Numéro 1 - Printemps 2017

***

L’argument liquide de l’amour


L’argument liquide de l’amour

Laurent Poliquin (Manitoba)

Les éclats de la nuit

Les éclats de la nuit

Crédit : Laurent Poliquin

l’argument liquide de l’amour

s’étendant plus loin que le fleuve

car la source s’alimente 

dans de hautes prairies

parle une langue ancienne

celle d’une auberge dans le vent

à l’esprit tendu

par des tentations nocturnes

 

à chaque mouvement

chaque plongée éolienne

dans l’instant de ces yeux 

qui s’abreuvent entre eux

désarçonne des douleurs

 

à pas serrés

des cœurs explorent des tumultes

alors que des miasmes de pluie 

rompent les falaises

de la ferveur du monde

 

***

j’aime

les voûtes de ses baisers fredonnés

explorant des cyclones

ceux qui roulent dans l’ardeur de l’attente

 

j’aime

ces chapelles en ruine

abritant l’arcane des souvenirs

supplice de minuscules vies dont parle Michon

 

j’aime les approches quand tout fuit

les déclarations figeant les vitres dans les regards

 

j’aime ce poids de métamorphose dans ces corps

ces rondeurs de naissance

qui ne mentent pas sur les bébés à naître

ces écartèlements de la voix débitant des fables

obstinément belles

précipitant ma patience dans l’urgence d’écrire

 

j’aime la fureur volcanique

quand un essaim amoureux se forme 

à la frontière de mes mains

ces regards tentaculaires qui se posent devant moi

 

j’aime les audaces du songe

celles qui favorisent la présence

cette nudité qui n’ignore pas la flèche de cupidon

j’aime la chute irrésolue du vase

quand la volonté d’un mot le retient

le lit vertigineux qui protège le fracas de la vie  

 

j’aime la fonte des lèvres

qui fredonnent l’événement 

d’une nuit guérie de son crépuscule

 

le cœur biseauté

la brûlure du forgeron

ces décrets qui brûlent

capables d’élire la grâce au rang de canicule

 

j’aime les doutes du jour

quand il fait soleil

ça ne me dérange pas

que coule la chaleur comme le sommeil 

une nuit emmitouflée de neige

 

j’aime tous les rêveurs de désir

toutes les convulsions des feuilles craquantes sous les pas

toutes les heures futures qui dévorent des instants

libérant des cris de lucidité

ces chanteurs impopulaires

ces poèmes trop compliqués

ces mots qui font mal

pas parce qu’ils font mal

parce qu’ils font ils fuitent

habiles spasmes 

refusant le repos du plaisir 

 

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