Immigration francophone: un nouveau rapport suscite des réactions
REGINA - Le rapport Reconnaître le secteur informel - L’accueil des immigrants francophones en Saskatchewan par les immigrants établis a suscité de nombreuses questions et réactions lors de son lancement le 16 octobre dernier à la Rotonde de la Cité universitaire francophone de Regina.
Devant une faible audience d’une dizaine de personnes, les docteurs Jérôme Melançon et Michael Akinpelu de l’Université de Regina ont présenté la version abrégée de leur long rapport. Ce dernier est le produit final d’une étude de trois ans commandée par la Communauté des Africains francophones de la Saskatchewan (CAFS), subventionnée par les Voies vers la prospérité, une alliance promouvant l’intégration des immigrants au Canada.
Fulgence Ndagijimana, directeur général de la CAFS, explique la motivation de son organisme : « Ce rapport a été commandé pour comprendre les difficultés des nouveaux immigrants francophones. Je trouve que c’est un très bon rapport, il y a quand même 141 pages, c’est très détaillé. Il y a beaucoup de pistes de collaboration avec d’autres organismes. »
La présentation a duré un peu moins d’une heure et a mis en lumière les résultats principaux de l’étude. La CAFS cherche à mieux comprendre le profil des immigrants francophones de la Saskatchewan, ainsi qu’à mieux cerner leurs besoins pour mieux les accompagner dans leur processus d’inclusion. La deuxième partie de la soirée a été consacrée aux questions et commentaires dans la salle et via Facebook Live.
Confusion autour du thème de la soirée
Le titre de la conférence, « Comment mieux accueillir les nouveaux arrivants en Saskatchewan », a créé la confusion chez certains participants. Plusieurs espéraient y trouver des réponses concrètes à leurs besoins d’intégration. À la place, ils ont été informés sur les grands enjeux des organismes.
Sébastien Durand, arrivé à Regina il y a un an depuis la France, fait partie des déçus : « Je m’attendais à avoir des réponses à mes questions d’intégration à la communauté en partageant des activités, des personnes qu’il faut contacter pour s’inscrire à des groupes francophones de sport, par exemple. C’était ma principale interrogation. »
Le jeune homme est reparti perplexe. « J’ai peut-être mal lu le dépliant, mais je n’avais pas compris que c’était une étude de la CAFS. Ça a beaucoup tourné autour de comment la CAFS interagit avec les autres organismes fransaskois. On aurait pu avoir un organigramme pour voir quels sont les organismes francophones et qui je ferais mieux d’aller voir pour répondre à mes questions. »
Secteur formel ou informel ?
De nombreuses recommandations, quinze au total, sont ressorties du rapport. La première d’entre elles : la CAFS devrait être mieux reconnue et mieux financée en tant qu’organisme informel. À cet égard, les chercheurs ont proposé que le Réseau en immigration francophone de la Saskatchewan (RIF-SK) joue un rôle dans la reconnaissance du travail de la CAFS et de ses bénévoles au sein de la communauté.
Marie Galophe, coordonnatrice au RIF-SK, a réagi à la proposition des chercheurs : « Plusieurs des recommandations sont déjà en cours de réalisation et le RIF-SK témoigne ainsi de sa réactivité et de sa plasticité pour répondre aux changements émanant du terrain. Nous sommes en permanence en train de nous ajuster aux réalités des nouveaux immigrants et des autres organismes », soutient-elle.
Le secteur informel désigne les organismes qui ne reçoivent pas de financement gouvernemental. Il s’agit par exemple du Réseau Santé en français de la Saskatchewan (RSFS), de l’Association des juristes (AJEFS), de l’Association jeunesse (AJF), de l’Association canadienne-française de Regina (ACFR) et de la CAFS. À l’inverse, l’Assemblée communautaire fransaskoise (ACF), le Conseil économique et coopératif (CÉCS) et le RIF-SK font partie du secteur formel, puisqu’ils reçoivent des subventions du gouvernement fédéral pour offrir leurs services.
Les deux secteurs sont complémentaires pour Renord Nsekera, arrivé à Regina depuis le Burundi en 2015 avec sa femme et ses quatre enfants. Pour lui, l’ACF et la CAFS, soit un organisme formel et un autre informel, se sont complétés pour faciliter son intégration. Celui qui est aujourd’hui agent de développement à l’AJEFS a reçu un accompagnement de l’ACF dès l’aéroport. « Ils m’ont aidé à trouver un logement avant mon arrivée, j’ai été mis en contact avec un conseiller en emploi et établissement, j’ai suivi un atelier pour la création de mon CV. »
En parallèle, le nouvel arrivant a bénéficié de l’expérience et des conseils des bénévoles de la CAFS, eux-mêmes d’anciens immigrants. « Ils nous ont aidés pour les voyages, le magasinage et toutes les autres informations supplémentaires. Ça offre un côté encore plus humain, ils connaissent certaines de nos réalités et ont souvent la même culture et la même langue que nous. »
Un organisme dédié
Le rapport propose également la création d’un organisme dévoué exclusivement aux services d’immigration afin de rassembler ceux de l’ACF, du CÉCS et d’autres organismes du secteur informel. Justement, un Service d’aide à l’immigration francophone (SAIF-SK) devrait voir le jour en novembre, la décision ayant été adoptée lors de la 107e rencontre des députés communautaires le 5 octobre dernier. L’ACF cède ainsi le dossier immigration, mais chapeautera la nouvelle entité.
Enfin, les chercheurs ont spécifié que les recommandations et propositions ne se limitent pas à la CAFS. « C’est un rapport qui se veut porte-parole pour les autres organismes, renchérit Fulgence Ndagijimana. J’espère que ce sera utile pour tous les autres. »
Le rapport complet est disponible sur le site internet de la Cité universitaire de Regina.
L’immigration en quelques chiffres
- Les immigrants francophones en Saskatchewan représentent 16 % de la population francophone.
- En 2016, la Saskatchewan comptait 12 255 résidents non permanents.
- Les principaux pays d’origine des immigrants francophones sont la République démocratique du Congo, la France, l’île Maurice, le Burundi, le Maroc, le Cameroun, la Tunisie et la Côte d’Ivoire.
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