En réponse à la réaction de Siriki Diabagaté à mon article précédent...
Heureux que ma réflexion personnelle sur un des enjeux les plus sensibles du développement communautaire fransaskois ait pu vous inspirer, Siriki, d’entamer un échange d’idées sur cette question importante et toujours d’actualité.
Dans mon article précédent (Eau vive vol 43-no.13) j’abordais la dynamique entre l’agent de développement communautaire et son conseil d’administration (CA). Lors des consultations communautaires, et de par mon expérience personnelle, j’ai remarqué combien cette dynamique peut assurer un développement réussi ou entraîner un disfonctionnement de l’organisme. Je ne dis certainement pas que c’est le seul facteur qui peut déstabiliser la vitalité communautaire. Comme vous le mentionnez, les rapports des consultations communautaires de 2012, à la rédaction desquels j’ai d’ailleurs participé activement, présentent bien d’autres enjeux significatifs à l’épanouissement des communautés fransaskoises. J’ai cherché à éclairer des voies alternatives de gouvernance pour renforcer le leadership des agents de développement communautaire et éviter les dérives, si souvent vécues, où la communauté perd des agents compétents à cause de conflits avec les membres du CA.
Pour répondre directement à votre interprétation de mon texte; je ne crois pas du tout que le CA « semble être quelque chose de nuisible ». Là où des agents compétents sont entourés d’un CA tout aussi compétent, beaucoup de potentiels émergent. Toutefois, j’ai présenté quatre scénarios de dynamiques problématiques entre l’agent et son CA. Je crois, toutefois, comme vous j’espère, que les agents de développement communautaire sont les premiers ouvriers du développement et que leurs compétences sociales, leur professionnalisme et leur créativité sont les véritables moteurs du développement. Si les agents sont efficaces, ils vont dynamiser les forces vives de cette communauté, les gens, leurs passions et leurs compétences. Les agents devraient, d’ailleurs on s’entend aussi sur ce point, être bien mieux payés pour leur expertise. D’autant plus qu’ils sont souvent au travail plus de cinq jours par semaine.
Le CA est bien sûr utile sur le plan administratif, mais que ferait-il sans employé? Un CA dynamique signifie que des citoyens veulent voir leur organisme local se développer et qu’ils acceptent d’en prendre une part de responsabilité. Mais vous conviendrez que l’employé est celle ou celui qui doit avoir les compétences pour mobiliser, organiser, stimuler et participer au développement de la communauté. Le meilleur CA sans un bon employé n’accomplira pas grand-chose et s’épuisera rapidement mais l’inverse est pourtant possible. De là, la primauté que nous devons donner aux agents et limiter l’ingérence exagérée de certains membres de CA dans la programmation du centre communautaire.
En fait, je défends l’idée que l’agent n’est pas au service du CA, mais plutôt au service de la communauté et du plan/programmation que cette dernière s’est donnée. Je recommandais, dans mon article, que cette programmation soit une affaire communautaire donnant ainsi un plan clair à l’agent et surtout encourageant une participation active de la communauté dans son propre développement. L’agent a d’ailleurs comme fonction de mobiliser les membres de la communauté, et ainsi consolider l’engagement et la participation locale dans la programmation.
Je propose dans ce sens que l’évaluation des agents relève en partie des membres de la communauté, parce que si l’agent est apprécié par la communauté et non par son CA, je pense que nous devrions plutôt tenir compte de l’opinion populaire. Une évaluation 360 degrés de l’agent serait une option. Je crois aussi que les meilleures ressources professionnelles pour les agents se trouvent souvent hors de l’organisme, soit dans le réseau associatif fransaskois. Plusieurs exemples remarquables de collaboration existent et permettent le renforcement du travail des agents. Il y a par contre des communautés où cette relation entre l’agent, son CA et le réseau associatif est difficile et même conflictuelle. À titre de président de l’ACFR, vous êtes bien évidemment conscient de ce type de problèmes, n’est-ce pas?
J’espère ainsi contribuer à la réflexion sur des alternatives novatrices dans la gouvernance et l’organisation communautaire afin de relever nos défis de manière plus efficace et avec une meilleure cohésion de toutes les parties prenantes. J’aspire bien sûr aussi à contribuer à la valorisation des compétences professionnelles et du travail colossal et fondamental fait par les agents communautaires dans nos régions.