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Dédales de la gouvernance : quatre enjeux et solutions pour s’en sortir

L'ACFR a invité Maurice Chiasson à donner une formation en gouvernance à ses membres

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Collaboration

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Photo: Unsplash/Rawpixel
REGINA - Que ce soit dans le milieu associatif, les institutions ou les entreprises privées, un ensemble de règles et de politiques internes doivent être établies pour assurer la bonne gouvernance de l’organisation. Toutefois, faire de l’ordre ou le ménage dans le dédale des règles de fonctionnement peut constituer un travail laborieux qui en décourage plusieurs, particulièrement dans le milieu associatif. Mais les conséquences de ne rien faire peuvent être encore plus sérieuses.

Pour mieux comprendre les enjeux de gouvernance des associations francophones en province ou ailleurs au pays, L’Eau vive a rencontré monsieur Maurice Chiasson, consultant national et formateur en gouvernance. Nous avons aussi discuté avec la présidente de l’Association canadienne-française de Regina (ACFR), madame Sylvie Bergeron, qui s’engage présentement, avec son conseil d’administration, dans une refonte des statuts, règlements et autres politiques de l’organisme.

Selon monsieur Chiasson, quatre grands enjeux touchent le milieu associatif fransaskois. Il précise que ce ne sont pas des enjeux spécifiques à la communauté. On les retrouve ailleurs au pays, mais ce sont des enjeux qui devraient être traités par plusieurs associations fransaskoises.

Sylvie Bergeron

Sylvie Bergeron

Sylvie Bergeron
Photo : Frédéric Dupré
Avoir une compréhension commune

Il existe un enjeu fréquent dans les associations (et pas seulement dans le monde francophone), les membres des conseils d’administration ont des niveaux différents de compréhension de leur rôle à titre d’administrateur. Ils ne comprennent pas toujours les outils de gouvernance dont ils disposent. Il y a une variété d’expériences qui constitue une richesse, mais qui peut aussi, selon monsieur Chiasson, poser des problèmes. « Les administrateurs comprennent souvent mal leurs responsabilités ou ont des compréhensions différentes. Ceci est évidemment une tendance dans la francophonie canadienne, mais on voit aussi cela dans le monde anglophone. […] C’est clair aussi qu’en Saskatchewan il y a un nombre élevé de nouveaux résidents canadiens, par habitant, qui n’ont pas toujours la même compréhension du fonctionnement d’un organisme à but non lucratif. Cela peut poser des problèmes. »

C’est bien pour répondre à ces disparités de compréhension commune que l’ACFR a décidé d’offrir une formation à ses membres et partenaires. Pour la présidente, madame Sylvie Bergeron, avant d’entamer le travail de refonte de nos règlements et pour que le conseil travaille ensemble « il est essentiel que tous les membres du conseil d’administration aient des bases communes de connaissances », affirme madame Bergeron. Le 12 janvier dernier, l’ACFR a ainsi offert une formation en gouvernance, donnée par Maurice Chiasson, pour une trentaine de personnes engagées dans diverses associations.

Madame Bergeron souhaiterait que tous les nouveaux administrateurs du réseau associatif fransaskois puissent systématiquement profiter d’une formation. « Cela évite beaucoup de confusion et permet surtout aux administrateurs de vraiment avancer ensemble ». Elle espère aussi qu’il y aura des formations annuelles pour mettre à jour les connaissances en matière de gouvernance et approfondir les enjeux de l’heure. « Il y a eu des échanges forts lors de la formation. C’était très instructif et cela a permis de poser des questions épineuses et de tous avoir les mêmes informations », ajoute-t-elle.

Maurice Chiasson

Maurice Chiasson

Consultant et formateur en gouvernance
Photo : M. Chiasson
L’importance de critères de membriété précis

L’autre enjeu fréquent c’est la question de la membriété. Qui peut participer aux prises de décision d’un organisme ? Quelles qualités doivent avoir les électeurs et décideurs au sein d’une organisation ? Quels sont les critères pour devenir membre ?

Selon monsieur Chiasson, cet enjeu est particulièrement important pour les organismes porte-parole de la francophonie, leurs critères d’adhésion sont trop larges. « Cela ouvre la porte à des gens qui ne sont pas là pour les bonnes raisons », conclut-il. Il est donc essentiel d’avoir des critères d’adhésion précis ou des facteurs d’engagement tels qu’une cotisation. « L’idée d’avoir une cotisation financière même symbolique permet aussi de créer une liste de membres. […] Tu ne veux pas, non plus, te retrouver dans une situation où juste avant l’assemblée générale annuelle, il y a des gens qui deviennent membres. C’est dans ce genre de situation où tu peux avoir des gens qui ont des intentions non déclarées et qui ne sont pas là pour le bien de l’organisation », ajoute monsieur Chiasson. Les critères devraient être précis. Devenir membre d’une association est un geste important qui ne devrait pas être pris à la légère.

L’ACFR demande une cotisation financière de 10 $ pour devenir membre. Il faut aussi être membre avant l’assemblée générale pour pouvoir y voter ou s’y présenter comme administrateur.

Absence de politiques administratives

L’autre constat que soulève monsieur Chiasson est la quasi-absence de politiques administratives dans les associations fransaskoises. « Il y a très peu de politiques en gestion financière telles que la gestion de la carte de crédit ou le fait d’avoir une réserve. Et de façon générale, il y a un manque de politiques en gestion des ressources humaines. Je n’ai pas vu de politiques sur l’évaluation du personnel, c’est très rare. » Ces politiques permettent pourtant d’établir des processus de gestion clairs et précis pour les administrateurs et les employés. De plus, ces politiques devraient être adaptées régulièrement pour répondre à l’évolution du contexte social. Par exemple, avec la légalisation de la marijuana, est-ce que les organismes permettront d’en consommer sur le lieu de travail ? Une politique devrait répondre à ce type de situation.

À l’ACFR, madame Bergeron confirme qu’il y a quelques politiques administratives en place, mais elles ne sont pas organisées ou même regroupées dans un même document. Il s’agit d’un travail qui sera fait par un comité, précise-t-elle.

Vers une gouvernance communautaire

Au-delà des règlements internes des organismes, il y a une autre forme de gouvernance qui, selon monsieur Chiasson, reste à créer, soit la « gouvernance communautaire ». Il s’agit ici moins de rédiger une série de règles, que de penser de nouvelles formes de collaboration entre divers organismes. Ce type de gouvernance se déploie ici et là, mais demeure marginal. « La gouvernance communautaire devrait mettre en commun des services et des ressources afin d’en accroître la qualité. C’est une manière de professionnaliser le réseau communautaire en partageant des services, plutôt que de tenter de tout faire seul. »

Il semble évident qu’il existe un intérêt de la part de plusieurs associations fransaskoises pour clarifier et renforcer les règles de gouvernance. L’Assemblée communautaire fransaskoise travaille d’ailleurs présentement à la refonte de ses statuts et règlements et de ses politiques.

Comme le rappelle monsieur Chiasson : « Vaut mieux être proactif dans ce domaine, changer les règles en cours de route ce n’est jamais facile ni idéal. »