Une aventure politique aux barricades de Coutts
Crédits : Dominique Liboiron
30 janvier 2022. Sud de l’Alberta. La Gendarmerie royale du Canada bloque mon chemin. J’arrête la voiture et je descends la fenêtre. Le policier me demande où je m’en vais…
« À Coutts », lui dis-je. Je m’attends à être bombardé de questions et à devoir présenter ma pièce d’identité. À la place, le policier sourit et dit que j’ai l’air endormi. En effet, c’est de bonne heure le matin.
La GRC me laisse passer. Je suis surpris par le ton amical et la bonhomie de mon interlocuteur. Cela confirme mes soupçons : le policier manque d’information précise au sujet de la situation à Coutts. Hier, on m’a dit que la police ne laissait pas les automobilistes passer. Doutant que les médias traditionnels décrivent honnêtement la situation, je me suis décidé à me rendre moi-même à Coutts pour voir de mes propres yeux ce qui se passait.
Le village albertain de Coutts se situe littéralement à la frontière avec le Montana. Le village agricole compte environ 200 résidents. Malgré sa petite taille, Coutts détient l’une des douanes les plus importantes au Canada au niveau de la valeur de la marchandise qui y passe, soit 6 milliards de dollars par an.
Le Convoi de la liberté a déclenché des manifestations dans la plupart des villes canadiennes majeures.
Crédits : Dominique Liboiron
Juste avant d’arriver à Coutts, je vois des dizaines de camions-remorques stationnés sur l’autoroute. Ils sont décorés de drapeaux canadiens qui claquent au vent. Les camions sont bloqués par d’autres camions qui empêchent la circulation vers les douanes.
Les médias ont dit que les camionneurs avaient bloqué l’accès au village et que personne ne pouvait entrer ni sortir de Coutts. Cette information n’est pas tout à fait vraie. Oui, l’intersection de l’autoroute où l’on tourne normalement pour entrer à Coutts est bourrée de véhicules, mais il y a un chemin de gravier près de l’autoroute qui mène au village.
Je fais le détour facilement. Il n’y a que le fossé entre l’autoroute et le chemin de gravier. Arrivé à Coutts, je stationne près de la barricade de camions où je parle avec des manifestants. En marchant autour, je lis les bannières politiques affichées sur les camions et je parle avec des organisateurs, des manifestants, des bénévoles et des camionneurs. En somme, ils revendiquent la liberté, la fin des mandats et la démission de Justin Trudeau.
Je ne vois aucun symbole raciste, misogyne ou de haine. Plutôt, je trouve un esprit d’entraide et de but commun. Des bénévoles des communautés environnantes sont là pour préparer des repas. Les gens veulent juste que la vie retourne à la normale.
Vers midi, je m’arrête au restaurant, le seul du village. La salle est pleine et les clients doivent s’asseoir avec des personnes qu’ils ne connaissent pas. Mais cela ne fait qu’encourager la discussion. À l’unisson, tout le monde parle de la COVID et de politique.
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