Rapport sur le financement de Radio-Canada : le diffuseur public n'est plus en mesure de remplir son mandat fondamental
Compressions à Radio-Canada : le Québec et l’Ontario dévoilent cinq pistes de solution
Québec, le 21 mai 2015 - Dans le cadre de leur démarche commune, dans le dossier des compressions à Radio-Canada, le ministre québécois responsable des Affaires intergouvernementales canadiennes et de la Francophonie canadienne, Jean-Marc Fournier, et la Procureure générale et ministre déléguée aux Affaires francophones de l’Ontario, Madeleine Meilleur, ont dévoilé, aujourd’hui, le rapport produit par le consultant expert Michel Houle.
Ce rapport, intitulé Le financement de Radio-Canada : état de situation et pistes de solution, dresse un portrait du contexte dans lequel évolue actuellement la Société Radio-Canada et propose des pistes de solution qui permettraient au radiodiffuseur public de remplir pleinement son mandat auprès des communautés francophones et acadiennes.
« Les constats du rapport de monsieur Houle sont frappants et confirment que Radio-Canada n’est plus en mesure de remplir sa mission fondamentale. De 1990 à 2014, ses crédits ont augmenté de 0,5 %, tandis que l’indice des prix à la consommation (IPC) croissait de 51 %, et les dépenses du gouvernement, de 74 %. Bien que la croissance des revenus, dont les revenus publicitaires réalisés par la Société, ait été de 18 % entre 2005 et 2014, soit le double de la croissance de l’IPC sur la même période, celle-ci ne permet pas de compenser la diminution des crédits parlementaires. Les solutions proposées dans le rapport sont concrètes, tangibles et permettraient d’insuffler à la Société Radio-Canada les moyens nécessaires afin qu’elle continue à jouer pleinement son rôle de catalyseur du développement et de l’épanouissement des communautés francophones et acadiennes », a affirmé M. Fournier.
Rappelons qu’il incombe au gouvernement fédéral de soutenir la Société dans la réalisation de son mandat, en vertu de la Loi sur la radiodiffusion. Selon cette dernière, Radio-Canada doit rendre compte de la diversité régionale du pays et répondre aux besoins particuliers des communautés francophones et acadiennes du Canada. Pour près de 2,6 millions de Canadiens francophones et francophiles vivant à l’extérieur du Québec, Radio-Canada est souvent le seul filet de communication accessible en français.
Depuis octobre dernier, le Québec et l’Ontario font front commun pour soutenir Radio-Canada. Ils ont ainsi rencontré le commissaire aux langues officielles du Canada, Graham Fraser, des représentants du groupe Les Amis de Radio-Canada, dont Pierre Maisonneuve, les dirigeants de CBC/Radio-Canada, dont le président-directeur général, Hubert Lacroix, et deux membres du Comité sénatorial permanent des langues officielles, les sénatrices Maria Chaput et Claudette Tardif.
Le 21 novembre dernier, les deux gouvernements signaient aussi une déclaration portant sur la francophonie canadienne, dans laquelle ils désignaient Radio-Canada comme l’un des enjeux déterminants pour la pérennité du fait français au Canada.
M. Houle oeuvre comme consultant dans le secteur des industries culturelles et des communications, depuis une vingtaine d’années. À ce titre, il a participé à l’élaboration de nombreuses études sur la production, la distribution et l’exploitation cinématographiques, sur la production télévisuelle et le système de radiodiffusion canadien.
Les cinq pistes de solution que les ministres retiennent sont les suivantes :
1. Rehausser graduellement, sur une période de trois ans, les crédits parlementaires de Radio-Canada au niveau où ils étaient en 2008-2009. Les crédits atteindront alors 1 170,8 millions de dollars, ce qui représente une augmentation de 150 millions de dollars par rapport aux crédits actuels de la Société;
2. Une fois ce niveau atteint, le maintenir et indexer annuellement le montant des crédits budgétaires en fonction de l’IPC, et ce, pendant les cinq années suivantes;
3. Instaurer une subvention annuelle de 35 millions de dollars, en sus des crédits parlementaires de base, pour une période de cinq ans, afin de renforcer la programmation locale des stations de radio et de télévision de CBC/Radio-Canada hors des marchés métropolitains. Ce montant, qui y serait dédié, viserait à pallier la perte financière occasionnée par l’élimination totale du Fonds pour l’amélioration de la programmation locale (FAPL), le 31 août 2014, par le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC);
4. Convertir le pouvoir d’emprunt à court terme de 220 millions de dollars de la Société Radio-Canada en marge de crédit à long terme d’environ 300 millions de dollars, afin qu’elle puisse déployer des initiatives multiplateformes et accroître sa présence dans l’univers de la télévision spécialisée, sans qu’il y ait d’incidence sur la qualité et la quantité de la production de contenu;
5. Faire en sorte que les services spécialisés en propriété exclusive de CBC/Radio-Canada soient accessibles à tous les Canadiens. Pour ce faire, le gouvernement pourrait, par décret, exiger du CRTC que ces services fassent partie de la distribution numérique dans les deux marchés linguistiques au Canada, ce qui forcerait les entreprises de radiodiffusion à les inclure dans leur offre de programmation. Rappelons qu’à compter de septembre 2018, les entreprises de distribution de radiodiffusion (EDR) pourront faire le choix de ne pas distribuer ces services, comme il en ressort de la Politique réglementaire de radiodiffusion CRTC 2015-96, annoncée en mars dernier.
« Radio-Canada joue un rôle central et rassembleur en favorisant une meilleure compréhension et une visibilité accrue de l’ensemble des réalités locales, régionales et nationale des deux collectivités de langue officielle du pays. Le plein épanouissement de la francophonie canadienne repose sur la capacité de notre seul diffuseur public national à bien représenter l’ensemble des communautés francophones au pays. Les vagues de compression financière ont eu un impact destructeur sur les services de langue française et sur l’environnement de travail des artisans de Radio-Canada en Ontario, et partout au pays. Le rapport rendu public aujourd’hui démontre qu’il est grand temps que, d’un océan à l’autre, les francophones et les francophiles se rallient afin que Radio-Canada soit au coeur des priorités du gouvernement actuel et obtienne les ressources financières et humaines qui lui permettront de remplir pleinement son mandat. », a mentionné Mme Meilleur.
Les deux ministres ont sollicité des rencontres avec les caucus des partis politiques fédéraux afin de leur présenter ce rapport et les solutions retenues. Ainsi, le 25 mai prochain, ils rencontreront des représentants du Parti libéral du Canada et du Nouveau Parti démocratique. Pour la francophonie canadienne, la situation est très préoccupante et constituera certainement un enjeu électoral à l’automne prochain.
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