Il est clair aujourd’hui combien simple il est devenu possible de tordre la réalité pour créer de fausses vérités. Évidemment, les démagogues et les menteurs ne sont pas arrivés dernièrement parmi nous. Sauf qu’aujourd’hui, notre consommation d’information est tellement instantanée et succincte, via les réseaux sociaux, que le jugement critique est moins aiguisé. De plus, à force d’entendre et de lire le même mensonge, plusieurs finissent par y croire. Certains vont maintenant croire des faits déformés, d’autres vont douter de vérités factuelles.
Il semble, par contre, qu’il existe une force cachée qui soit commune derrière ces mensonges fabriqués : attiser les émotions. Ces dernières sont facilement aveugles face aux faits. Connaître les peurs des uns, les aspirations des autres, permet de créer des faits qui vont confirmer leurs croyances. Après quoi, chacun va diffuser, répéter et renchérir sur ces faussetés qui confirment leurs propres croyances. Rien de nouveau ici dans la psychologie de la rumeur, sinon que ce phénomène est amplifié à l’échelle planétaire au moyen des réseaux sociaux.
Lorsque l’on entend les représentants de la Maison-Blanche traiter les médias de « fake news », l’objectif est de les discréditer, mais aussi, sinon surtout, de galvaniser les émotions de tous ces gens qui se sentent « victimes » des faits, bien réels, qui constituent leur réalité quotidienne difficile. Ainsi, n’est-il pas plus agréable de croire que les données statistiques sur la baisse de la criminalité sont fausses lorsque nous avons vécu des crimes à notre égard? Il est aussi plus facile de dire qu’il existe de la division raciale dans une communauté sans en exposer les faits, plutôt que dire l’inverse ce qui pourrait paraître impossible. Le premier attise des peurs profondes, l’autre pas. Mais la réalité n’est surtout ni noire ni blanche, elle est faite de complexités et de personnalités.
Comme il est plus simple de juger et de condamner que de chercher à comprendre.
Ne soyons plus naïfs, la manipulation de l’information est devenue un instrument efficace pour attiser les émotions et mettre en scène des mensonges d’une réalité facile. C’est une ancienne stratégie politique de guerre qui persiste sous d’autres médiums. Il semble clair que nos émotions ont une efficacité remarquable pour déformer les faits au profit de nos psychoses et croyances personnelles. Sachons donc prendre un recul, prendre le temps d’envisager la complexité et son contexte avant de porter des jugements trop faciles ou de croire aux premières rumeurs.