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Mychèle Fortin / 2 avril 2020 / Catégories: 2020, Société, Santé, Coup d'oeil sur le monde Ce sera comment, après? Tout est allé très vite. À peine quelques semaines entre le "il y a un méchant virus en Chine" et la "distanciation sociale", entre les rassemblements limités à 250 personnes et le confinement. Pour moi, pour mon chum, ça ne change pas grand-chose. Nous travaillons à distance, nous vivons dans la campagne profonde où on peut prendre de longues marches sans croiser un chat. Nous n'avons pas d'actions en bourse qui pourraient chuter, pas de proches malades qui pourraient nous inquiéter, pas d'enfants désœuvrés à occuper. Bref, notre confinement se déroule dans des conditions que beaucoup nous envieraient. Ce qui ne veut pas dire que nous ne sommes pas inquiets. On se demande combien de temps ça va durer. Surtout, on se demande comment ce sera, après. Et si plusieurs espèrent un retour à la normale, il faut peut-être se demander ce qu'on entend par "la normale". Une catastrophe annoncée En mars 1972, le Club de Rome (1) présentait au monde son rapport intitulé "The Limits to Growth" (Halte à la croissance)(2) aussi appelé rapport Meadows. Ce rapport, fruit d'une commande à des chercheurs du Massachusetts Institute of Technology (MIT), donnait soixante ans au système économique mondial pour s'effondrer. En 2012, un second rapport confirmait les conclusions du premier quant aux limites de la croissance économique. "Si l'humanité continue à consommer plus que la nature ne peut produire, un effondrement économique se traduisant par une baisse massive de la population se produira aux alentours de 2030", résumait le physicien Graham Turner, rédacteur coordonateur du rapport. "The world is on track for disaster…" rapportait le Smithsonian Magazine. Dans le magazine Québec-Science d'octobre-novembre 2019, on peut lire que "tous les experts, ceux de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) en tête, sont d'accord sur un point : l'arrivée de la prochaine pandémie n'est qu'une question de temps et ses conséquences seront majeures." (3) Depuis les années 1980, le nombre de flambées épidémiques aurait triplé. Souvent en provenance directe des forêts tropicales d'Afrique et d'Asie, comme l’Ebola, elles n'ont pas beaucoup mobilisé l'attention. Mais cette fois, c'est différent. La COVID-19 ne reste pas confinée dans la province chinoise où elle est née. Ce virus est un globe-trotter et il nous menace tous. Des géants fragiles Nos sociétés sont beaucoup plus fragiles qu'on le pense. Les mesures de confinement prises dans de nombreux pays ont porté un coup sans précédent à l'activité économique, stoppé le rythme des politiques de croissance perpétuelle et de compétitivité internationale. Mais si le coronavirus est une catastrophe pour les humains, la planète, elle, profite d'un répit. L'eau des canaux de Venise est limpide dit-on, et on y voit des poissons. Certains estiment que la diminution de la pollution atmosphérique va sauver plus de vies que le virus va en faucher. Ça mérite réflexion, non? Et si cette pandémie était une occasion d'opérer un virage? «Ce n'est pas l'espèce la plus forte qui survit, ni même la plus intelligente. C'est celle qui s'adapte le mieux au changement » écrivait Darwin. Saurons-nous nous adapter? Pour François Gemenne, membre du Groupe d’experts intergouvernemental sur le climat (GIEC), la crise a un petit côté « répétition générale de ce qui nous attend face au dérèglement climatique ». Une répétition également pour notre capacité à faire face à une pandémie. De quoi aurions-nous l’air si le taux de mortalité du virus était de 30% au lieu de 3 à 4%? (4) Tous ne voient pas cette « répétition générale » d'un bon œil. Au Brésil, le président Bolsonaro annonçait récemment qu'il rejette le confinement qui pourrait "ruiner" le pays. Donald Trump a parlé de relâcher les mesures en place estimant que « le remède pourrait être pire que le mal ». On se dit que la fin du mythe de la croissance perpétuelle, ce n'est pas pour demain. Le plus grand danger qui nous guette, ce n'est pas la COVID-19. C’est notre obstination à ne pas s’adapter aux nouvelles réalités. D'ailleurs, une fois le confinement terminé, ne pourrions-nous pas conserver certaines habitudes bénéfiques comme les vidéoconférences et le télétravail dans la mesure du possible? Limiter les déplacements? Nous, on fait les courses une fois par semaine, au lieu de trois ou quatre fois. Et je vous jure, on ne s'en porte pas plus mal. Le Club de Rome est un groupe de réflexion international fondé en 1968 et composé d'économistes, de scientifiques, de hauts fonctionnaires et d'industriels de différents pays. Il s'est donné pour but de réfléchir sur les problèmes complexes auxquels toutes les sociétés doivent faire face, qu'elles soient industrialisées ou en développement. Renommé Les Limites à la croissance (dans un monde fini) dans sa réédition de 2012 Prêts pour la prochaine pandémie?, Québec-Science, oct-nov 2019 Estimation de l’Organisation mondiale de la santé Imprimer 26422 Balises: COVID-19Club de Rome Mychèle FortinMychèle Fortin Autres messages par Mychèle Fortin Contacter l'auteur Articles connexes Pandémie : qu’avons-nous appris ? Étudier en pandémie : les étudiants de La Cité se confient Prendre soin de sa santé mentale durant une pandémie Grippe espagnole et COVID-19, quand l’histoire se répète Quand la pandémie pèse lourd sur notre moral Le monde d’après... 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