Une francophonie en mutation sous la loupe des chercheurs
Premier colloque sur l’inclusion des milieux minoritaires du Centre de recherche de La Cité universitaire francophone
Nicole Gallant (Institut national de la recherche scientifique), a présenté une conférence qui proposait une approche comparative, en analysant dans quelle mesure les Fransaskois étaient plus inclusifs que les autres francophones au Canada.
Photo : Cité universitaire
Ce sont les 5 et 6 octobre dernier qu’a eu lieu la première édition du Colloque international et interdisciplinaire universités-communautés organisé par le Centre canadien de recherche sur les francophonies en milieu minoritaire (CRFM) de La Cité universitaire francophone à l’Université de Regina. Pour l’occasion, une quarantaine de chercheurs, universitaires, étudiants et membres de la communauté ont été invités à assister à plus d’une quinzaine de conférences portant sur les Relations, pratiques et représentations de l’inclusion dans les communautés francophones en situation minoritaire : l’Ouest canadien au prisme des Amériques.
Rappelons que le Centre de recherche, créé en 2005, a pour objectifs principaux de développer et de disséminer des connaissances multidisciplinaires sur la communauté fransaskoise et les autres communautés francophones en situation minoritaires. En ce sens, le colloque a d’abord été conçu dans la perspective d’éclairer les zones d’ombre liées à l’inclusion (politique, sociale, économique, ethnique, culturelle, etc.) dans diverses communautés en situation minoritaire dans les Amériques.
Bruno Dupeyron, PhD., Professeur agrégé, École de politiques publiques Johnson-Shoyama, Campus de l'Université de Regina, Chargé de projet, Centre canadien de recherche sur les francophonies en milieu minoritaire (CRFM), La Cité universitaire francop
Photo: La Cité universitaire (2016)
Immigration et inclusion :Analyses et réflexions
Deux conférences ont permis de nourrir les réflexions en profondeur : la première, donnée par Michelle Landry (Université de Moncton), a analysé les crises et innovations en matière de gouvernance communautaire, en comparant en particulier l’Assemblée communautaire fransaskoise (ACF) et la Société de l’Acadie du Nouveau-Brunswick; la seconde, présentée par Nicole Gallant (Institut national de la recherche scientifique), a également proposé une approche comparative, en analysant dans quelle mesure les Fransaskois étaient plus inclusifs que les autres francophones au Canada.
Trois axes ont structuré les sessions de la journée : l’inclusion en milieu minoritaire dans les Prairies canadiennes, l’inclusion en milieu minoritaire au prisme des autres expériences canadiennes, comparer et penser l’inclusion en milieu minoritaire.
La première session regroupait des recherches effectuées dans un contexte fransaskois ou franco-manitobain. Outre les questions de la participation communautaire, de l’immigration francophone dans les Prairies et de l’identité de leurs immigrants, l’inclusion en situation minoritaire a également été abordée sous l’angle de l’insertion professionnelle des enseignants et du point de vue des minorités visibles. Cette session a notamment accueilli Carole Michalik (Université de Saint-Boniface), qui a montré comment des enseignants nouvellement arrivés au Canada et issus de minorités visibles étaient inclus professionnellement à Winnipeg. Quant à Boniface Bahi (Université de l’Alberta), il a présenté comment les rôles familiaux genrés pouvaient être redéfinis, à la suite de l’immigration au Canada. De l’Université de Regina, Laurie Carlson Berg et Paul Ntahondakirira ont ensuite formulé une série de recommandations pour soutenir l’inclusion dans le contexte de la Fransaskoisie, puis Samira ElAtia de l’Université de l’Alberta a analysé les facteurs qui expliquent les réticences linguistiques de certains immigrants francophones dans l’Ouest canadien.
Pendant la deuxième session, les conférences ont abordé les réalités pancanadiennes. Parmi les thématiques soulevées, notons le développement des pratiques d’inclusion, la résistance et réticence linguistiques, l’identité liée à la langue et le dialogue interculturel. Yves Frenette (Université St-Boniface) a rappelé les trames historiques qu’il faut retenir quand on analyse les questions d’immigration et d’inclusion au Canada. Xavier Bériault et Janique Dubois (Université d’Ottawa) ont partagé des analyses sociohistoriques sur les représentations et les pratiques d’inclusion au XIXème siècle. Selon monsieur Bériault, « pour pouvoir mieux résister au régime colonial, ces mouvements-là étaient obligés d'aller chercher des alliés parmi les autres minorités, surtout les communautés anglophones. »
Sylvie Lafrenière (Vancouver Island University) a montré comment l’inclusion s’opérait parmi les francophones de l’Ile de Vancouver. Yves Labrèche (Université Saint-Boniface) a montré de quelle manière les autochtones et francophones en situation minoritaire étaient parvenus de l’exclusion au dialogue interculturel. Ce volet a également permis d’apporter des précisions importantes sur le plan terminologique, en abordant les notions de migrant et d’immigrant, d’inclusion et d’exclusion ou encore l’inclusion versus l’intégration. Au terme de cette session, des questions ont été posées par des membres de la communauté, remettant en question notamment certaines politiques publiques affectant les communautés francophones en milieu minoritaire.
Au cours de la dernière session de la journée, les participants ont pu assister à une présentation en direct du Pérou, dans laquelle María Andrea Butrón Torreblanca, affiliée à l’Université autonome de Barcelone, a montré comment des exercices dans des langues majoritaires, minoritaires et étrangères permettaient de redonner une légitimité à des langues minoritaires, par exemple le quechua. Louise Fontaine (Université Sainte-Anne) a conclu le colloque en analysant les processus d’inclusion et d’exclusion socioéconomiques des francophones de Nouvelle-Écosse; elle a par exemple montré comment les étudiants internationaux francophones s’appuyaient sur des solidarités familiales au sens large pour faciliter leur intégration universitaire et professionnelle.
Il va sans dire que cette première édition fût un succès, autant sur le plan de la participation que sur les pistes de réflexion et de questionnements ayant émergé des présentations. Notons que les pages Internet du CRFM seront bientôt mises à jour pour partager les diapositives qui ont été utilisées par les conférenciers, ainsi que des bandes sonores de la journée du 6 octobre, en français et en anglais, grâce auxquelles il sera possible d’écouter les présentations, questions et réponses qui ont nourri les débats de ce colloque.
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