguisme et le biculturalisme, avant la Loi sur les langues officielles, avant les plus modernes et efficaces Airbus, Boeing 777 et autres modèles moins polluants et moins bruyants… Aussi avant l’appellation Air Canada, ce vocable à l’aise dans nos deux langues.

L’aviation a évolué, mais on peut se demander si la mentalité du transporteur n’est pas restée fidèle à l’ère de la Trans Canada Air Lines. 

À la tour de contrôle, la ministre du Patrimoine a dit aux Communes qu’elle allait étudier les recommandations du rapport spécial. Graham Fraser demande une loi. Il y aura étude en comité, dépôt d’un rapport et peut-être une loi. Le décollage, si décollage il y a, nécessitera une longue piste. 

 

Imprimer
21782

Réjean PaulinRéjean Paulin

Autres messages par Réjean Paulin
Contacter l'auteur

Comments are only visible to subscribers.

Contacter l'auteur

x
Conseil économique et coopératif de la Saskatchewan

Le CÉCS sur Facebook

Nouvelles du CÉCS

Découvrons nos communautés avec Canada 150!

Vendredi le 25 novembre dernier avait lieu l’annonce officielle des projets du 150e par l’Honorable Ralph Goodale. En effet, le projet «Découvrons nos communautés avec le Canada 150» du CÉCS a été sélectionné parmi les projets communautaires financés du Canada 150. Tout au long de l’année 2017, le CÉCS s’engage à collaborer avec les communautés dans le but de créer 150 nouvelles géocaches bilingues partout à travers la...

Forum économique 2016: revoyez quelques présentations

Vous avez été nombreux à participer à notre forum économique, l’Agriculture et l’agroalimentaire: de la terre à la table, en octobre dernier. Nous avons eu la chance d’avoir des conférenciers spécialisés qui se sont entretenus sur des sujets diversifiés s’adressant à tous. Vous avez maintenant la possibilité de revoir quelques présentations de ce Forum. Merci à tous les participants! 

Le CÉCS à Destination Canada

Destination Canada, c’est bientôt, et pour une première fois, le CÉCS participera à Destination Canada! En effet, Robert Therrien, directeur général, ainsi que Clément Dion de Zenon Park, membre du conseil d’administration, seront à Paris et Bruxelles du 15 au 19 novembre prochain afin d’assister à un des plus gros salons francophones de l’emploi. Destination Canada est un salon de l’emploi présenté par l’Ambassade du Canada en France avec le...
RSS
Première1516171820222324Dernière
Conditions d'utilisationDéclaration de confidentialité© Copyright 2024 Journal L'Eau Vive. Tous les droits sont réservés.
Back To Top