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NOTE: Les opinions exprimées sur cette pages sont celles de nos lecteurs et lectrices et ne reflètent pas nécessairement celles de l'Eau vive. Si vous désirez soumettre un texte veuillez le faire parvenir à redaction@leau-vive.ca.

La FCFA dévoile son projet de loi aux partis politiques

La Fédération des communautés francophones et acadienne (FCFA) du Canada a livré en personne le texte de son projet de loi sur les langues officielles aux représentants des trois grands partis politiques, mercredi 27 février. L’organisme a rendu publique sur les réseaux sociaux la rencontre du président Jean Johnson avec la ministre Mélanie Joly et deux critiques de l’opposition en matière de langues officielles.

Le choix du lobby francophone de diffuser ce moment de partage avec des politiciens d’un document confidentiel inaccessible aux communautés aurait dérangé plus d’un observateur. L’enjeu est soulevé dans un échange du 28 février sur Twitter.

La FCFA : « Ça y est, nous avons remis aux trois partis notre proposition de projet de loi pour moderniser la Loi, le premier projet complet pour transformer la Loi, de A à Z, en plus de 30 ans! »

Le politicologue Martin Normand (MN), de l’Université d’Ottawa : « C'est une stratégie comme une autre mais il me semble que la population francophone que la FCFA représente aurait dû voir le projet de loi avant ou en même temps que les élus. C'est pour elle qu'elle agit, pas pour eux. »

Le directeur général Ali Chaisson (AC), de la Société nationale de l’Acadie du Nouveau-Brunswick : « Comment veux-tu que la population francophone puisse maitriser les mille et une interprétations de notre objet d'étude! Sincèrement, je fais partie d'une gang de nerds francophones qui s'intéressent, au-delà de mes fonctions. C'est la réalité! »

« C’est l’enchainement des évènements qui me dérange »

MN : « Personnellement, je pense qu'il ne faut pas sous-estimer la population comme vous le faites. C'est regrettable que le DG d'un porte-parole se représente ainsi ceux que son organisme représente. Et cet argument ne dédouane personne d'une réflexion plus large sur la gouvernance. »

AC : « Je ne sous-estime personne. Je dis tout simplement qu'il ne faut pas miser sur le libellé d'une loi pour engager les gens dans une démarche. Il faut faire une démarche séparée qui interpelle les gens par une vulgarisation qui les touche. »

MN : « Là-dessus, je suis d'accord. C'est l'enchaînement actuel des événements qui me dérange et qui m'amène à réfléchir en termes de gouvernance et de mobilisation. »

La conférence de presse prévue pour le 28 février, annulée puis reportée au 5 mars, dévoilera le libellé de loi. Entretemps, Francopresse a obtenu confidentiellement de la documentation élaborée par la FCFA pour l’évènement, notamment des notes de breffage et un résumé de la proposition.


Un vocabulaire de « stagnation, déclin et plafonnement »

La contribution de la FCFA s’inscrit dans le processus de modernisation de la Loi annoncé en juin 2018 par le premier ministre Justin Trudeau. Le Comité permanent des langues officielles du Sénat a déjà produit trois études sur la réforme linguistique en attendant de publier un rapport final l’été prochain.

Depuis novembre, 11 mémoires sur la modernisation auraient été déposés au Comité permanent des langues officielles des Communes. La procédure législative ne débuterait toutefois pas avant 2020.

D’après l’organisme parapluie, la Loi adoptée en 1969 et remplacée en 1988 n’a jamais été pleinement respectée. « Au cours de la dernière décennie, affirme le groupe dans ses notes de breffage, la situation s’est dégradée à un tel point que des mots comme “stagnation, déclin et plafonnement” font partie du vocabulaire utilisé dans les rapports du commissaire aux langues. »

« Le document que nous présentons est clé-en-main »

La FCFA soutient qu’après 50 ans de problèmes systémiques de coordination et de responsabilisation, « force est de conclure que l’enjeu est structurel et que la Loi sous sa forme actuelle est le principal obstacle à sa propre mise en œuvre ».

