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L'Apostrohe, chronique de Frédéric Dupré

Du nationalisme à l’émergence de la fraternité des Nations

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Les fils des commentaires dans les médias et les réseaux sociaux au Québec sont remplis de discours nationalistes dès que l’occasion s’y prête. Cette semaine Justin Trudeau affirmait que le nationalisme n’était pas une préoccupation pour les Québécois, mais que la santé, l’éducation et les infrastructures étaient des enjeux plus importants. Il a même poussé l’idée que nous serions dans une époque « post-nationale ». Bien entendu ces paroles ont été l’occasion pour les souverainistes et les nationalistes québécois de diaboliser le Premier ministre et de rappeler la présence de nations au Canada, incluant le Québec et les Premières nations. Sans rejeter l'idée qu'il existe une distinction culturelle, historique et sociale propre à ces "nations", le nationalisme me semble toxique et périlleux.

Rappelons d’abord que la nationalisme est un principe politique, né à la fin du XVIIIe siècle, qui visait à légitimer l'existence d'un État-nation pour chaque peuple par opposition à la royauté. Le concept a évolué de cette opposition initiale pour en établir de nouvelles, plus contemporaines, d’abord contre les autres nations et envers les « étrangers ». Le nationalisme et la xénophobie peuvent facilement devenir des synonymes ! Le nationalisme constitue une politique de division célébrant les antagonismes et l’exclusion des « autres » pour se renforcer soi-même. Le nationalisme s’érige comme un rempart à la différence tout en cherchant des boucs émissaires pour justifier les difficultés intérieures. D’ailleurs, plusieurs fascistes ont puisé leur pouvoir de destruction dans le nationalisme au cours de la première moitié du XXe siècle.

Certes, les États-nations souffrent d’un manque notable d’autorité sur leur économie et leur territoire face à la puissante mondialisation néo-libérale. Depuis maintenant 30 ans, les États ont été dépouillés de leurs pouvoirs de règlementation au profit des intérêts privés. Le piège qui guette bien des États (et plusieurs leaders populistes vont s’y abreuver), c’est de se tromper de cible en accusant les étrangers et les autres nations d'être la cause des défis sociopolitiques actuels. Si le nationalisme mène à des luttes intestines, il ne remet pas en question la cause des inégalités économiques et sociales. Bien au contraire.

La sortie prochaine de l’Angleterre de l’Union européenne découle directement de ce type de nationalisme sectaire. Le camp du Brexit a mis le fardeau de la crise économique et politique du pays sur le dos des immigrants et des bureaucrates venant d’Europe. Par son caractère antagonique, le nationalisme développe un cercle vicieux qui renforce l’exclusion, la défense, la peur et bientôt l’attaque. Les tensions xénophobes actuelles en Angleterre en témoignent.

Le nationalisme a été l’occasion pour bien des peuples de se libérer du joug colonial. Il a aussi été un prétexte pour des leaders politiques de se maintenir au pouvoir trop longtemps. Une évolution du concept est essentielle pour faire face aux réalités actuelles. La fierté culturelle sera toujours importante et nécessaire pour célébrer notre originalité culturelle et historique. L’époque tumultueuse que nous connaissons nécessite un nationalisme-solidaire pour répondre aux pouvoirs financiers et corporatifs, un nationalisme que j’oserais nommé « fraternité des Nations ». Dans ce concept, l’exclusion, la division et l’exploitation n’auraient plus de légitimité. Il s'agit d'un nationalisme ouvert, coopératif et fondé sur le partage. 

Cette fraternité est un projet humaniste ancien qui devient de plus en plus une nécessité. Seule l’unité des nations pourra contrer les grands intérêts corporatifs d’abord concernés par leurs profits plutôt que par le bien commun.


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