Un grand défenseur de la francophonie sur la scène fédérale prend sa retraite
Le départ d’Yvon Godin laissera un grand vide
Yvon Godin
Député fédéral néo-brunswickois d’Acadie-Bathurst de 1997 à 2015.
Yvon Godin a le goût de changer d’air. Après 18 ans sur la colline parlementaire, où il s’est démarqué par sa défense des droits linguistiques de la francophonie canadienne, il tire sa révérence.
Ce n’est pas une question de santé, ni de conflit interne avec le parti, ni de baisse de popularité, a-t-il précisé, mais une question de vouloir passer à autre chose. « Après 18 ans en politique, j’étais rendu là », a-t-il indiqué lors d’une entrevue.
Le député néo-brunswickois d’Acadie-Bathurst a toujours eu la cause des francophones et des Acadiens à cœur et il ne se gênait pas pour le dire. Au fil des ans, il a multiplié les interventions, les discours enflammés et les pétitions. La bataille pour adoucir la réforme de l’assurance-emploi a été un combat de tous les instants.
« Ça prenait quelqu’un qui représentait les travailleurs saisonniers, fait valoir l’ex-syndicaliste, quelqu’un pour expliquer la réalité des industries saisonnières comme la pêche et le travail forestier. C’était cruel la façon qu’on traitait les travailleurs saisonniers. »
En 1997, il réussissait à déloger, dans son comté, le ministre libéral de l’époque, Doug Young, père de la réforme de l’assurance-emploi. Le phénomène Yvon Godin était né. Il sera réélu en 2000, 2004, 2006, 2008 et 2011. Il récoltera un score de près de 70 % des suffrages.
Il fait aussi des vagues en insistant sur la nécessité d’avoir des juges bilingues à la Cour suprême, qui peuvent fonctionner en français sans l’aide d’un interprète. Il a piloté un projet de loi à cet effet à la Chambre des communes. Trois fois. La raison finira par triompher, croit-il.
L’une des batailles dont Yvon Godin est le plus fier, c’est le maintien du Centre de recherche et de sauvetage maritime de Québec qui répondait à des appels de détresse en mer en français. Menacé de fermeture, M. Godin s’est plaint auprès du Commissaire aux Langues officielles et il a gagné sa cause. Le gouvernement de Stephen Harper a fait marche arrière. Il a également réussi à faire fléchir Ottawa qui a finalement débloqué des fonds pour maintenir le tronçon ferroviaire Miramichi-Bathurst dont le démantèlement menaçait le trajet Halifax-Québec.
Son départ laisse un vide qui sera difficile à combler au sein du Comité des Langues officielles. Même ses adversaires, le député conservateur Jacques Gourde le premier, en est convaincu. Monsieur Gourde rappelle avec un peu d’humour qu’il avait dû intervenir à quelques reprises pour dire au député acadien, le visage écarlate, de se calmer, tellement il se laissait emporter par les questions de langues officielles. « Prends le temps de respirer », coupait M. Gourde. M. Godin s’arrêtait un peu et « repartait », dit-il, en riant.
En effet, Yvon Godin maîtrisait l’art du clip pour la télé ou la radio et il ne ratait jamais une occasion de faire valoir ses arguments dans les médias. « C’est un spécialiste pour attirer l’attention, reprend M. Gourde. Il aime faire son show. »
Quant à M. Godin, il n’a pas fini de faire parler de lui. « Je n’ai pas signé mon certificat de décès », termine-t-il, avec une pointe d’humour.
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