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La loi, l’ordre et les femmes autochtones

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À 15 ans, Tina Fontaine avait fui son centre d’accueil à Winnipeg et son corps a été retrouvé quelques jours après, enveloppé dans un sac en plastique, dans la Rivière Rouge. Elle a pu être identifiée grâce à un tatouage dédié à son père, battu à mort par deux hommes en 2011. Son meurtre est venu nourrir les tristes statistiques qui établissent que les femmes autochtones représentent 16% des assassinats de femmes au pays alors qu’elles ne constituent que 4% de la population canadienne. En Saskatchewan, les femmes autochtones comptent pour 55 % des victimes d'homicide -- le plus haut taux au pays.

Lors de son passage au Yukon, le Premier ministre canadien, Stephen Harper, s’est fait questionner sur la pertinence d’une commission d’enquête sur le sujet de la violence faite aux femmes autochtones. Les chefs autochtones ainsi que des premiers ministres provinciaux, dont Brad Wall de la Saskatchewan, réclament ouvertement une telle enquête depuis quelque temps. Le premier ministre Harper a déclaré qu’il ne s’agissait pas ici d’un « phénomène sociologique » mais d’un problème de criminalité, que c’était le rôle de la police de s’en occuper.

Suite à ses déclarations, monsieur Harper s’est fait varloper dans les médias un peu partout au pays. Le titre de l’éditorial du Yukon News est sans équivoque : « Stupidity outbreak mars Harper’s visit ».

Pourtant, en mars 2011, le Comité permanent de la condition féminine de la Chambre des communes a publié son rapport Un cri dans la nuit : un aperçu de la violence faite aux femmes autochtones qui faisait suite à une vaste consultation nationale. Ce document établit clairement que le Canada abrite un lourd problème social qui dépasse largement la simple criminalité. Que le premier ministre fasse fi du contenu de ce rapport auquel une trentaine de députés ont contribué dépasse l’entendement et démontre un entêtement qui augure mal pour les jeunes femmes autochtones du pays. 

Cette position du premier ministre reflète la vision de la loi et l’ordre qu’il a pour le Canada. L’année même de la publication d’Un cri dans la nuit…  son gouvernement annonçait un plan de plusieurs centaines de millions pour augmenter la capacité d’accueil des prisons canadiennes. Bref, pourquoi faire de la prévention en se penchant sur les causes du problème quand on peut adopter une solution carcérale à l’américaine?  Ça évite de devoir faire face aux vrais problèmes de notre société canadienne, tel le racisme, la pauvreté, l’exclusion.

 

Extraits du rapport du Comité permanent de la condition féminine : Un cri dans la nuit : un aperçu de la violence faite aux femmes autochtones.

Le Comité a appris que le racisme systémique et institutionnalisé continue de limiter la capacité des femmes autochtones de profiter des occasions offertes aux autres Canadiens… 

S’il y a quelque chose de plus choquant que la violence même, c’est le silence dans lequel se perpétue cette violence…

Des témoins ont dit au Comité qu’il fallait modifier la façon dont on enseignait l’histoire dans le système d’éducation principal et offrir une formation continue concernant les Autochtones à tous les fournisseurs de services … 

“Depuis de nombreuses années, nous tentons d'obtenir du financement pour établir un refuge pour femmes et enfants de la région relevant du Grand conseil, mais nous nous sommes heurtés à de nombreux écueils et n'avons pu obtenir de fonds.”

Témoignage de Shirley Henderson, présidente, Commission des femmes du Grand conseil de Prince Albert, Saskatchewan