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Il était une fois, les arts de la scène

Auteur: Réjean Paulin/24 mars 2016/Catégories: Arts et culture, Réjean Paulin

On va commencer comme dans un conte… Il était une fois… Oui, il était une fois, des artistes, musiciens, auteurs, compositeurs, interprètes terrés dans l’ombre d’un pays qui ne voulait pas trop les entendre. Nommons-le « Canada hors-Québec ». Puis un jour, ils se sont tournés vers la lumière. Petit à petit, violons, pianos, chansons, personnages, textes et poèmes ont meublé le paysage.

Fini le silence. On chantait et racontait son peuple, sa terre, son histoire et sa vie.

Pas besoin de reculer en des temps immémoriaux pour revivre cette époque. Ceux et celles qui ont vu les années 60, 70 et même 80, se rappellent probablement le temps où il fallait, à toutes fins pratiques, nommer son village pour dire en des mots clairs, sans équivoque, qu’on était là… et aussi pour avoir la reconnaissance de son peuple. Il fallait que l’on se raconte, que l’on parle de soi, de nous pour dire que l’on aspirait à de jours meilleurs. C’était la « quête identitaire » et « l’affirmation culturelle ».

« Chante avec moi l’Acadie qui s’éveille » entonnait Calixte Duguay pour célébrer les 375 ans de présence française en Amérique. « Un jour, un jour peut-être » chantait Edith Butler dans son Hymne à l’espoir. Notre place, clamait Paul Demers, dans ce qui est aujourd’hui le cri de rassemblement des Franco-Ontariens.

Ces artistes, comme plusieurs autres de cette époque, étaient des pionniers. Chaque vers et chaque mesure lançaient un défi à l’histoire.

Ce fut un bel éveil, mais on était encore loin de la création qui transcende le temps et les frontières. Il était encore difficile de sortir de chez soi…

Ces frontières ont fini par éclater.

La Fransaskoise Carmen Campagne a servi Un bon chocolat chaud à des milliers de petits Québécois. Daniel Lavoie, Natasha St-Pier, Lisa LeBlanc, Véronic Dicaire… On pourrait allonger la liste de ceux et celles qui ont marché sur les scènes du monde.

J’ai eu le privilège de passer quatre jours dans les coulisses de Contact ontarois, une sorte de foire commerciale consacrée aux arts de la scène. L’Acadie a aussi la sienne, la Francofête et l’Ouest canadien a le Contact Ouest.

Des artistes - danseurs, conteurs, musiciens, comédiens, chanteurs- y convergent pour se faire connaître auprès des acheteurs et producteurs de spectacles. Ils viennent de partout, de l’Ontario, de l’Acadie, du Québec et d’ailleurs dans le monde. Treize Franco-Ontariens parmi une cinquantaine de participants… On invite les autres à venir chez soi tout en frappant à la porte du voisin.

Ces rassemblements ne sont quand même pas nouveaux. Cela fait plus de 30 ans qu’ils existent. Mais ils ont grandi et évolué. Le propos aussi a changé.

Jean-Philippe Levac et Frédéric Levac du groupe Pandaléon sont Franco-Ontariens et ne se gênent pas pour le dire. Mais ils veulent faire de la musique avant tout. Ils ne sentent pas le besoin d’y accoler l’étiquette nationale. Ils cherchent leur son, leur musique…En d’autres mots, ces artistes se sont affranchis. Ils créent avec d’autres matériaux que l’histoire et le vécu de leur peuple, et visent un autre public aussi.

Que dire de Radio Radio… Aurait-on imaginé un son acadien comme celui-là, il y a à peine 30 ans? Avec le temps, les arts de la scène se sont universalisés.

Au lendemain de Contact ontarois, des agents comme l’Acadienne Carol Doucet et Karine Lafleur de Réseau Ontario prenaient l’avion pour exporter nos arts de la scène en France.

Désormais, la scène de la francophonie canadienne évolue de plain-pied dans la sphère planétaire.

Bientôt, il y aura recensement au pays. On nous sortira probablement, encore une fois, des chiffres assommants et déprimants sur l’état de la francophonie, l’assimilation et la dénatalité. Mais parfois, j’ai vraiment envie de dire que ça va bien malgré tout.

À Paul, Calixte, Édith et à tous les autres pionniers que je ne nomme pas, faute d’espace…Notre place, on l’a prise. L’éveil a bel et bien eu lieu. Un jour, un jour peut-être… Peut-être? Non. Aujourd’hui, on sent que « ce jour-là est arrivé ».

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