WASHINGTON _ Les élections provinciales du Canada sont rarement suivies avec intérêt par les Américains. Or, les élections albertaines de mardi ont attiré leur attention, cette fois-ci en raison de ses conséquences sur l'un des projets d'oléoducs les plus controversés de leur histoire: Keystone XL.
Jane Kleeb, qui s'oppose à la construction de l'oléoduc, se tenait informée lors de la campagne électorale et elle s'est réjouie avec d'autres militants de l'arrivée au pouvoir des néo-démocrates après plus de quarante ans de gouvernance conservatrice.
Mme Kleeb se dit pleine d'espoir parce que ce résultat électoral pourrait signifier à l'administration Obama que la province a finalement rejeté le projet Keystone XL. Selon elle, les Albertains ont clairement "envoyé un message à leur gouvernement".
Les grands réseaux américains ont d'ailleurs analysé le résultat du scrutin en fonction de cet enjeu.
Sur le réseau MSNBC, qui penche plutôt à gauche sur l'échiquier politique, l'animateur Ed Schutz a parlé d'une "révolution politique" qui amène des mauvaises nouvelles à TransCanada puisque son projet serait menacé.
Le site internet Salon affichait quant à lui la manchette suivante: "L'Alberta a élu un groupe de socialistes qui détestent Keystone XL."
Les médias plutôt partisans du projet de construction ont aussi réagi. Le Wall Street Journal, qui se range souvent du côté de l'industrie, a publié un article où il prédisait que cette élection pourrait "amener un nouvel obstacle important" aux entreprises pétrolières, qui sont déjà durement éprouvées par la chute des prix du pétrole.
Concernant le projet Keystone XL à l'étude aux États-Unis, la première ministre élue de l'Alberta, Rachel Notley, a simplement dit privilégier que le pétrole brut soit raffiné dans la province au lieu de l'envoyer tel quel aux États-Unis. Elle est aussi en faveur du projet Énergie Est, mais elle s'est toutefois opposée à Northern Gateway de l'entreprise Enbridge pour des raisons environnementales.
Mme Notley a toutefois clairement signifié qu'elle ne se rendrait pas à Washington pour faire la promotion des projets comme l'ont fait ses prédécesseurs.
L'Alberta avait envoyé quatre représentants dans la capitale américaine pour tenter d'influencer les législateurs américains, dont l'ancien député conservateur fédéral Rob Merrifield. Un porte-parole de la province a affirmé qu'il était encore trop tôt pour déterminer ce qui allait advenir de ce changement de cap.
Un conseiller d'entreprises des deux côtés de la frontière a affirmé qu'il avait reçu plusieurs questions de ses clients. Paul Frazer a voulu les rassurer en affirmant qu'il n'y aurait pas de changements radicaux ou soudains.
"J'ai l'impression que la première ministre est très pragmatique (...) Les gens d'affaires américains à qui j'ai parlé se rendent compte qu'ils ne doivent pas paniquer ou adopter des mesures précipitamment", a-t-il expliqué en entrevue avec La Presse Canadienne.