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Tribune libre

NOTE: Les opinions exprimées sur cette pages sont celles de nos lecteurs et lectrices et ne reflètent pas nécessairement celles de l'Eau vive. Si vous désirez soumettre un texte veuillez le faire parvenir à redaction@leau-vive.ca.

Question de l'inclusion dans la communauté fransaskoise

Point de vue d’une Fransaskoise de souche

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Je suis députée communautaire de l’Assemblée communautaire fransaskoise (ACF) pour la région des Battlefords mais j'ai passé ma jeunesse dans le petit village de Bellevue, où les gens étaient tous des Canadiens-français catholiques. Je me souviens de la première fois que j'ai vu un Africain, à 9 ans, et il était venu à la messe. Je me souviens clairement que sa grosse boule de cheveux noirs et ses épaules dépassaient de loin toutes les têtes des Gaudet et Gareau. J'ai été tellement étonnée que je me suis virée de bord une fois de trop et ma mère m'a pincé le bras!

Cette histoire est pour vous faire comprendre que nos communautés fransaskoises étaient homogènes très récemment, mais que nous faisons face à des nouvelles réalités.

J’ai pris la décision de communiquer avec vous pour trois raisons :

Premièrement, comme Saskatchewannaise francophone, je veux exprimer ma solidarité avec tous les immigrants qui ne sont pas encore résidents permanents et partager comment j’ai compris que les gens qui sont ici avec des permis de travail ou comme réfugiés font partie intégrante de la survie de la francophonie en Saskatchewan.

J'ai travaillé pendant 8 ans à l’ACF dans le développement communautaire. Pendant ce temps, je suis devenue très proche avec mes collègues de travail immigrants qui n'étaient pas encore des résidents permanents. L'un était Gildas Helye. Comme j'ai eu très peu d'éducation en français, j’avais de la grosse misère à écrire en français. Sans son appui, ça n’aurait jamais été possible pour moi de travailler en français dans ma propre communauté.

Selon la logique des changements proposés aux règlements de l’ACF, même avec les longues heures et milliers de kilomètres pour appuyer nos communautés, Gildas et sa conjointe, qui sont d’ailleurs les parents d'un petit Canadien, n'auraient pas eu assez d'engagement pour être membres de l'ACF et avoir le droit de vote.

Quelle hypocrisie d'encourager les gens de venir faire leur vie ici et de travailler dans nos organismes, mais comme des personnes de seconde classe. Franchement, ce n’est pas les valeurs d'accueil et de solidarité qui ont permis au fait français de survivre pendant plus de 400 ans au Canada. 

Deuxièmement, je m'adresse aux Fransaskois de souche qui se demandent pourquoi NOUS avons le devoir de nous inscrire à l’AGA de l’ACF et de voter sur les changements aux règlements de l'ACF. On peut se dire que ça ne nous touche pas, et que la question de l'immigration est inconnue et complexe. La seule immigrante que j'ai connue dans ma jeunesse était mon arrière-grand-mère, Antoinette Deault. Elle était très âgée, mais elle racontait à tous ses arrière petits-enfants le gros navire sur lequel elle est venue au Canada avec son père à 4 ans. Elle a eu 11 enfants et une centaine de petits-enfants, tous francophones. Imaginez dire à son père, en 1912, «Vous n'êtes pas bienvenu à la rencontre fondatrice de l'ACFC à Duck Lake! C'est ce que les changements proposés suggèrent.

Troisièmement, il faut faire face à notre histoire fransaskoise. Dans ma famille, mes arrières grands-parents Hélène et Adolphe Lemieux sont tombés en amour. Cependant, la famille d’Hélène a refusé qu’ils se marient car Adolphe n'était pas acceptable comme époux. Venant de la Rivière Rouge et foncé, Adolphe était "trop Métis" pour leur fille de Prudhomme. Ils se sont enfuis ensemble et un prêtre les a mariés quand-même.

Il ne faut pas se le cacher : le racisme et la xénophobie existent depuis la création de notre communauté. Nous avons le devoir d’être toujours vigilants et de ne pas répéter les erreurs de notre histoire collective. Comme les changements proposés ne sont pas exigés par la loi sur les Organismes à but non lucratif (OBNL), c'est très difficile pour moi de croire que ce n'est pas un cas de discrimination.

Un aîné cri m’a dit : « Vous les blancs, êtes si nombreux que vous pouvez rejeter autant de personnes que vous voulez, mais nous sommes très peu et chacune de nos communautés est importante. »

Comme francophones, on ne peut se permettre de rejeter aucune personne qui s’engage à faire partie de notre communauté.

Pour l'avenir de notre communauté fransaskoise, je vous invite TOUS à vous inscrire pour participer en personne ou par vidéo/téléconférence à l’AGA de l’ACF prévue pour le 24 juin 2017 à Prince Albert.

Christine Freethy
Rabbit Lake