La volonté d’en finir avec les difficultés récurrentes pourrait faire consensus. Au Parlement, note l’organisme, un nombre d’élus se serait montré réceptif à une orientation fournie par les communautés francophones.

« Le document que nous présentons aujourd’hui est clé-en-main, signale la FCFA, et pourrait être déposé en Chambre tel quel comme projet de loi du gouvernement. Nous serions bien sûr très heureux d’un tel résultat. À tout le moins, la FCFA s’attend à ce que ce projet de loi alimente les débats parlementaires, les consultations de la ministre Joly et bien sûr les plateformes des partis. »

Ottawa n’accordera pas de priorité au libellé de la FCFA, selon l’attaché de presse de la ministre Joly. « Le gouvernement tiendra compte des exercices en cours comme les audiences et les rapports des comités du Sénat et de la Chambre des Communes. Le projet de loi de la FCFA sera examiné avec tous les autres mémoires et témoignages reçus. »

Jeremy Ghio précise certaines modalités de l’examen national. « Les citoyens et les organismes seront invités à participer à des forums et des tables-rondes lors desquels ils auront l’occasion de partager leurs points de vue. »


Résumé de la proposition de Projet de loi

  • Confier la mise en œuvre à une agence centrale.
    • Désigner une agence centrale chargée de la responsabilité de coordonner la mise en œuvre de la Loi sur les langues officielles, et conférer à cette institution les pouvoirs nécessaires pour jouer ce rôle. Une Loi modernisée devrait conférer le rôle de coordination et de mise en œuvre au Conseil du Trésor, avec l’appui d’un ministre d’État et d’un secrétariat des langues officielles.
  • Définir un droit de participation des minorités de langue officielle. Une Loi sur les langues officielles modernisée devrait consacrer le principe du « par et pour » les communautés de langue officielle en situation minoritaire et les habiliter afin qu’elles puissent participer à la mise en œuvre de la Loi. Plus spécifiquement, une Loi modernisée devrait :
    • Préciser les obligations de consultation des institutions fédérales et un devoir de tenir compte du fruit de ces consultations.
    • Créer un conseil consultatif qui encadrera la collaboration entre le gouvernement fédéral et les représentantes et représentants reconnus des communautés pour la planification et la mise en œuvre des politiques de langues officielles.
  • Moderniser les mécanismes de surveillance et d’imputabilité.
    • Créer un tribunal administratif responsable d’entendre les doléances au sujet de la mise en œuvre de la Loi sur les langues officielles et d’imposer des ordonnances exécutoires ou des sanctions aux institutions fédérales.
    • Redéfinir le rôle et les pouvoirs du commissaire aux langues officielles afin qu’il puisse remplir pleinement son rôle de protecteur du citoyen et de promoteur des langues officielles.
  • Élargir la portée des droits et obligations.
    • Renforcer le préambule et la clause d’objet;
    • Inclure des clauses linguistiques exécutoires dans les ententes fédérales-provinciales-territoriales;
    • Lever l’exemption de bilinguisme qui s’applique présentement aux juges de la Cour suprême du Canada;
    • Enchâsser l’existence du Programme de contestation judiciaire;
    • Offrir tous les services du gouvernement fédéral dans les deux langues officielles, en tenant compte non seulement du nombre, mais aussi de critères de vitalité des communautés de langue officielle;
    • Créer, à l’échelle nationale, un environnement de travail au sein de l’administration publique fédérale où chacun peut travailler dans la langue officielle de son choix ainsi qu’apprendre et faire usage de l’autre langue officielle;
    • Clarifier l’obligation du gouvernement d’adopter un plan de développement quinquennal pour les langues officielles;
    • Énoncer de nouvelles obligations du gouvernement fédéral d’adopter des politiques d’immigration favorisant la dualité linguistique;
    • Énoncer explicitement l’obligation de Statistique Canada de dénombrer les personnes titulaires de droits à l’éducation dans la langue de la minorité en vertu de l’article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés.

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